L’Empire du Bien contre-attaque
TRIBUNE — Après deux années d'intoxication par la propagande anticovid, nous voilà à présent sommés d'adhérer à la propagande binaire anti-Poutine pro-Ukraine. Tout le monde s'y est mis du jour au lendemain, individus, associations, institutions, organismes, services publics, partis politiques, médias, même l'opérateur des télécoms belges Proximus s'est récemment fendu d'un nouveau logo défilant "Stop invasion", comprenez que la guerre c'est mal et que la paix c'est bien, l'Empire du Bien cher à Philippe Muray n'a jamais aussi bien porté son nom. Hier c'était au nom de la santé, aujourd'hui c'est au nom d'une morale convenue à deux balles.
Or, il n'aura échappé à aucun esprit avisé que rien n'est binaire et simple dans cette affaire russo-ukrainienne exactement comme rien ne le fut jamais non plus dans cette autre affaire plus politique que sanitaire qui nous a pourri la vie pendant deux années de contraintes existentielles les unes plus ineptes et plus délétères que les autres.
Exit la psychose collective pandémique, bonjour l'hystérie collective suivante, j'ai nommé la russophobie à laquelle nous sommes tous conviés d'adhérer sous peine du même rejet et des mêmes condamnations sociales : bannissement des auteurs et personnalités russes et appel à l'assassinat décomplexé de Poutine.
Voir aussi : Ukraine-Russie : "résister à l'hystérie ambiante", l'analyse de Teresita Dussart
Rien de tel que la désignation d'un ennemi commun pour ressouder les peuples avachis.
De même qu'il était interdit de penser autrement le Covide, il est à présent interdit de penser autrement cette guerre qui ressemble beaucoup à l'autre drôle de guerre par bien des aspects.
Quant au président Zelenski, déjà promu au rang de héros planétaire par les médias de masse, le voilà qui trépigne d'impatience en râlant comme un enfant qui n'aurait pas reçu ses jouets promis par le père Noël, ses avions de combat ne sont pas encore arrivés, fustigeant l'OTAN qui rechigne, à juste titre, à établir une no flight zone.
Mais qu'importe le flacon, pourvu que Zelenski ait l'ivresse d'étendre ce conflit en grande guerre mondiale dans le monde, après moi les mouches, l'Ukraine vaut bien une apocalypse nucléaire, quelle autre cause serait-elle plus importante que la sienne, on se le demande puisqu'une majorité de nos semblables ont déjà emboîté le pas de la solidarité en bêlant exactement de la même manière qu'ils l'ont fait avec le régime sanitaire, accordant un statut spécial à ces réfugiés qui méritent plus d'attention et de considération que tous les autres (indigents indigènes compris).
La guerre contemporaine est à géométrie politique et idéologique variable, celle du Kosovo était parfaitement illégale, mais légitime pour les puissances atlantistes, celle de l'affreux Poutine représente le mal absolu autour duquel il est urgent de se réunir, et tous les éléments historiques avérés qui pourraient éclairer la généalogie de ce conflit sont systématiquement frappés par la censure du camp du Bien, à l'instar des éléments éclairant sur la nature de la pandémie : coup d'État de 2014 et participation officielle des groupes néonazis, corruption systémique du pouvoir, implication de la CIA et de l'UE, menace d'adhésion à l'OTAN, milliers de morts à l'Est, interdiction de la langue russe, acharnement et discrimination des minorités russophones.
Côtés média, les médecins de plateaux de la scène du Covide ont été remplacés par une kyrielle de généraux à la retraite et en charentaises, ainsi que par des journalistes reporters de guerre, des géopolitologues et même des psychiatres de salon se risquant à de douteux psychodiagnostics à distance (c'est l'air du temps, le zeitgeist) sur la structure de personnalité de Vladimir Poutine.
Notre époque est résolument celle du degré zéro de la pensée, un degré intellectuel qui ne tolère aucune contradiction, aucune remise en question et promouvant une doxa binaire et unique structurée entre un Bien et un Mal décrétés universels et indiscutables.
Vous avez cru que la pandémie était terminée et que la paix universelle allait enfin régner ? Et que cette fin de l'histoire tant attendue était enfin advenue ?
Erreur, le tragique repointe son nez et même les compteurs épidémiologiques recommencent à s'affoler en France comme en Belgique, remplaçant déjà la une des infos sur certains médias (RTBF)
Bientôt la prochaine vague rejoindra celle de cette guerre dont l'extension économique produira encore plus de misère sociale et émotionnelle.
La jonction entre les deux axes du Great Reset (épidémie et guerre) se prépare à l'ombre de la propagande de masse et de la fabrique de l'opinion et du consentement.
L'ère des sacrifices ne fait que commencer.
La boîte de Pandore est ouverte, nous sommes tous des Iphigénie.
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