Caméras dans les abattoirs : la proposition au centre des débats à l'Assemblée nationale
Le "respect de l'animal en abattoir" s'invite ce jeudi 12 à l'Assemblée, mais, au grand dam de certaines associations, les députés ne devraient pas aller au-delà d'une simple expérimentation de caméras de surveillance. Animaux mal étourdis, accrochés vivants... Les images chocs diffusées début 2016 par l'association L214 ont suscité beaucoup d'émotion et entraîné un plan gouvernemental en faveur du bien-être animal. Et les députés ont mis cette question au coeur d'une commission d'enquête, dont découle la proposition de loi au programme des débats en fin de journée.
Après un premier round en commission en décembre, où les socialistes notamment s'étaient opposés à son article clé sur l'installation obligatoire de caméras dans les abattoirs, le texte du député divers gauche Olivier Falorni arrive en première lecture dans une journée de "niche" réservée à des textes de son groupe à dominante PRG. Et cet ex-président de la commission d'enquête, laquelle a préconisé 65 mesures, ne "comprendrai(t) pas" que le contrôle vidéo obligatoire soit encore rejeté par la majorité. D'autant que 85% des Français sont favorables à cette sorte de vidéosurveillance dans les abattoirs, selon un sondage d'octobre.
Le dispositif proposé est "équilibré" et "efficace", a plaidé dans la matinée l'élu de Charente-Maritime, pour lequel "le risque de flicage des salariés ne tient pas". Le député a, cette fois, retiré la direction de l'établissement des acteurs ayant accès aux images, au profit des responsables de protection animale désignés dans les établissements ainsi que des services de l'Etat de contrôle vétérinaire. Mais le groupe socialiste va dégainer son propre amendement, moins ambitieux, qui prévoit une expérimentation d'un an, à partir du 1er juillet, de caméras dans les lieux d'acheminement, d'étourdissement et de mise à mort des animaux.
"Nous ne sommes pas fermés mais il faut voir ce qu'apporte vraiment le contrôle vidéo, qui est extrêmement coûteux", a plaidé auprès de l'AFP l'oratrice PS, Karine Daniel, appelant à "remettre de la sérénité" sur cette question et à ne pas "jeter du discrédit sur toute une filière qui a fait beaucoup d'efforts". Le ministre de l'Agriculture Stéphane Le Foll, qui sera au banc du gouvernement, s'était dit favorable il y a quelques mois aux caméras de surveillance dans les abattoirs, mais "dans le respect des salariés".
Les députés LR et UDI sont opposés à une telle obligation à ce stade, comme certains écologistes et les élus Front de gauche, qui refusent pour les employés "une forme de contrôle automatique continuel, qui ne favorisera pas forcément la qualité de leur travail". Les parlementaires sont néanmoins sous pression, après avoir reçu chacun des centaines de mails ces derniers jours leur demandant d'aider à "réduire la souffrance des animaux", selon plusieurs sources parlementaires. Dans un courrier commun aux députés, dix ONG de protection animale, dont les fondations 30 millions d'amis et Brigitte Bardot, le CIWF et L214, les ont appelés à soutenir le contrôle vidéo obligatoire afin que la proposition de loi ne soit pas vidée de "toute substance". "Nous ne manquerons pas de faire connaître largement (...) votre vote" aux électeurs, menacent-elles en cette année riche en scrutins.
De l'autre côté, l'interprofession française des abatteurs et découpeurs industriels, Culture viande (70 adhérents, 35.000 salariés), objecte que "la protection animale à l'abattoir n'est pas une affaire de caméras", mais "avant tout une question d'hommes, de formation et de bon sens". La proposition de loi prévoit également la création d'un comité national d'éthique des abattoirs et d'un comité local de suivi auprès de chaque abattoir. Pour les abattoirs de boucherie de plus de 50 salariés, la présence permanente d'un agent des services vétérinaires aux postes d'étourdissement et de mise à mort, prévue par le texte, ne survivra peut-être pas à l'hémicycle.
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