Brexit : premiers signes de panique sur le marché immobilier britannique
"Les circonstances de marché extraordinaires, qui impactent le secteur dans son ensemble, ont entraîné un manque de liquidités immédiates dans le fonds Aviva Investors Property Trust. En conséquence, nous avons agi afin de sauvegarder les intérêts de tous nos investisseurs en suspendant les transactions au sein du fonds avec effet immédiat", a annoncé un porte-parole du gestionnaire d'actifs Aviva Investors ce mardi 5 en début d'après-midi.
"Cette suspension donnera à Aviva Investors un plus grand contrôle sur la gestion des flux de liquidités et sur la conduite ordonnée des ventes d'actifs afin de respecter nos obligations à l'égard des investisseurs souhaitant récupérer leurs placements", a-t-il ajouté.
Ce gel va permettre à Aviva de ne pas vendre à la va-vite les biens immobiliers commerciaux (bureaux, magasins...) d'une valeur de 1,8 milliard de livres (2,1 mds EUR) gérés par son fonds.
Un autre groupe financier, M&G Investments, a annoncé peu après qu'il avait suspendu lui aussi les activités d'un fonds comparable, qui gère quelque 4,4 milliards de livres d'actifs. Il a souligné que les demandes de remboursement de la part des investisseurs avaient "augmenté de façon marquée en raison du haut niveau d'incertitude dans le marché immobilier britannique depuis le résultat du référendum sur l'Union européenne".
Au lendemain de la décision de l'assureur Standard Life de geler l'un de ses fonds immobiliers d'une valeur de 2,9 milliards de livres, ces deux annonces constituent de nouvelles manifestations concrètes d'un possible début de panique sur le marché immobilier après le séisme provoqué par la décision des Britanniques de quitter l'UE lors du référendum du 23 juin.
"Les dominos commencent à tomber sur le marché immobilier commercial britannique alors qu'un autre fonds ferme ses portes en raison de demandes de retraits précipitées par le vote sur le Brexit et cela n'est probablement qu'une question de temps avant de voir d'autres fonds suivre le même chemin", a commenté Laith Khalaf, analyste chez Hargreaves Lansdown.
Résultat, si la théorie des dominos se confirme, l'offre d'immobilier commercial pourrait affluer sur le marché, "ce qui devrait entraîner une pression à la baisse sur les prix", ajoute l'analyste. "Les investisseurs étrangers pourraient être tentés par la chute de la livre mais ils pourraient aussi bien décider de rester à l'écart d'une économie plongée dans l'incertitude", juge-t-il.
Rappel inquiétant, le dernier crash immobilier dans le pays, à l'orée de la crise financière mondiale de 2008, avait démarré par les difficultés des fonds à faire face à leurs obligations.
Face à cette situation "précaire", "les investisseurs deviennent très nerveux (...) La dernière fois que nous avons vu ce genre de mesures était durant la crise financière", a asouligné Mark Priest, d'ETX Capital.
Après s'être effondrée en 2008, la pierre a connu une véritable renaissance, portée par l'empressement des classes supérieures britanniques de placer leurs revenus et par des masses de liquidités en provenance notamment du Golfe ou de Russie. Ce boom s'est accéléré à partir de 2013 et, à Londres, les prix sont aujourd'hui supérieurs de plus de 50% à ceux du pic d'avant la crise.
Au-delà de l'immobilier commercial, c'est tout le secteur du BTP et de l'immobilier qui tremble désormais en Grande-Bretagne depuis le vote sur le Brexit, après avoir connu de premiers signes de ralentissement ces derniers mois.
En juin, selon l'indice PMI publié lundi par le cabinet Markit, le secteur de la construction a connu son plus mauvais mois depuis sept ans, plombé par "des décisions d'investissement largement repoussées et la peur sur le marché résidentiel", selon Tim Moore, économiste chez Markit. Cette enquête couvrait essentiellement les jours d'avant le référendum.
A la Bourse de Londres mardi, ce flot de mauvaises nouvelles a alimenté un plongeon des valeurs immobilières et du BTP, qui ont perdu entre 6% et presque 10%.
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