Le glyphosate interdit en France pour tous les usages d'ici la fin du quinquennat (Castaner)
La France a confirmé lundi son intention de réduire progressivement l'utilisation agricole de l'herbicide controversé glyphosate, le plus vendu au monde, mais peine à énoncer clairement une stratégie de remplacement et une date butoir.
Sans donner de calendrier précis, le Premier ministre Édouard Philippe croyait sans doute pacifier la tension entre agriculteurs et associations de défense de l'environnement et de la santé publique: il a demandé lundi aux deux ministères concernés - et antagonistes - de lui présenter "d'ici la fin de l'année" un rapport sur "les conditions d'un plan de sortie" de ce produit.
"Compte tenu de l’état de la recherche et des alternatives disponibles pour les agriculteurs" ajoutait le communiqué de Matignon.
Le porte-parole du gouvernement, Christophe Castaner, est allé plus loin en affirmant sur BFMTV et RMC que le produit, "ainsi que tous ceux qui lui ressemblent et qui menacent la santé des Français", serait interdit en France "d'ici la fin du quinquennat", soit 2022.
Avant de minimiser ses propos en milieu de journée, en indiquant à l'AFP que le gouvernement "s'engageait à des progrès significatifs" d'ici 2022, pour tous les pesticides dont le glyphosate, en précisant qu'il "n'y a pas d'autre date arrêtée par le Premier ministre".
"L'objectif est qu'on puisse trouver des produits de substitution d'ici la fin du quinquennat" a ajouté M. Castaner, sans donner de date-butoir pour un retrait.
Entre ces deux déclarations du porte-parole du gouvernement, la FNSEA, principal syndicat agricole, avait vivement réagi en affirmant qu'il était "hors de question" que la France prenne une position "unilatérale", différente de ses partenaires européens.
Les experts de chaque pays doivent se réunir début octobre à Bruxelles, sachant que l'autorisation de cette substance expire fin 2017. Cependant, pour l'heure, aucun vote européen n'est programmé, selon la Commission.
La Commission a proposé aux Etats de renouveler pour 10 ans la licence d'exploitation du glyphosate. Fin août, le ministère de la Transition écologique avait annoncé que la France s'y opposerait, comme elle l'avait fait en 2016.
L'exécutif européen a plusieurs fois insisté pour que la décision revienne aux Etats membres, représentés au sein d'un comité d'experts.
En l'absence d'une majorité qualifiée en faveur du renouvellement, la licence du glyphosate serait révoquée dans toute l'UE, laissant un temps limité (douze mois) pour mettre progressivement un terme à l'utilisation de produits qui en contiennent.
- "Distorsion de concurrence" -
L'ONG Générations futures, déplorant la "cacophonie au gouvernement" sur la position française sur le glyphosate, a réclamé "un éclaircissement rapide".
"Quelle est la position du gouvernement sur un renouvellement du glyphosate pour 10 ans? On ne sait plus", a aussi questionné la députée européenne écologiste Michèle Rivasi.
En France, l'utilisation du glyphosate par les collectivités dans les espaces ouverts au public est interdite depuis le 1er janvier 2017 et son emploi par les particuliers doit être proscrit à partir de 2019.
Classé "cancérogène probable" en 2015 par le Centre international de recherche sur le cancer (OMS) et non cancérogène par deux agences européennes, le glyphosate est très utilisé comme herbicide par les agriculteurs.
Des membres de la FNSEA avaient manifesté vendredi à Paris pour s'opposer à un éventuel abandon unilatéral par la France.
Lundi, Christiane Lambert, présidente de la FNSEA, a relevé auprès du ministre de la Transition écologique Nicolas Hulot d'autres "incohérences" gouvernementales : "La même semaine, on parle interdiction du glyphosate en France, mais on laisse venir, via le CETA (accord de libre échange commercial entre l'UE et le Canada, NDR), des produits d'autres pays, avec 43 substances non autorisées en France".
Le ministre de l'Agriculture Stéphane Travert avait évoqué vendredi une période de transition possible "de cinq à sept ans", précisément pour laisser le temps de mettre en place des mesures alternatives.
Nicolas Hulot a pour sa part placé les agriculteurs français face au temps long: "La justice et l'histoire nous rattraperont" si rien n'est fait pour remédier au problème phytosanitaire, a-t-il dit samedi.
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