Géorgie : Le Parlement adopte une loi controversée sur l’influence étrangère, l’UE appelle le gouvernement à abandonner le texte

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France-Soir
Publié le 18 avril 2024 - 10:39
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Le 15 avril 2024, des membres du Parlement de géorgie se battent lors d'une séance plénière à Tbilissi. Une bagarre entre députés a éclaté au Parlement, qui débat de la réintroduction du projet de loi controversé sur les "agents étrangers", à l'origine de
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Bagarre générale dans l’hémicycle entre députés, manifestations devant le Parlement de Tbilissi ... La loi géorgienne obligeant les organisations financées en partie de l’étranger à s’enregistrer comme “poursuivant des intérêts étrangers” n’est pas passée comme une lettre à la poste, malgré un vote favorable largement majoritaire en raison du boycott de l’opposition. Le texte, dit “loi russe” en référence à une mesure similaire en vigueur en Russie, est très controversé et avait déjà été abandonné en mars 2023 après de nombreuses protestations. L’Union européenne (UE), à laquelle la Géorgie souhaite adhérer, a critiqué l’adoption de la loi, jugée liberticide par ses détracteurs. 

Proposée l’année dernière puis retirée en raison de fortes protestations, la proposition de loi a de nouveau été déposée par le parti au pouvoir, Rêve géorgien. Lors de la réouverture du débat au Parlement lundi dernier, une bagarre générale entre les députés a éclaté lorsqu’un opposant a asséné un coup de poing au co-rédacteur du texte. A l’extérieur de l’hémicycle, environ 10 000 manifestants s’étaient rassemblés pour rejeter ce qu’il considère être une “loi russe”, tout en brandissant des drapeaux de l'UE.  

La Géorgie en quête de “transparence” 

La mesure prévoit d’obliger les organisations, dont les médias, financées à plus de 20% par des fonds étrangers comme étant “des organisations poursuivant les intérêts d’une puissance étrangère”. La référence à Moscou provient d’un texte similaire, en vigueur depuis 2014 en Russie, accusée de l’appliquer pour “museler l’opposition”.  

Contestation ou pas, avec ou sans bagarre générale, le texte a été adopté en première lecture ce mercredi 17 avril 2024. Le vote, boycotté par l’opposition, a récolté 83 voix favorables mais aucune voix contre. Deux autres lectures doivent encore suivre. 

Face à la controverse, le gouvernement géorgien justifie cette loi par une volonté de faire “un effort pour apporter davantage de transparence dans le financement des organisations” du pays. Le leader du parti au pouvoir, Mamuka Mdinaradze, explique que "l'objectif est la transparence et de limiter autant que possible les phénomènes suivants : polarisation, radicalisation, agression, extrémisme religieux, affaiblissement des institutions de l'État, financement d'un mode de vie non-traditionnel et financement des objectifs révolutionnaires radicaux des partis". 

Le texte ne suscite même pas l’unanimité au sommet du pouvoir puisque la présidente de la Géorgie, Salome Zourabichvili, dont le rôle est principalement honorifique, estime que la loi est “contraire à la volonté de la population”. “Il s’agit d’une provocation directe, d’une stratégie russe de déstabilisation”, poursuit la pro-européenne, en conflit avec le gouvernement. "Qui a décidé que cette loi devait être réintroduite ? Est-ce en Géorgie ou au-delà de nos frontières ? Est-ce à Moscou que cette décision a été prise ? C'est la principale question sur la transparence que la population géorgienne se pose”, s’interroge encore Zourabichvili.  

L’UE avertit Tbilissi  

Par “volonté de la population”, elle se réfère aux nouvelles manifestations qui ont lieu après celles de mars 2023, pendant lesquelles des milliers de Géorgiens scandaient “non à la loi russe”. De leur avis, celle-ci est non seulement liberticide mais pourrait aussi compromettre les efforts de Tbilissi de rejoindre l’Union européenne.  

La Géorgie s’est vu accorder en décembre dernier le statut officiel de candidat à l’adhésion, conditionnée par des réformes judiciaires et électorales, ainsi que par le renforcement de la liberté de la presse et la réduction du pouvoir des oligarques. Irakli Kobakhidzé, Premier ministre géorgien, rejette les accusations de sabotage de ce processus. Le parti Rêve géorgien soutient officiellement l'adhésion à l'UE, à l’OTAN et condamne l'invasion de l'Ukraine mais sa position vis-à-vis de la Russie, qu’il souhaite "pragmatique", fait grincer des dents.  

Pour le président du Conseil européen, Charles Michel, la loi "éloignera la Géorgie de l'Union européenne au lieu de l'en rapprocher”. L’UE a ouvertement demandé au gouvernement géorgien d’abandonner le texte.  

"Il s'agit d'une évolution très préoccupante et l'adoption finale de cette législation aurait un impact négatif sur les progrès de la Géorgie sur la voie de l'UE. Cette loi n'est pas conforme aux normes et valeurs fondamentales de l'UE", ont déclaré Josep Borrell, chef de la diplomatie européenne, et Oliver Várhelyi, commissaire européen chargé du voisinage et de l'élargissement. 

Ils estiment que classification des organisations financées à plus de 20% par des fonds étrangers comme étant “poursuivant des intérêts étrangers” limiterait “la capacité de la société civile et des organisations médiatiques à fonctionner librement”, alors que Tbilissi “dispose d’une société civile dynamique”.  

Le texte, poursuivent-ils encore, “pourrait restreindre la liberté d'expression et stigmatiser injustement les organisations qui apportent des avantages aux citoyens de Géorgie". 

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