Travaux, caution, état des lieux : que faire en cas de litige au moment de quitter son appartement ?
Le départ d’un locataire de l’appartement loué pose régulièrement des difficultés sur l’état des lieux de sortie, des travaux de remise en état ou de la restitution du dépôt de garantie.
> L’état des lieux de sortie, pour quoi faire?
Pour éviter tout problème, il a été prévu la mise en place (non obligatoire, mais vivement conseillée) d’un état des lieux à l’entrée du locataire et lors de sa sortie.
Prévues par la loi Alur du 24 mars 2014 destinée à améliorer les rapports locatifs, les modalités d'établissement des états des lieux d'entrée et de sortie sont désormais précisées par le décret n° 2016-382 du 30 mars 2016.
Ce document est établi contradictoirement entre le propriétaire et son locataire et comporte la description écrite de l'état du logement au départ du locataire. Il peut également être établi par constat d’huissier, à frais partagés, à la demande de l’une des parties. Celles-ci ont tout intérêt à ce qu'il soit réalisé, puisque c'est cet état des lieux qui va justifier la possibilité pour le propriétaire d’imputer des sommes sur le dépôt de garantie en cas de dégradations.
A l'entrée et à la sortie, l'état des lieux doit préciser: la date d'établissement de l'état des lieux , la localisation du logement, la désignation des parties ou de leur mandataire et la domiciliation du bailleur, les relevés de compteurs individuels d'eau ou d'énergie, le détail et la destination des clefs ou tout autre dispositif d'ouverture des locaux à usage privatif ou commun, la description précise de chaque pièce et partie du logement (état des revêtements des sols, murs et plafonds, les équipements et éléments), les éventuelles observations ou réserves, la signature des parties.
A la sortie du logement, l'état des lieux doit également préciser: la nouvelle adresse du locataire, rappeler la date de réalisation de l'état des lieux d'entrée, l'évolution ou l'absence d'évolution de l'état de chaque pièce et partie du logement constatée depuis la tenue de l'état des lieux d'entrée.
En l’absence d’état des lieux d’entrée, le locataire est présumé avoir reçu le logement en bon état de réparations locatives. Quel que soit l'état initial du logement, il devra donc le restituer en bon état de réparations locatives, sauf s'il peut apporter la preuve du mauvais état initial du logement, par exemple au moyen de photographies réalisées par un huissier. Pour les autres réparations, c'est au propriétaire de démontrer qu'elles sont imputables au locataire.
En l'absence d'état des lieux de sortie, le locataire est réputé avoir restitué les lieux en bon état et aucune déduction sur le dépôt de garantie ne pourra être opérée. Les clés sont normalement restituées au propriétaire à l'issue de l'état des lieux de sortie.
> Quels sont les réparations à la charge du locataire à son départ?
Rappelons les obligations du propriétaire et du locataire en matière de travaux.
Le bailleur doit remettre au locataire un logement décent en bon état d'usage et de réparation ainsi que les équipements mentionnés au contrat de location en bon état de fonctionnement. Il doit effectuer dans le logement toutes les réparations, autres que locatives (donc les grosses réparations, voir ici), nécessaires au maintien en état et à l'entretien normal des locaux loués.
Pour sa part, le locataire doit répondre des dégradations et pertes qui surviennent pendant la durée du contrat, doit prendre à sa charge l'entretien courant du logement, des équipements et les menues réparations ainsi que l'ensemble des réparations locatives (voir ici), sauf si elles sont occasionnées par la vétusté.
Depuis le 1er juin 2016, les parties au contrat de location peuvent convenir de l'application d'une grille de vétusté dès la signature du bail. La vétusté est définie comme l'état d'usure ou de détérioration résultant du temps ou de l'usage normal des matériaux et éléments d'équipement dont est constitué le logement.
Cette grille définit au minimum, pour les principaux matériaux et équipements du bien loué, une durée de vie théorique et des coefficients d'abattement forfaitaire annuels affectant le prix des réparations locatives auxquelles serait tenu le locataire.
Hormis la vétusté des équipements, le locataire est donc responsable des dégradations survenues dans le logement, qu’elles soient intervenues volontairement ou pas (vitres brisées, moquette trouée, tapisserie déchirée, appareils hors d'état de fonctionner).
Attention, si des transformations importantes ont été réalisées sans l’accord du bailleur (remplacement de la moquette par du parquet ou inversement, l'abattement d'une cloison), la loi prévoit que le propriétaire puisse conserver le bénéfice des transformations sans indemniser le locataire ou exiger la remise des lieux en l'état initial.
> Comment se passe la restitution du dépôt de garantie?
Suite aux lois Alur de 2014 et Macron de 2015, la restitution du dépôt de garantie s'effectue dans le même délai, que le logement soit vide ou meublé et quelle que soit sa date de signature:
- dans un délai maximal d'un mois à compter de la remise des clés par le locataire lorsque l'état des lieux de sortie est conforme à l'état des lieux d'entrée ;
- dans un délai maximal de deux mois à compter de la remise des clés en présence de dégradations.
Au-delà du délai de deux mois, le propriétaire peut encore valablement conserver une partie du dépôt de garantie, jusqu'à 20 % de celui-ci, et ne restituer le solde éventuellement dû, sans intérêts, qu'après la régularisation annuelle des charges, mais uniquement si le bail prévoyait des charges réelles.
Le montant du dépôt de garantie remis à la signature du bail peut être diminué des sommes restant dues au propriétaire.
Il peut s’agir d'impayés si le locataire n'a pas, par exemple, payé le ou les derniers mois de loyers ou s'il a refusé de payer une régularisation de charges. Mais aussi des sommes correspondant aux travaux de réparation ou de remplacement rendus nécessaires par des dégradations et pertes imputables au locataire.
Le propriétaire pourra demander devant le tribunal d’instance au locataire et à son éventuelle caution de payer le solde restant dû, si le dépôt de garantie ne suffit pas.
Concernant les dégradations et les pertes, le propriétaire qui souhaite retenir une somme sur le dépôt de garantie doit toujours justifier la retenue par un devis ou, idéalement, par une facture.
Il faut en revanche toujours prendre en compte l'usure normale du temps et donc la vétusté et appliquer un abattement sur le montant de la facture: il ne s'agit donc pas de facturer intégralement au locataire la remise à neuf du logement !
Les tribunaux estiment généralement la durée de vie des peintures et tapisseries à environ dix ans, celle des moquettes à environ sept ans et de l'électroménager (micro-ondes par exemple) à environ cinq ans.
Si le propriétaire ne respecte pas le délai de restitution du dépôt de garantie, le montant du dépôt est majoré d’une somme égale à 10% du loyer mensuel hors charges. Etant précisé que chaque mois de retard commencé est considéré comme un mois entier de retard.
> Quels sont les recours en cas de litige?
Toute contestation portant sur l'état des lieux de sortie peut être portée, par le propriétaire ou le locataire, devant une commission départementale de conciliation (il est conseillé en cas de litige d’envoyer une lettre recommandée préalable détaillant les difficultés rencontrées).
Si la conciliation n'aboutit pas ou si vous ne souhaitez pas passer devant la commission (dont la compétence est facultative), il convient alors de saisir le tribunal d'instance du lieu dont dépend le logement qui rendra un jugement.
Retrouvez d'autres décryptages de l'actualité juridique sur le blog de Thierry Vallat.
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