L'actrice Laure Calamy pour inscrire "d'urgence" le droit à l'avortement dans la Constitution
"Il faut une prise de conscience": à Angoulême où elle est venue présenter "Annie Colère" qui retrace le combat pour la légalisation de l'avortement en France, l'actrice Laure Calamy appelle à inscrire "d'urgence" ce droit dans la Constitution.
Présenté en compétition au festival du film francophone, ce troisième long-métrage de Blandine Lenoir revient sur les destins oubliés des militantes du MLAC (Mouvement pour la liberté de l’avortement et de la contraception), qui pratiquaient des avortements avant leur légalisation en 1975 par la loi Veil.
Film choral, "Annie Colère" n'est pas sans rappeler "120 battements par minute"(2017) sur le combat d'Act Up au début de l'épidémie de sida et résonne avec le Lion d'or attribué l'an dernier à Venise à "L'événement" d'Audrey Diwan, sur un avortement dans les années 1960.
Ici, Laure Calamy, l'actrice de "Dix pour cent", est Annie, une ouvrière et mère de deux enfants qui ne veut pas d'une nouvelle grossesse.
Mais dans la France d'Annie, l'avortement est illégal.
Elle entre alors en contact avec le MLAC, avant d'en devenir un pilier.
Pas seulement un film sur l'IVG, "Annie Colère" est aussi le récit d'une émancipation. Car le MLAC n'est pas seulement un endroit où avorter, c'est un espace où les femmes se rencontrent, échangent et découvrent une autre vision de leur corps et de leur sexualité.
"La mémoire collective n'a pas retenu le combat de ces femmes. On a l'impression que c'est Simone Veil toute seule qui a permis la légalisation de l'avortement alors que c'est la pression des femmes, des militantes, qui a rendu possible la légalisation", assure à l'AFP l'actrice de 47 ans.
- "Combat permanent" -
"Ces femmes sont des héroïnes. Ce sont grâce à elles que nous pouvons aujourd'hui choisir nos grossesses. Ce film est pour elles", complète la réalisatrice qui collabore pour la 3e fois avec l'interprète d'"Antoinette dans les Cévennes".
En salles le 30 novembre, "Annie colère" sort en pleine remise en cause du droit à l'avortement aux Etats-Unis par la Cour suprême. Une décision qui pourrait, selon Laure Calamy, faire des émules. Même en France.
"Il faut avoir cette prise de conscience que c'est un combat permanent, que ce ne sera jamais terminé", affirme-t-elle.
"Je me souviens de la complaisance de Jacques Chirac pour les mouvements anti-IVG qui venaient s'enchaîner dans les plannings familiaux pour culpabiliser les femmes. C'est tout le temps, il y a tout le temps des pressions pour contester ce droit qu'il faut absolument inscrire dans la Constitution. D'urgence" poursuit-elle.
Début juillet, des propositions de loi ont été déposées à l’Assemblée dans le but d'ancrer ce droit dans la Constitution.
En attendant, les experts estiment eux, que le droit à l'avortement est davantage fragilisé sur le terrain: clause de conscience des médecins, manque de sages femmes... "Il y a encore beaucoup à faire pour déstigmatiser cet acte", estime l'actrice.
Dans le film, la clause de conscience des médecins est évoquée. Signe que dès les années 1970, le sujet préoccupait les militantes. Reste une question: comment y pallier ?
La thèse du film est qu'il faudrait permettre que les avortements ne soient pas uniquement pratiqués par des médecins, comme le faisaient les militantes du Mlac qui s'étaient formées à la technique de l'aspiration et pouvaient, in fine, pratiquer des avortements.
"Avec cette méthode, on s'est rendu compte qu'on pouvait se transmettre le geste et faire en sorte que ce soit quelque chose dont on soit maîtresse", observe l'actrice. "Maîtresses de nos destins et de nos corps."
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