Bayonne : l'Eglise confrontée à une nouvelle affaire de pédophilie
La justice s'est saisie vendredi de l'affaire du prêtre mis en cause pour pédophilie à Bayonne (Pyrénées-Atlantiques) avec l'ouverture d'une enquête préliminaire par le Parquet, une affaire de plus sur les bras de l'Eglise catholique, qui peine à maîtriser ce dossier ultra-sensible.
Les faits remontent, pour certains d'entre eux, à 1990, et font l'objet d'une plainte de la mère de l'une des victimes. Le prêtre, âgé de 53 ans, et qui en 2016 était toujours en contact avec des mineurs au sein de l'Eglise catholique, a été suspendu de ses fonctions par sa hiérarchie à la mi-avril.
"J'ai ouvert une enquête confiée à la police judiciaire de Bayonne, qui a pour objet de matérialiser les faits, de les dater et aussi de les localiser", a indiqué le procureur de la République de Bayonne, Samuel Vuelta Simon, au cours d'une conférence de presse.
"Je me fonde sur la plainte déposée le 25 septembre 2015 par la mère de la victime au Procureur de la République de Clermont-Ferrand, qui me l'a transmise hier", a-t-il ajouté. La mère réside aujourd'hui dans la métropole auvergnate.
La victime, qui est par ailleurs le neveu du prêtre et réside en Belgique, est aujourd'hui âgée de 38 ans et en avait 12 au moment des faits. Le prêtre mis en cause, l'abbé Jean-François Sarramagnan, devrait être entendu par les enquêteurs dans les prochains jours.
La difficulté pour des faits si anciens réside dans la vérification de leurs matérialisations, leurs qualifications, leurs dates pour savoir s'ils peuvent encore être poursuivis ou s'ils sont prescrits, et déterminer le lieu où ils ont été commis, a indiqué le magistrat. Selon Samuel Vuelta Simon, certains auraient été commis à Hasparren (Pyrénées-Atlantiques) territoire sur lequel le Parquet de Bayonne est compétent.
Cette nouvelle affaire vient alourdir un dossier déjà très sensible au sein de l'Eglise catholique: un de ses représentants les plus éminents, le cardinal-archevêque de Lyon Mgr Philippe Barbarin est visé par deux enquêtes préliminaires du parquet de Lyon pour non-dénonciation d'agressions sexuelles, bien que le prélat nie avoir couvert de tels faits.
Alors qu'à Bayonne les faits de pédophilie étaient connus de la hiérarchie ecclésiastique depuis au moins 2008, l'abbé Sarramagnan était encore en contact en 2016 avec des mineurs, comme prêtre à la paroisse de Saint-Pierre d'Irube et adjoint au directeur diocésain, en charge de l'enseignement catholique.
Suspendu une première fois en 2008 de toute responsabilité ecclésiastique et "exfiltré" dans une abbaye des Hautes-Pyrénées, à Tournay, il avait été réintégré dans le circuit ecclésiastique en 2010 par l'évêque de Bayonne, Mgr Marc Aillet, auquel le prêtre avait pourtant avoué les faits.
Le 27 avril, dans une lettre à ses "chers diocésains" rendue publique, Mgr Aillet avait encore affirmé que l'abbé, ordonné prêtre en 1989, n'avait "pas de responsabilité directe auprès d'enfants et de jeunes".
Il était pourtant encore présent à une journée diocésaine le 6 février à Salies-de-Béarn, organisée pour des collégiens de 4e et de 3e de l'enseignement catholique, comme l'a finalement admis l'évêché.
Après avoir eu connaissance de la plainte de la mère de l'une des victimes, Mgr Aillet, le 13 avril 2016, avait suspendu l'abbé Sarramagnan de toute fonction ecclésiastique et signalé les faits au parquet de Bayonne, dans une lettre datée du 15 avril.
Le 28 avril, l'évêché avait précisé à l'AFP que Mgr Aillet n'avait auparavant pas signalé les faits de pédophilie, dont il avait connaissance depuis 2009, parce que jusqu'à présent, "la famille n'avait pas déposé plainte". De plus, ces faits s'étaient déroulés non pas au sein de l'Eglise mais "dans un cadre familial", avait-il déclaré ensuite en conférence de presse.
Depuis 2003, l'Eglise recommande cependant, soit d'obtenir du prêtre concerné qu'il se dénonce, soit le signalement à la justice. Mgr Marc Aillet, 58 ans, connu pour ses positions conservatrices, a saisi la justice trois jours après la conférence des évêques de France, le 12 avril, sur la thématique ultra-sensible des cas de pédophilie.
L'abbé Sarramagnan, qui, selon l'évêché, a fait deux tentatives de suicide en 1991 et en 2007, a été de nouveau admis à l'abbaye de Tournay après sa deuxième suspension.
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