Le chef de l'OTAN veut permettre à Kiev d'utiliser les armes occidentales sur le territoire russe, une “provocation” pour Moscou
Vers une autre escalade de la guerre en Ukraine ? Les “restrictions” imposées à Kiev par les fournisseurs d’armes occidentaux à ne pas lancer des attaques sur le territoire russe pourraient prochainement être levées. Le Secrétaire général de l’OTAN, Jens Stoltenberg, estime que “le moment est venu pour les alliés de l’Ukraine de réfléchir à la question de savoir” s’ils doivent autoriser de telles opérations avec du matériel fourni par eux-mêmes. La Russie, qui a annoncé début mai des exercices militaires nucléaires près de l’Ukraine, dénonce une “provocation” et avertit depuis le début du conflit son intention de frapper les cibles de l’alliance transatlantique si jamais ses missiles de longues portées atteignaient son territoire.
La confrontation directe entre l’OTAN et la Russie se dessine peu à peu. “L’hystérie militaire” que favorisent, selon le Kremlin, les pays occidentaux et leurs appels depuis des mois à se préparer à un conflit armé direct avec Moscou, laisse place à un revirement des promesses officielles. Après les déclarations du président Emmanuel Macron à propos de l’envoi de troupes au sol ou encore, plus récemment, l’appel de l’Estonie dans le même sens, l’alliance transatlantique envisage la possibilité de permettre à l’Ukraine d’utiliser les matériels qui lui ont été fournis pour cibler le territoire russe.
OTAN-Russie, un conflit inévitable ?
Dans une interview accordée à The Economist, diffusée vendredi 24 mai, le chef de l’OTAN, Jens Stoltenberg, exprime son accord avec les appels croissants au sein de l'alliance pour permettre à Kiev de cibler le territoire russe à l’aide de missiles ou toute autre arme occidentales. "Le moment est venu pour les alliés de réfléchir à la question de savoir s'ils doivent lever certaines des restrictions qu'ils ont imposées sur les armes données à l'Ukraine", estime-t-il.
“Nous devons nous rappeler ce que c'est : une guerre d'agression. L'Ukraine a le droit de se défendre, y compris attaquer des cibles sur le territoire russe”, poursuit-il. Stoltenberg ajoute que “certains alliés ont déjà levé cette restriction à l'Ukraine pour lui permettre de frapper des cibles militaires sur le sol Russe, et je pense qu'il est temps pour les membres de l'OTAN de faire de même"
Ce revirement s’explique, selon lui, par la situation sur le front, qui connaît une domination des troupes russes. Moscou mène une offensive d’envergure, avec des tirs d’artillerie accompagnés par des frappes aériennes. En outre, la Russie, vient de nommer un nouveau ministre de la Défense, et accélère la cadence dans la production d’obus d'artillerie, trois fois plus rapide que les alliés occidentaux de l'Ukraine et pour un coût trois fois moins cher, selon une analyse du consultant britannique Bain & Company.
“Ce dont nous sommes maintenant témoins, démontre que ces restrictions doivent être levées, considérant que les batailles se déroulent actuellement à la frontière, spécialement dans la région de Kharkiv”, justifie-t-il. De son côté, Kiev, qui a déjà mené de nombreuses attaques de drones contre la Russie, multiplie les appels pour recourir à des missiles à longue portée comme l’ATACMS américain.
“Irresponsable”, pour Moscou
L’Ukraine, dit Jens Stoltenberg “peut très difficilement se défendre” si on lui “refuse la possibilité d'utiliser ces armes contre des cibles militaires légitimes sur le territoire russe”.
Ces déclarations sont semblables à celles prononcées, quelques jours plus tôt, par Mike Johnson, président de la Chambre américaine des représentants. Le républicain ne juge pas la manière de faire de Washington. Mais “... pense que nous devons permettre à l'Ukraine de poursuivre la guerre comme elle l'entend”, explique-t-il, soulignant qu'”elle doit être capable de riposter”.
La Maison-Blanche, comme d'autres pays européens comme l'Allemagne, se montrent toujours aussi réticents à lever les restrictions. Le chef de la diplomatie américaine, Antony Blinken estimait lors d'un déplacement à Kiev le 15 mai, que cette décision revenait à l'Ukraine. “Nous n'avons pas à encourager ou favoriser les frappes hors d'Ukraine, mais au final c'est à l'Ukraine de prendre ses décisions sur la manière dont elle mène cette guerre”, a-t-il déclaré.
Le Kremlin avertit depuis son invasion de l’Ukraine les alliés de Kiev quant à un quelconque usage de leurs armes sur son sol. Peu avant l’interview du chef de l’OTAN, la Russie qualifiait déjà ces appels de tentative de “hausser le niveau d’escalade”. “A Washington et dans plusieurs capitales européennes, certains essayent avec zèle de provoquer, de hausser sans cesse le niveau d'escalade. À cet égard, on peut qualifier leur position d'irresponsable”, a souligné le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov.
Face au soutien financier et militaire occidental, la Russie a annoncé début mai la tenue prochaine d’exercices nucléaires près de l’Ukraine, en réponse, entre autres, aux “déclarations belliqueuses”, essentiellement celles “qui évoquent l’envoi des contingents armés en Ukraine, c’est-à-dire placer des soldats de l’OTAN face à l’armée russe”. Moscou a par la même occasion menacé de frapper des “cibles britanniques” si jamais les missiles de longues portées fournis par Londres atteignaient son territoire.
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