PimEyes : moteur de recherche à visages ou instrument de cyber espionnage ?
De nos jours, à cause des pseudonymes ou des images de profil retravaillées, il est difficile de s'assurer de l'identité des utilisateurs sur les réseaux sociaux. Pour contourner ce problème, des logiciels comme PimEyes permettent de mettre à disposition la technologie de reconnaissance d’image, pour rechercher en quelque secondes des informations liées à une image. Une porte ouverte à... toutes les fenêtres ?
Un algorithme d’une précision effrayante
PimEyes est un service payant qui permet, pour 29,99 $ par mois, de trouver à partir d’une photo tout ce qui lui est lié. Résultat : une photo de profil peut dévoiler certains documents que la personne identifiée ne souhaite pas divulguer.
Le New York Times a testé cette technologie et indique dans un article que la précision est... étonnante. Le moteur de recherche trouve des photos dont les personnes concernées ne connaissaient même pas l’existence, dans des albums en ligne des photos de mariage, des fêtes, d’expositions au musée, de concerts, et même dans l'arrière-plan flou de photos prises par des inconnus. Ces photos peuvent provenir d’articles de presse, de blogs, etc. Sur certaines d'entre elles, les personnes apparaissent avec des lunettes et même masquées, mais elles sont tout de même retrouvées par l’algorithme.
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Un outil qui se veut protecteur de l'e-réputation
Pour Ella Jakubowska, conseillère politique chez European Digital Rights, un groupe de défense de la vie privée, cet outil n'est ni plus ni moins qu'une technologie pour "stalker", c’est-à-dire espionner.
Le propriétaire du logiciel s'en défend. Géorgien de 34 ans appelé Giorgi Gobronidze, il assure que cette technologie n’a rien à voir avec de l’espionnage, au contraire. Selon lui, PimEyes pourrait être un outil "pour le bien", qui aiderait les gens à garder un œil sur leur réputation en ligne. En théorie, les utilisateurs de PimEyes sont censés rechercher uniquement leurs propres visages ou les visages de personnes ayant consenti à être recherchés sur le web. Pour l'instant, rien n'empêche un utilisateur de contourner le règlement d’éthique de la plateforme. PimEyes n'a aucun contrôle en place pour empêcher les utilisateurs de rechercher le visage d’une personne n’y ayant pas consenti.
PimEyes fait l’objet d’enquêtes pour violations des droits et libertés
Tout comme l’entreprise de reconnaissance faciale Clearview a été condamnée pour utilisation sans consentement des images des personnes au profit de son algorithme, l’agence allemande de protection des données de la région Baden Wurttemberg a annoncé l'année dernière une enquête sur PimEyes pour d'éventuelles violations de la loi européenne sur la protection de la vie privée, le règlement général sur la protection des données (RGPD), qui comprend des règles strictes concernant l'utilisation des données biométriques.
Cette enquête se poursuit. De son côté, la société affirme ne pas être dans le même cas que Clearview, car l’entreprise ne stocke pas de photos ou de modèles de visage individuels, mais plutôt des URL vers des images individuelles associées aux traits du visage qu'elles contiennent. Gobronidze a déclaré pour CNN que PimEyes ne voulait pas accumuler de photos et de données personnelles. "Nous ne voulons pas devenir un monstre stockant un grand nombre de photos de personnes.", a-t-il confié. Des belles promesses ?
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