E171 : pourquoi Bercy refuse de bannir ce colorant suspecté d'être cancérigène
En novembre 2018, la loi Egalim, consécutive aux Etats généraux de l'alimentation, entérinait la suspension en France du colorant E171 (dioxyde de titane ou TiO2), considéré comme un cancérigène potentiel et notamment présent dans les bonbons. Mais le ministre de l'Economie Bruno Le Maire a déclaré ne pas vouloir signer l'arrêté permettant l'application de la loi. Une position qui a provoqué l'ire des ONG luttant pour une alimentation saine.
Bruno Le Maire a pointé les contradictions entre les différentes données sur le sujet. Une étude de l'Inra (Institut national de la recherche agronomique) de 2017 a montré que les nanoparticules contenues dans le E171 peuvent passer dans le sang et provoquer un affaiblissement immunitaire. Des signes avant-coureur de cancer colorectal ont également été détectés. Toutefois, l'Inra a précisé qu'il faudrait encore deux ans d'études pour établir que le colorant provoque un cancer chez les rats. Ces résultats ne peuvent être extrapolés à l'homme mais "constituent un premier élément de vigilance" selon l'institut.
Pour l'Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA), les différentes études évoquant ces problèmes ne démontrent pas que le colorant est "de nature à entraîner un risque sanitaire". C'est d'ailleurs pour cela que la loi Egalim ne pouvait imposer qu'une suspension, une interdiction totale relevant du droit européen.
Bruno Le Maire évoque ces conclusions ainsi que celles de L'Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) "qui conclue à des évaluations différentes" selon lui. L'Anses avait toutefois jugé que l'étude de l'Inra "met en évidence des effets qui n’avaient pas été identifiés auparavant" et "souligne la nécessité de conduire les études nécessaires à la parfaite caractérisation du danger associé au E171".
En clair, aucune agence n'a acquis la preuve absolue de l'aspect cancérigène du colorant, mais l'étude de l'Inra soulève des questions. Le ministre de l'Economie a choisi d'attendre de nouveaux éléments. "Je souhaite qu'on aille au bout de l'analyse", a-t-il déclaré sur France 5 mardi 8. A la question sur l'application d'un principe de précaution, Bruno Le Maire a répondu que "dans le doute, c'est aux industriels de s'abstenir" et que si une dangerosité était établie, il serait "le premier à signer l'arrêté". Une position qui n'a pas apaisé les ONG qui dénoncent un mépris pour le travail parlementaire.
Bruno Le Maire a demandé à l'Anses d'accélérer ses travaux pour avoir une réponse "à l'échéance de six mois maximum".
Le centre international de recherche sur le cancer (CIRC, organe de l'OMS) a classé en 2006 le E171 comme cancérigène "possible".
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