Nuremberg : Le « procès des médecins »

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Catherine Avice pour France-Soir
Publié le 24 septembre 2024 - 15:00
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Nuremberg partie 2
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AFP
La salle d'audience du procès de Nuremberg, en novembre 1945
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TRIBUNE - Nuremberg et ses procès, suite de la partie 1

La crise « covid » de ces quatre dernières années a ravivé chez beaucoup de gens sinon le souvenir des atrocités commises par les médecins nazis sur des populations civiles et militaires, du moins les conséquences dans les conventions internationales des procès afférents à ces atrocités. Cela laisse à penser que les sentences, à l’issue de ces procès, furent suffisamment lourdes et dissuasives pour que plus jamais, pareilles atrocités ne se reproduisent. Il n’en fut rien ; il ressort du travail de Philippe Valode que les verdicts, à l’issue de ce « procès des médecins » furent « très discutables et largement cléments ». 1 

Une première raison est à chercher dans l’un des quatre chefs d’accusation qui « globalise les crimes contre l’humanité, les crimes de guerre, les expériences médicales contre des êtres humains (civils et membres de forces armées en guerre avec le Reich), les meurtres de civils et de membres des forces armées adverses, le programme global d’euthanasie du Reich » et des critères retenus pour qualifier ces crimes. Or, pour qualifier les expériences médicales sur des êtres humains de crimes contre l’humanité, les juges américains exigèrent un cumul absolument ubuesque ! « Cumul du non-consentement du cobaye humain, d’une utilité non démontrée pour le bien de la société, de la non-réalisation préalable de tests sur les animaux, du constat de souffrance et de blessure des victimes, mais aussi, de l’évidence que l’expérience présente un risque de mort, d’une disproportion entre le risque et l’espérance de bénéfices, de la non-protection du cobaye humain, de l’absence de spécialistes réputés du traitement de l’affection concernée, de l’assurance que la victime humaine n’a pas pu faire cesser l’expérience, enfin de l’interdiction imposée au médecin expérimentateur d’interrompre son action. » Il était évident qu’avec des conditions aussi draconiennes, nombre des médecins accusés échapperaient à la peine capitale, voire seraient purement et simplement acquittés ! Et ce fut le cas, d’autant plus que les juges américains établirent une jurisprudence « qui retient avant tout la responsabilité des chefs dans les actions criminelles de leurs subordonnés, sans toutefois exonérer complètement leurs subordonnés ». 

Ainsi, sur les 23 accusés de ce procès, parmi lesquels 20 médecins, 7 seulement furent condamnés à mort par pendaison et 7 furent acquittés.  

Cinq furent condamnés à la prison à perpétuité, les quatre derniers écopèrent de peines de prison de 10, 15, ou 20 ans. Aucun de ces condamnés ne purgea intégralement sa peine. 

Or, le « Code de Nuremberg », qui liste les conditions dans lesquelles une expérimentation menée sur un être humain peut être considérée comme éthiquement acceptable, est directement issu de ce procès. On comprend dès lors, à la lecture des critères ubuesques retenus, pourquoi ce « Code » eut en réalité peu d’impact sur les expérimentations menées ultérieurement sur des êtres humains. Il fallut attendre la Déclaration d’Helsinki en 1964 pour que soient précisés les principes fondamentaux applicables à toute forme de recherche médicale, puis la Convention d’Oviedo en 1997, qui, en posant les principes fondamentaux relatifs à la pratique de la médecine quotidienne (entre autres) garantit à tout être humain un consentement libre et éclairé face à tout acte médical quel qu’il soit. On a vu ce qu’il est advenu du respect de cette Convention par une partie du monde médical en 2021 et 2022, quand des soignants se sont vantés d’avoir vacciné contre le covid des personnes en larmes, qui chargées de famille, se voyaient contraintes, pour garder leur travail, d’en passer par une injection dont elles ne voulaient pas. 

Mais le pire fut le recrutement par l’armée américaine de certains médecins criminels spécialisés dans des domaines scientifiques où ces épouvantables expériences sur des cobayes humains avaient doté l’Allemagne d’un savoir-faire certain. Trois des médecins acquittés à l’issue du procès rejoignirent immédiatement les équipes qui travaillaient sur le programme de médecine spatiale et y furent très vite rejoints par Hermann Becker-Freysen ; ce capitaine de la Luftwaffe et chef du département de la médecine aérienne, impliqué dans les expériences de congélation, d’absorption d’eau de mer, les expérimentations avec les sulfanilamides et sur les épidémies de typhus, toutes plus atroces les unes que les autres, avait pourtant écopé de 15 ans d’emprisonnement. 

A suivre : le procès des juges et des juristes ; le procès du haut commandement militaire 

 

1 « Les 12 procès oubliés de Nuremberg » Philippe Valode, éditions du Rocher, 2023, page 60 

 

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