Convoi de la liberté au Canada : quand des ministres du gouvernement Trudeau proposaient le recours... à des chars
L'état d'urgence décrété par le gouvernement Trudeau le 14 février 2022 pour mettre fin aux “convois de la liberté” fait l’objet, depuis avril 2022, d’une enquête de la part de la Commission sur l’état d’urgence. Des audiences publiques ont débuté à la mi-octobre et l’enquête a révélé que des ministres du Parti libéral canadien ont évoqué la possibilité de recourir à... des machines de guerre pour dissiper les manifestants pacifiques qui s’étaient rassemblés à Ottawa.
La Commission sur l’état d’urgence a été installée le 25 avril dernier, à peine deux mois après l’instauration, par le gouvernement Trudeau, de l’état d’urgence. La commission, dont les audiences publiques ont débuté il y a plus d’un mois, doit déterminer si le recours à ces mesures exceptionnelles contre le “convoi de la liberté” mené par des camionneurs, était justifié.
Pour les besoins de l’enquête, le gouvernement a partiellement levé la confidentialité sur un ensemble d’informations, dont des conversations entre les hauts dirigeants. Celles-ci ont révélé, rapporte Politico, que des discussions entre des ministres canadiens portaient sur le recours à des chars pour disperser les manifestants pacifiques.
“Une blague entre amis”
Mercredi dernier, c’était au tour de certains ministres d’être interrogés, comme le ministre de la Justice, David Lametti. Il a écrit au ministre de la Sécurité publique, Marco Mendicino, le 2 février : “Vous devez faire bouger la police et les [forces armées canadiennes] si nécessaire. Trop de gens sont gravement touchés par ce qui une occupation”.
Lors de la même conversation, le ministre de la Sécurité publique, Marco Mendicino, interroge son collègue : "Combien de chars demandez-vous. Je veux juste demander à [la ministre de la Défense] Anita [Anand] combien nous en avons sous la main ?". Ce à quoi David Lametti a répondu : "Je pense qu'un [tank] fera l'affaire !"
Lors de son audition, David Lametti a affirmé que cet échange était “une blague entre amis”. Il a déclaré que la police avait "toute l'autorité légale dont elle avait besoin pour faire respecter la loi", mais cela n’a pas été fait. Il a qualifié le chef de la police, Peter Sloly, “d’incompétent”.
Vendredi dernier, Justin Trudeau a partagé le même constat, affirmant que la police locale “n'a pas démontré sa capacité à garder sous contrôle les manifestations".
Lorsqu'il a déclaré la loi martiale en février 2022, il a tout de même souligné que son gouvernement "n'utilisait pas l'état d'urgence pour faire appel à l'armée". Vendredi, interrogé par la même commission, il a justifié certaines mesures face “à une menace de violence suffisante” comme la confiscation de fonds de manifestants, le gel de comptes bancaires, la remarque de véhicules ou encore l’interpellation.
Un rapport interne du ministère de la Sécurité publique a toutefois démontré qu’aucune preuve de violence justifiait ces réactions, et que "la majorité des événements ont été pacifiques".
“Aucune autre alternative”
Quant à la décision de son gouvernement d’instaurer un état d’urgence, le Premier ministre canadien a affirmé “ne pas avoir eu le choix”, estimant que les manifestants exprimaient un "certain niveau de frustration très préoccupant". Il évoque des cas de harcèlement, de la part des manifestants, à l’égard des gens qui portaient des masques. “Je suis totalement confiant d’avoir pris la bonne décision”, a-t-il déclaré.
Son ministre de la Justice a cité “de nombreux facteurs”, comme “des situations volatiles et potentiellement violentes” ou encore “la non-application de la législation en vigueur par les gouvernements provinciaux".
Le gouvernement Trudeau a également justifié l’état d’urgence par “le risque que la cohésion sociale, l'unité nationale et… la réputation internationale du Canada” pourraient subir “des préjudices irrémédiables”.
L’instauration de cet état d’urgence a suscité de violentes réactions à travers le monde. L'eurodéputé roumain Cristian Terhes qualifiait Trudeau de “tyran”, le comparant au dictateur Ceausescu. L'eurodéputé croate Mislav Kolakusic a fait remarquer que “le Canada, autrefois symbole du monde moderne, est devenu un symbole des violations des droits civils (...) Nous avons vu comment vous piétinez des femmes avec des chevaux, comment vous bloquez les comptes bancaires des parents isolés afin qu'ils ne puissent même pas payer l'éducation et les médicaments de leurs enfants, qu'ils ne puissent pas payer les charges...", a-t-il déclaré. Le 16 février, au cours d’un échange enflammé à la Chambre des communes du Canada, le Premier ministre, Justin Trudeau, avait comparé les manifestants du Convoi de la liberté à des nazis, accusant les conservateurs au Parlement d’entretenir des sympathies avec des "gens qui agitent des croix gammées". Le 17 février, sur Twitter, Elon Musk, qui avait apporté son soutien au Convoi de la liberté canadien, avait répliqué en comparant Justin Trudeau à Adolf Hitler.
Le ministre de la Sécurité publique, Marco Mendicino sera le prochain à comparaître aux audiences publiques de la commission.
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