Chronique Covid 2 – Les prophéties ubuesques des épidémiologistes modélisateurs

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François Pesty pour FranceSoir
Publié le 02 juillet 2020 - 14:28
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Les prophéties ubuesques des épidémiologistes modélisateurs
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Commençons par le commencement. Rien de tel ne se serait produit sans les modèles mathématiques de quelques épidémiologistes et virologues de forte notoriété ayant proclamé qu’ils sauraient mettre en équation la pandémie (épidémie à l’échelle mondiale) de Covid-19 (la maladie infectieuse) causée par le « SARS-COV-2 » (le nom du « nouveau coronavirus »). Trois semaines avant notre confinement hexagonal, le 25 février 2020, la rédaction de LCI se faisait l’écho des sombres projections du Pr Marc Lipsitch, épidémiologiste des maladies infectieuses à l’Université de Harvard (USA). Celui-ci affirmait alors que « 40% à 70% de la population mondiale serait infectée d’ici un an ». Il confirmera ses prévisions mortifères le 2 mars lors d’une interview sur CBS.

Selon le tableau de bord de l’OMS, avec à peine plus de 10 millions de cas confirmés dans le monde sur 7,7 milliards de terriens, nous ne sommes qu’à 0,13% de la population planétaire infectée. Une erreur d’un multiple compris entre 300 et 500 !  

Mais, ce fut l'anglais, le Pr Neil Ferguson, qui effraya Emmanuel Macron, Boris Johnson et Donald Trump.

Lesquels eurent la primeur de son étude publiée sur le site de l’Imperial College of London le 16 mars. Si les Britanniques rejetaient le confinement, son modèle prévoyait que le Royaume-Uni serait endeuillé de 510.000 morts. Quasiment la totalité des décès enregistrés chaque année outre-Manche. Qui peut le croire ? Alors que nous étions encore tous confinés, la revue Nature, reçu le 30 mars un projet de publication accélérée pour un article qui fut accepté le 22 mai et publié en ligne le 6 juin. Ses conclusions clamaient haut et fort que le confinement dans 11 pays européens avait permis de sauver 3.1 millions de vies.

En France, 690.000 décès évités, soit davantage que les 610.000 prévus par l’INSEE pour toute l’année 2020. Le confinement est un véritable miracle de la Médecine moderne !

 

La boule de cristal de Neil Ferguson s’est invariablement trompée lourdement dans ses projections, comme en atteste le tableau suivant :

Les surestimations sont énormes et ont des conséquences catastrophiques sur les politiques publiques.

 

Nous avons aussi nos oracles en France

Le Pr Jérôme Salomon, Directeur général de la santé, qui est l’un des visages dont on se souviendra le plus de cette crise, alors que tous les soirs il égrainait inlassablement le bilan macabre du Covid pour les dernières 24 heures, affirmait le 16 juin 2020 devant la Commission d’enquête parlementaire qui l’auditionnait, que « les équipes françaises de la modélisation mathématique sont aussi de très haut niveau ». Il faut dire que l’un de ses prédécesseurs à la DGS, le Pr William Dab, épidémiologiste, le 17 mars au micro de France Info avait appuyé le choix du confinement en créditant l’étude anglaise.  

Pascal Crepey, l’un des modélisateurs modèles,  interviewé sur BFMTV le 2 avril, interprétant la courbe des « nouveaux cas sévères par jour » a soutenu que « si le confinement n’avait pas eu lieu, nous aurions été bien plus haut et dans une situation bien plus désespérée » Sur quoi se basait-il pour une telle affirmation ? Disposait-il d’un groupe témoin non confiné pour faire cette comparaison ? Pascal Crepey et ses collègues se sont empressés de publier sur le site de l’EHESP, l’école de hautes études en santé publique, leur analyse (sans revue par des pairs), le 22 avril, en pleine prolongation du confinement, arguant que 60.000 de nos compatriotes auraient été sauvés d’une mort inévitable (10% de la mortalité annuelle en France). Immédiatement, le Ministre Olivier Véran s’arroge ce succès lors d’une interview accordée à France Inter le 24 avril.

Non mais, quel acte médical, quel médicament, quelle intervention chirurgicale pourrait produire un tel bénéfice en santé ? 

 

Cependant, le « Neil Ferguson» à la française, fut incarné sans nul doute par Arnaud Fontanet, épidémiologiste, membre du Conseil Scientifique.

Il tint devant la mission d’enquête parlementaire le 18 juin la position suivante : « Alors, le confinement, à la date où la décision a été prise, on n’avait pas le choix. L’urgence était dans les réanimations, dans le grand Est et les hôpitaux du Nord de Paris on avait vu affluer des patients dans un nombre tout à fait inhabituel et avec des formes cliniques extrêmement sévères de pneumopathies inflammatoires…, on avait l’expérience de l’Italie, 7 à 10 jours devant nous dont la situation s’amplifiait…, et aussi des éléments tirés de modèles mathématiques qui nous laissaient entendre que nous étions sur un démarrage d’une courbe exponentielle et que si on projetait à quelques jours voire semaines, nos estimations, on se retrouvait dans une situation où les réanimations seraient incapables de prendre en charge les patients… Il fallait d’abord sauver les réanimateurs, et les patients qui se trouvaient dans les réanimations et les services de maladies infectieuses ».

Au total, une dramatisation et des affirmations péremptoires, des arguments d’autorité, mais pas le commencement d’une démonstration de la pertinence du confinement généralisé, totalement inédit, jamais évalué, contre-intuitif, nous en reparlerons.

 

Comme ce n’était pas suffisant, le Conseil Scientifique avait un autre modélisateur, Simon Cauchemez, également de l’Institut Pasteur à Paris, moins médiatisé.

 

Pourquoi les prévisions des épidémiologistes modélisateurs sont-elles si fausses ?

Les modèles mathématiques auxquels ils font appel sont très complexes, avec un nombre important de variables, systématiquement paramétrées sur les « scénarios du pire ». Pas étonnant alors qu’ils se trompent énormément. Au fond, la modélisation s’accorde parfaitement avec le principe de précaution poussé à l’absurde, que nos décideurs publics chérissent, car ils peuvent alors s’autoriser les mesures les plus draconiennes afin de ne pouvoir prêter le flanc à la critique (On ne reprochera jamais à un homme politique d’en avoir trop fait).

Aux antipodes, du vulgum pecus, comme de la « bonne médecine », qui tous deux dans le doute s’abstiennent. Primum non nocere (En premier « ne pas nuire »).

 

François PESTY, est Docteur en Pharmacie, ancien interne des hôpitaux de Paris. Il est également diplômé d’une grande école de commerce à Paris et San Francisco. Après ses 4 années d’internat, il passe plus de 15 ans dans l’industrie pharmaceutique, dans 3 laboratoires, au management du marketing et des ventes. En 2005, il devient consultant indépendant, Expert-Conseil pour une prise en charge médicamenteuse mieux sécurisée (à l’hôpital), plus pertinente et plus efficiente. Il participe depuis 2012 à l’organisation annuelle du colloque « Sur- et Sous- médicalisation, surdiagnostics et surtraitements ».

 

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