Canada : Liquidation de la branche locale de TikTok en raison de “risques précis sur la sécurité nationale”
Toujours inquiète par une éventuelle ingérence pékinoise, Ottawa poursuit ses mesures contre les applications chinoises. Près de deux ans après avoir interdit WeChat et TikTok aux membres du gouvernement et à ses fonctionnaires, le Canada a ordonné mercredi dernier la liquidation de la branche locale de ByteDance. La procédure est justifiée par “des risques précis pour la sécurité nationale”. L’accès à TikTok n’est toutefois pas interdit aux citoyens dans le pays.
Les soupçons canadiens d’ingérence chinoise sont apparus publiquement lors des élections de 2019, mais les premières mesures prises par le gouvernement Trudeau datent essentiellement de février 2023. Ce mois-là, Ottawa interdisait TikTok à ses fonctionnaires. Fin octobre de la même année, les applications WeChat et Kaspersky sont à leur tour interdites, en raison de “risques clairs” de ces applications.
“Des risques précis pour la sécurité nationale”
L’interdiction de TikTok faisait suite au lancement d'une enquête sur l'entreprise par les commissaires fédéraux et provinciaux à la protection de la vie privée. Les conclusions faisaient état d’un “niveau de risque inacceptable” pour la vie privée et la sécurité”. La décision se justifiait aussi par la nécessité que “les réseaux et données du gouvernement du Canada demeurent sécurisés et protégés”. Pendant ce temps, les enquêtes du renseignement canadiens se montraient affirmatives quant à une ingérence effective chinoise, que le Premier ministre, Justin Trudeau, a tempéré, estimant que la Chine ne constituait pas une menace et que ses activités au Canada “n’étaient que des activités diplomatiques normales”.
Pékin avait d’ailleurs “fermement” dénoncé en mars 2023 les allégations d’ingérence, les qualifiant de “diffamatoires”, malgré les annonces d’Ottawa à propos de campagnes de propagande en ligne ciblant des élus et des membres du gouvernement.
Ce sont ces mêmes risques que le Canada a évoqués pour justifier une nouvelle mesure : la dissolution de la branche canadienne de TikTok, mercredi 06 novembre. Ottawa a évoqué “des risques précis pour la sécurité nationale”, posés “par les activités de ByteDance Ltd. (maison-mère, NDLR) au Canada”. Cela signifie que TikTok doit fermer ses bureaux à Toronto et Vancouver.
Cette liquidation intervient suite à un audit lancé en septembre 2023 et n’entraîne pas l’interdiction ou le blocage de l’accès des utilisateurs canadiens à l'application. “Cette décision a été prise en fonction des informations et des données probantes recueillies dans le cadre de l'examen ainsi que des conseils formulés par les organismes canadiens de la sécurité nationale et de renseignement et d'autres partenaires gouvernementaux”, a expliqué le ministre canadien de l'Innovation, François-Philippe Champagne, dans un communiqué.
Il a aussi précisé que le gouvernement “n'interdira ni l'accès de la population canadienne à l'application TikTok, ni ne l'empêchera de créer du contenu”. Il a toutefois exprimé une mise en garde quant à l'utilisation de renseignements personnels “par des acteurs étrangers”.
TikTok ciblée par plusieurs pays
La société chinoise a déjà fait part de son intention de contester la décision devant les tribunaux. L’application est dans le collimateur de plusieurs autorités, aussi bien américaines qu’européennes. Washington accuse TikTok de permettre au gouvernement chinois, à travers les courtes vidéos, d’espionner et de manipuler les citoyens américains. En avril dernier, le Congrès américain a voté une loi qui exige la vente de l’application par ses propriétaires chinois, sous peine d’interdiction aux États-Unis.
En Europe, l’application s’est vue infligée de nombreuses amendes pour la mauvaise gestion des données des utilisateurs, notamment celles des mineurs. De récents documents internes ont révélé que TikTok était pleinement conscient des effets dévastateurs de son algorithme sur la santé mentale des jeunes. Pour autant, l’entreprise a préféré minimiser les mesures de prévention, craignant une baisse d’audience.
En France, sept familles réunies en collectif ont décidé d’assigner Tiktok la semaine passée devant la justice. Elles accusent le réseau social d’avoir exposé leurs enfants à des contenus dangereux et nui à leur santé mentale. La société chinoise pourrait être condamnée à verser de l’argent aux familles des victimes, au titre de préjudice ou de réparation.
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