G7 : Biarritz, cité balnéaire autrefois prisée des têtes couronnées
Biarritz, qui s'apprête à accueillir le G7, a vu passer têtes couronnées et aristocrates distingués depuis que l'impératrice Eugénie, épouse de Napoléon III (1808-1873), a transformé ce petit port de pêche en une station balnéaire à la mode, un rendez-vous cosmopolite au coeur d'une région basque plus traditionnelle.
. La prophétie de Victor Hugo:
En 1854, quand Eugénie s'éprend de Biarritz, quelques aristocrates britanniques, au départ venus visiter les tombes de soldats tombés dans la région face à Napoléon, ont commencé à s'adonner aux bains de mer et à profiter de l'agréable climat. On se loge dans des "chalets" et on se baigne à la "plage des fous" où dans les années 1820-1830, raconte Alain Puyau, historien et conseiller municipal depuis 2008, des médecins de la ville voisine de Bayonne "amènent des malades, notamment mentaux, pour les mettre dans les vagues et créer un choc selon eux bénéfique".
En 1843, Victor Hugo séjourne à Biarritz et s'inquiète de voir ce village pittoresque devenir bientôt comme des bourgs de la côte normande: "C'est en fait une prophétie, il annonce ce qui ne tardera pas à se réaliser...".
. Avec Eugénie, c'est toute une histoire:
D'origine espagnole, la jeune impératrice affectionne les bains de mer et choisit aussi Biarritz pour sa proximité avec Saint-Sébastien où une partie de sa famille passe ses vacances.
"Eugénie veut quelque chose de privé, une petite bâtisse, avec 8 chambres à l'étage, en retrait de la falaise au-dessus de la plage, face à l'océan". Napoléon III fait araser des dunes, canaliser des rivières, éliminer des lacs pour faire naître un grand domaine impérial.
Hôtels et grands magasins poussent autour, une gare est construite. Les séjours impériaux vont durer jusqu'en 1868 et les têtes couronnées défilent: rois de Belgique et du Portugal, grands d'Espagne, princes russes et polonais... Plus tard, le prince de Galles, futur Édouard VII, élira résidence à l'Hôtel du Palais.
Après guerre, le gotha continue de venir, avec les vedettes du cinéma français ou de Hollywood qui jouent aux casinos et forgent l'aura glamour qui nimbe toujours la ville.
"Même les maires républicains du début du XXe siècle ont entretenu cette image" impériale, souligne M. Puyau. Pour garder "la clientèle espagnole qui fait la richesse de Biarritz, ils vont construire le mythe d'Eugénie et en faire la bienfaitrice de la ville."
. Si Bismarck s'était noyé...
"A Biarritz, Eugénie imposait ses habitudes à ses invités: je me baigne, tout le monde se baigne", raconte M. Puyau. Lors d'un séjour en 1865, Bismarck n'y coupe pas. Pris par un courant, celui qui deviendra chancelier d'Allemagne manque de se noyer. Il est sauvé par un de ces anciens pêcheurs reconvertis en maîtres-nageurs. "Imaginez un peu ! Sans lui, il n'y aurait peut-être pas eu la guerre de 1870, et donc la catastrophe de 1914..."
. Biarritz la "satanique":
L'émergence de Biarritz est vécue "comme une agression" par les Basques de l'intérieur des terres, globalement ruraux et conservateurs. "Apparaissent en effet des comportements et des façons de vivre contraires aux moeurs basques, encore très diligentées par le clergé catholique", notamment dans les années 20, décrit Alain Puyau.
Les femmes se dénudent, dansent, fument et se mêlent aux hommes... On n'y parle pas ou peu le basque. En réaction, selon l'historien, le clergé "va créer le folklore basque" et ses danses.
La "ville satanique" dénoncée par les évêques aspire les forces vives basques en drainant sa main d'oeuvre dans la construction et l'hôtellerie: autant de brebis perdues pour le clergé.
Avant-guerre, sa modernité, son architecture, son luxe, ses automobiles font de Biarritz un "ovni cosmopolite".
Pourtant, l'aura de Biarritz a nourri le tourisme local. Aujourd'hui, "Biarritz Pays Basque" fait partie des marques reconnues par le ministère des Affaires étrangères pour la promotion de la France.
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