Fin de la redevance : grève "massive" sur les télés et radios publiques, inquiètes pour leur avenir
Refus de la suppression de la redevance, craintes plus larges face à des projets gouvernementaux jugés flous... Les radios et télés de l'audiovisuel public ont fait une grève "massive" mardi, avant des échéances politiques déterminantes pour leur avenir.
En raison de ce mouvement, la musique a tourné à plein sur France info, France Inter ou France Culture, les trois quarts des journalistes de Radio France censés travailler étant en grève, selon un de leurs syndicats, le SNJ.
Des sources internes à France Télévisions recensaient 45% de grévistes tous métiers confondus au sein du réseau France 3, du "jamais vu", et 25% au siège parisien.
Conséquence: sur France 2, le JT de 13H, "solidaire" du mouvement, a été raccourci et des extraits de Télématin ont été rediffusés à la place de la matinale, une première en 30 ans.
Perturbations également sur les chaînes franceinfo et France 24, les salariés de France Médias Monde (France 24 et RFI) étant eux aussi appelés à se mobiliser par une intersyndicale CGT-CFDT-FO-SNJ-SUD-UNSA-CGC-CFTC, tout comme ceux d'Arte et de l'Ina.
A Paris, plusieurs centaines de personnes ont manifesté sous le soleil entre Montparnasse et l'Assemblée nationale, derrière une banderole clamant "Sauvons l'audiovisuel public".
Devant l'Assemblée, les manifestants ont reçu le soutien de députés Nupes, juste avant le début des travaux de la nouvelle assemblée élue en juin.
- "Mise à mort" -
La Nupes était venue en force, avec Danielle Simonnet, Sandrine Rousseau, Adrien Quatennens, François Ruffin, Raquel Garrido ou encore Aymeric Caron. Signe que l'opposition de gauche veut peser dans ce débat après l'affaiblissement de la majorité LREM aux législatives.
La suppression de la redevance telle qu'envisagée par Emmanuel Macron équivaut à "une mise à mort du service public de l'audiovisuel", a déclaré à l'AFP la députée Nupes/LFI Clémentine Autain.
La fin de la redevance est inscrite dans le paquet de mesures sur le pouvoir d'achat, qui doit être présenté le 6 juillet en Conseil des ministres, pour un examen dans la foulée par les députés.
Mais le résultat des élections législatives de juin et l'affaiblissement de la majorité LREM rendent les débats plus incertains.
Si tout se passe selon ses plans, l'exécutif veut supprimer la redevance dès cet automne, au profit d'un budget courant sur plusieurs années.
Cette mesure a été proposée par M. Macron pendant la campagne présidentielle, au titre du pouvoir d'achat. Mais selon ses opposants, elle menace le financement et l'indépendance de l'audiovisuel public.
D'un montant de 138 euros en métropole et 88 euros outre-mer, la redevance ne concerne que les foyers qui détiennent un téléviseur et s'avère d'autant plus stratégique que les chaînes de service public sont privées de publicité en soirée depuis 2009.
- Fusion? -
Sa suppression entraînera un manque à gagner de plus de 3 milliards d'euros, que l'Etat promet de compenser.
Mais les grévistes s'inquiètent de voir le budget de l'audiovisuel public "décidé par le gouvernement et soumis aux aléas du vote des lois de finances annuelles". Ils lui préfèrent "une ressource affectée, garantissant au mieux son indépendance économique et politique", selon un tract syndical.
"Ma crainte, c'est que même si on nous propose un nouveau mode de financement, il ne sera jamais à la hauteur de ce qu'on a maintenant", a affirmé à l'AFP Sarah Danzelle, documentaliste à France 3 Normandie et déléguée syndicale Sud, qui a manifesté à Paris.
Dans un rapport publié lundi par la Fondation Jean-Jaurès, l'économiste engagée à gauche Julia Cagé a proposé d'instaurer un nouveau mécanisme de redevance inspiré des pays nordiques. Il s'agirait d'un impôt spécifiquement dédié au financement de l'audiovisuel public, mais variable selon les revenus des foyers.
Au-delà de la question de la redevance, les grévistes s'inquiètent pour l'avenir de l'audiovisuel public depuis qu'un rapport sénatorial LR publié le 8 juin a lancé l'idée d'une grande fusion entre France Télévisions, Radio France, France Médias Monde et l'Ina.
"C'est un sujet dans l'air depuis plusieurs années. Ce débat aura lieu", a affirmé la semaine dernière la nouvelle ministre de la Culture, Rima Abdul Malak, dans le journal Le Parisien/Aujourd'hui en France. Elle sera auditionnée mercredi par la commission de la Culture et de la Communication du Sénat.
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