Hauts-de-France : la généralisation de la vidéosurveillance dans les lycées en débat
Tous les lycées des Hauts-de-France, soit 265 établissements, seront prochainement équipés de la vidéosurveillance selon le souhait de l'exécutif régional, une mesure qui suscite quelques inquiétudes chez les parents d'élèves et les spécialistes.
Votée jeudi en séance plénière du Conseil régional, ce dispositif au coût de 10 millions d'euros concrétise une promesse de campagne de Xavier Bertrand (LR), alors candidat aux régionales de 2015 et actuel président de la région.
"Au regard du contexte sécuritaire particulièrement difficile, illustré par les récents événements de Grasse, il nous est rappelé que les établissements publics locaux d'enseignement (EPLE) ne sont pas exempts de risques. La volonté du Conseil régional est de faire de la sécurisation des EPLE, une véritable priorité régionale", explique la région.
Ainsi, la généralisation à partir de la rentrée prochaine de la vidéosurveillance par des caméras "à boule" (à vision nocturne et filmant à 360 degrés) à l'intérieur des lycées (une à deux par couloir) et à l'extérieur (tubulaires à plan fixe) fait partie d'un "plan de sûreté" global de 22 millions d'euros adopté jeudi. Celui-ci comporte également des travaux de sécurisation, la mise en place de sonneries différenciées ou encore la formation du personnel pour savoir "réagir en cas d’attaque terroriste" dans les lycées.
L'utilisation de la vidéosurveillance en milieu scolaire est très réglementée. Dans un rapport de mai 2016, la CNIL (Commission nationale Informatique et Libertés) préconisait leur utilisation de manière "limitée" et uniquement "complémentaire à d’autres mesures de sécurité".
"Seules des circonstances exceptionnelles (établissements scolaires victimes d’actes de malveillance fréquents et répétés) justifient de filmer les élèves et les enseignants en continu", selon l'instance.
-'Annonces symboliques'-
Le projet de la Région émeut la Fédération des conseils de parents d'élèves (FCPE) du Nord qui "s'inquiète" de l'utilisation possible des données.
"Qu'est-ce qu'on fait des images? Il est question de les envoyer vers des centres de surveillance urbains (CSU), mais qui les observera? A l'intérieur des établissements, les caméras ne vont pas empêcher qu'il y ait des problèmes avec les élèves et même, au contraire, peuvent être vues comme une provocation!" affirme Nathalie Gaujac, secrétaire générale de la FCPE Nord.
Leur utilisation à l'extérieur des établissements la laisse également songeuse: "Sur des cités scolaires très étendues où on ne peut pas mettre partout du personnel, cela peut s'entendre mais on ne remplacera jamais la présence humaine. On voit bien que les villes ont déjà des caméras de partout et pourtant ce n'est pas cela qui dissuade la délinquance..."
Une position partagée par Laurent Mucchielli, sociologue et directeur de recherches au CNRS, auteur de "L'Invention de la violence" (Fayard, 2011) pour qui ces annonces "sont largement symboliques et politiques".
"Dans ce cas, il faudrait mettre des caméras partout! Or, on voit bien que leur seule utilité est de contribuer après-coup à une enquête et encore, leur utilité est bien limitée quand on observe la liste des attentats commis en France où les terroristes se suicident..." ajoute-t-il.
Selon le sociologue, "chaque situation et établissement est différent et nécessite des besoins précis". Lui aussi pense que "rien ne remplacera le personnel humain": "Les 10 millions d'euros auraient pu être utilisés plus intelligemment, permettant par exemple d'embaucher des personnes et réduire le chômage des jeunes."
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