Leçon des midterms : la culture woke, le Covid et la presse, des boulets pour les candidats démocrates
CHRONIQUE - Les résultats des élections des "midterms" aux États-Unis repeignent en rouge la Chambre des représentants, avec 199 représentants du côté du Grand Old Party (GOP) contre 172 pour les Démocrates. Au Sénat, la bataille concède un temporaire ex aequo de 48 sièges pour les deux partis, en attendant le dépouillement des votes du Nevada, de la Géorgie, du Wisconsin et de l’Arizona qui devraient survenir dans la nuit du mercredi au jeudi. Si c'est une victoire claire pour une des chambres du Congrès en attendant de connaître la configuration finale de l’autre, ce n’est certes pas le tsunami que les conservateurs américains attendaient.
Entre les premières conséquences en vue des élections présidentielles de 2024, pour le GOP, se joue la victoire éclatante du gouverneur de Floride Ron DeSantis en Floride, nouveau leader républicain. Donald Trump avait annoncé au cours d’un dernier rassemblement de campagne pour ces midterms, que le 14 novembre, il communiquerait une décision importante pour le pays. L’hypothèse la plus évidente semblait être l’annonce de sa candidature. Au vu de la nouvelle donne, il n'est plus exclu qu’il se range à l’avis d’un nombre croissant de coreligionnaires d’apporter son soutien au gouverneur de Floride. Au cours de la campagne, Trump a soutenu personnellement près de 300 candidats républicains. En 2018, il ne l’avait fait que pour 90 candidats. Cet accompagnement s'est révélé une arme à double tranchant.
Les sondages sur le taux de satisfaction à propos de la politique de Biden étant au rouge vif pour l’ensemble du territoire et de manière très transversale, tout paramètre contemplé, une victoire plus polarisée était attendue. Le sénateur Lindsey Graham pour la Caroline du Sud, membre de la Commission de Justice du Sénat, référence s’il en est au sein de son parti, a déclaré à la chaîne NBC que les résultats du mardi soir, ne constituent « définitivement pas une vague républicaine ». Mayra Flores, représentante républicaine pour le Texas, commentant sa défaite, allait dans le même sens : « La vague rouge n’est pas arrivée. Les républicains et les indépendants sont restés à la maison. ». Si ces commentaires ne visent pas directement l’ex-président, l’exposition de ce dernier au cours de la campagne, joue de révélateur sur sa capacité de mobilisation voire de l’ajustement de son discours aux réalités de 2022.
La victoire de DeSantis, en revanche, est diaphane. Ses 20% de différence s’articulent sur un discours explicitement anti-woke. DeSantis a fait sien les fondamentaux de l’éthique politique des républicains, qui est aussi celle des États-Unis et en grande partie de la philosophie politique de l’Occident. Tous ses discours s’enracinent dans la reconnaissance des droits innés de l’individu par-delà la dictature de la majorité. Sur la question de l'idéologie de genre, il n’a eu de cesse de rappeler la primauté de la liberté et du droit naturel par-dessus une vision libérale qui serait une machine à inventer de nouveaux droits fondés sur l’auto-perception d’une ultra minorité, censée imposer ses chimères au reste de la société. Son discours anthropologiquement correct est vécu comme une correction nécessaire à l’idiocratie, ce qu’est devenu le Parti démocrate, traditionnellement représenté par un âne.
La victoire de DeSantis a ceci de particulier qu’elle est contagieuse. Dans son État, tous ceux qui le suivent gagnent par des marges proportionnelles à la sienne. Marco Rubio maintient son siège à la Chambre des représentants avec une marge de 15% sur son adversaire démocrate, Maria Elvira Salazar, de même dans le district sud de la Floride. Le vote républicain hispanique se confirme. L’idée que ceux-ci pourraient être sensibles à un discours clientéliste favorable à l’immigration illégale ou à un racialisme paternaliste, ne fonctionne pas. Les midterms constituent le troisième scrutin américain à démonter les stéréotypes racistes à cet égard. Il n’y pas de vote afro-américain ou hispanique captif des démocrates. Les messages portant sur le vote du "mâle noir" incapable de discernement par lui-même, amplement diffusé par des personnalités telles qu'Oprah Winfrey ou Barack Obama, ont démontré leur déphasage avec la réalité.
Sur l’échiquier national, pour Joe Biden, la situation, même en cas de légère majorité démocrate au Sénat, se traduit par un concept et un seul : "ingouvernabilité". La Chambre des représentants va s’opposer à son agenda woke en tout et pour tout. Elle va aussi commencer à demander des comptes sur la traçabilité des fonds et des aides militaires accordées à l’Ukraine, voire suivre la recommandation du sénateur Kevin McCarthy consistant à s’opposer à des aides additionnelles.
Le sénateur Rand Paul a par ailleurs fait savoir qu’il allait soumettre à une instruction judiciaire les documents de Fauci, évoquant la "mascarade Covid". C’est donc toute une construction de mensonges et de corruption qui est désormais menacée de s’écrouler. Le risque n’est pas que politique pour Biden : il est judiciaire.
Mais il y a aussi fort à parier que le péril vienne de ses propres rangs. De plus en plus de démocrates tendent à s’éloigner du radicalisme des Barack Obama, Hilary Clinton, Nancy Pelosi, Joe Biden, pour revenir à des positions plus modérées, moins disruptives, plus à l’écoute de la réalité de terrain : inflation, chômage, criminalité, etc.
Une des analyses à usage du monde, en dehors des États-Unis, est le rôle de la politique covidienne dans le retournement de l’état de l’opinion publique. Joe Biden et les candidats de son parti ont totalement éludé toute allusion à la crise sanitaire là où, jusqu’en 2021, il s’agissait d’un sujet prépondérant. C’étaient alors les démocrates "pro-science", pro confinement, pro fermeture d’écoles, pro vaccin obligatoire, contre les "négationnistes" et les "conspirationnistes". Ce clivage n’est plus d’actualité. Les auteurs des mesures les plus anti-constitutionnelles et les plus anti-scientifiques de l'histoire de la médecine se gardent désormais de mentionner le mot Covid. Aux États-Unis, comme au Brésil, comme probablement partout en Occident -, les prochaines élections dans le monde le diront -, plus les politiques se sont maintenus dans une attitude de prudence par rapport à la folie qui s’est abattue sur le monde, plus ils survivent correctement, même en cas de défaite, comme ce fut le cas pour Jair Bolsonaro. Ron DeSantis, assumant des positions très controversées en 2020 et 2021, telles que le maintien de l'ouverture des écoles, l'interdiction du port du masque chez les enfants, l'interdiction de la vaccination obligatoire dans son État, est de ce point de vue une figure emblématique. Ses 59,4% correspondent sans doute à cette perception de digue à la résistance éprouvée dans les faits, qui récolte aujourd'hui les fruits de son courage politique.
L’autre message à destination du reste du monde est l’érosion de la confiance dans les médias de grande audience. La couverture militante depuis des années en faveur des démocrates n’inspire plus confiance. La presse non seulement n’informe plus, mais elle ne forme plus l’opinion. Avec une telle couverture homogène, monolithique, censurant tous les sujets qui avant auraient été traités avec rang d'investigation journalistique, le Parti démocrate aurait dû faire l’objet d’un plébiscite à l’algérienne. Bolsonaro aurait dû être déchiqueté dans les urnes. La popularité des politiques se construit sur une base inversement proportionnelle ou du moins étrangère au discours fourni par les médias mainstream.
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