Loi travail, une réforme contestée à l'avenir incertain

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Par AFP
Publié le 17 février 2017 - 10:24
Mis à jour le 18 février 2017 - 14:49
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Manifestation contre la loi travail, le 29 juin 2016 à Bordeaux
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© Mehdi FEDOUACH / AFP/Archives
Manifestation contre la loi travail, le 29 juin 2016 à Bordeaux
© Mehdi FEDOUACH / AFP/Archives

Le 17 février 2016, Myriam El Khomri dévoile les grandes lignes de la loi travail, qui déclenchera un conflit social inédit sous un gouvernement de gauche. Un an après, cette dernière réforme sociale du quinquennat Hollande divise toujours et son sort post-élection présidentielle paraît incertain

- "L'Etat s'attaque aux 35 heures" -

Matin du 17 février 2016. Le Parisien accorde une double page au "projet de loi El Khomri", avec un titre alarmiste: "L'Etat s'attaque aux 35 heures".

Le quotidien explique qu'il permettra aux entreprises de "négocier à la carte le temps de travail".

Soir du 17 février 2016. Les Echos diffusent une interview de la ministre du Travail défendant "sa" loi.

"Nous voulons améliorer la compétitivité des entreprises, développer et préserver l'emploi, réduire la précarité du travail et améliorer les droits des salariés", explique Myriam El Khomri, alors que la France connaît un chômage record et que François Hollande a conditionné sa candidature à la présidentielle à l'"inversion de la courbe".

Et comme si elle anticipait la future fronde, la ministre n'exclut pas un recours à l'article 49-3, permettant de faire passer un texte au Parlement sans vote.

S'ensuivent des mois de manifestations, émaillées de violences, pour dénoncer une réforme "ultralibérale", des grèves, l'émergence de "Nuit debout", plusieurs réécritures du projet.

Le gouvernement frôle à deux reprises la motion de censure déposée par des "frondeurs" de gauche mais le texte, qui finalement ne touche pas à la durée légale hebdomadaire de 35 heures, passe... grâce au 49-3 et avec l'appui d'un allié indéfectible, la CFDT.

- "Porte ouverte au dumping" -

Un an après, la quasi-totalité des décrets est publiée (97%).

Toutefois, le sort de la loi est suspendu à l'élection présidentielle, de nombreux candidats promettant sa suppression, quand d'autres veulent pousser plus loin la flexibilité pour l'employeur.

L'abrogation est au programme des candidats de gauche Benoît Hamon, Yannick Jadot et Jean-Luc Mélenchon.

Leur objectif: rétablir la "hiérarchie des normes", qui impose que la loi prime sur la convention de branche, qui elle doit primer sur l'accord d'entreprise. Or la loi travail permet à un accord d'entreprise de primer sur la branche en matière de temps de travail, un casus belli pour ces candidats.

C'est "une porte ouverte au dumping" et à la "régression de tous les droits des salariés", estime Jean-Luc Mélenchon. Pour le candidat de "La France insoumise", l'accord d'entreprise "ne doit primer que s'il est favorable aux salariés".

Benoît Hamon s'insurge contre d'autres mesures, comme la réduction de la rémunération des heures supplémentaires.

L'élu du PS veut toutefois conserver certains "acquis" comme le droit à la déconnexion ou le compte personnel d'activité, tout comme Yannick Jadot, qui programme une autre loi, fondée "sur la protection des salariés".

Comme Benoît Hamon, le candidat écologiste milite pour une réduction du temps de travail hebdomadaire à 32 heures.

Sur un tout autre bord politique, Marine Le Pen promet aussi le détricotage de ce texte, qui "ne créera pas un seul emploi et affectera négativement les travailleurs français et les petites entreprises".

Pas question pour la présidente du Front national de toucher aux 35 heures. Et toute discussion sur un éventuel allongement du temps de travail sera cantonnée à la branche.

- "Poursuivre la réforme" -

François Fillon et Emmanuel Macron se distinguent au milieu de cette salve de critiques par des propositions poursuivant la logique de la loi, comme donner une plus grande place à l'accord d'entreprise.

Il y a un an, alors qu'il était ministre de l'Economie, Emmanuel Macron avait inspiré les articles les plus clivants de la loi: la clarification des motifs de licenciements économiques et le plafonnement des dommages et intérêts accordés pour licenciement abusif par les prud'hommes. Ils ont été sérieusement amendés par le gouvernement Valls pour calmer la grogne sociale et une partie de la gauche.

L'ancien locataire de Bercy prévoit donc de "poursuivre" la réforme prud'homale. Et s'il veut conserver la durée légale à 35 heures, il renvoie à l'accord de branche ou d'entreprise "la possibilité d'autres équilibres".

Plus généralement, le candidat d'"En marche!" propose que la loi définisse "un socle" du droit du travail, mais sa mise en oeuvre sera également renvoyée aux branches ou à l'entreprise.

François Fillon veut tout simplement mettre fin aux 35 heures. Il mise aussi sur une refondation du code du travail autour de normes sociales "fondamentales". Le "reste des dispositions" sera renvoyé à la négociation en entreprise.

Au final, "cette loi, personne n'en veut!", analyse Emmanuel Dockès, professeur de droit, détracteur du texte.

Mais, dit-il, "ce n'est ni la première ni la dernière d'un processus en cours depuis une trentaine d'années qui a entraîné l'effritement progressif d'un certain nombre de protections des droits du travail".

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