"Daphné" : la jolie rousse londonienne libre et fragile (critique)

Auteur(s)
Jean-Michel Comte
Publié le 01 mai 2018 - 09:52
Mis à jour le 02 mai 2018 - 15:58
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Emily Beecham Film Daphne
Crédits
©Agatha A. Nitecka/Paname Distribution
Emily Beecham, qui joue Daphné, porte le film sur ses épaules.
©Agatha A. Nitecka/Paname Distribution
Dans son premier long-métrage "Daphné", qui sort ce mercredi, le réalisateur écossais Pater Mackie Burns dresse le portrait d'une jeune Londonienne libérée et moderne mais qui s'interroge sur ses choix de vie. Le personnage est interprété par l'actrice Emily Beecham.

Un beau portrait de jeune femme libérée mais fragile, seule mais pas solitaire, dans le Londres cosmopolite d'aujourd'hui: c'est Daphné, premier film du réalisateur écossais Peter Mackie Burns, qui sort ce mercredi 2 mai sur les écrans français.

Daphné (Emily Beecham), jolie rousse de 31 ans, est une jeune femme moderne, qui travaille aux cuisines d'un petit restaurant dans le quartier animé et populaire d'Elephant and Castle à Londres. Célibataire, elle aime faire la fête, aligne les rencontres sans lendemain, roule elle-même ses cigarettes, touche parfois à la drogue, boit (un peu trop), sort en boîte de nuit et n'a comme seule compagnie, dans son coquet petit appartement, qu'un gros serpent nommé Scratch.

Elle est intelligente et spirituelle, manie l'humour et parfois le cynisme, cite Freud dans ses conversations avec ses amis, ne croit pas à l'amour et ne veut surtout pas s'engager. Son patron, marié et père de famille, sympa et bienveillant, est doucement amoureux d'elle mais pas insistant. Daphné a aussi des relations difficiles avec sa mère (Geraldine James), dont elle n'apprécie pas la volonté de soigner son cancer à coups de médecine douce et de séances de méditation bouddhistes.

C'est la vie que Daphné a choisie. Un tourbillon sans vraie passion, une misanthropie que cache une ouverture aux gens et aux choses, une routine qui ne la rend pas heureuse. Quand, un soir, elle assiste au violent braquage d'une épicerie de quartier dans lequel le vendeur pakistanais est agressé, elle est choquée mais semble s'en remettre, dans les jours qui suivent. C'est une fausse impression. Car cet événement va fissurer sa carapace, l'amener à s'interroger sur ses choix de vie, changer ses relations avec les autres…

C'est le premier long-métrage de Peter Mackie Burns, qui jusqu'à présent avait réalisé des documentaires et des courts-métrages. Avec son coscénariste, dit-il, "on voulait faire un film sur un personnage complexe qui refuse de se laisser enfermer dans les rôles qu’on attribue le plus souvent aux femmes: épouse, petite amie, partenaire de vie, mère, fille obéissante à ses parents –voilà une liste assez complète. On souhaitait aussi que le personnage ait de l’humour et s’en serve constamment comme une arme psychologique".

Daphné est cynique, désabusée, fume, picole, couche avec n’importe qui, n'aime personne, veut toujours avoir le dernier mot –un personnage féminin que Peter Mackie Burns refuse cependant de qualifier d’"antipathique" ou de "difficile": "on n’utilise jamais ces qualificatifs pour parler d’un personnage masculin", dit-il. Père de deux jeunes enfants, le réalisateur s'est souvent intéressé aux femmes dans ses courts-métrages: "je suis un homme, et je ne sais pas si je suis féministe mais, à mes yeux, l’appartenance sexuelle est une construction intellectuelle au même titre que le personnage. Je me suis attaché à des histoires de femmes parce que je trouve qu’elles offrent un point de vue légèrement différent du mien, et tout à fait intéressant. C’est aussi simple que ça".

Filmé dans un quartier qui illustre le Londres populaire et vivant d’aujourd’hui, son film a des baisses de rythme, on ne sait pas trop dans quelle direction il va évoluer, il n'y a pas vraiment d'histoire suivie. Mais c'est voulu, c'est plutôt l'étude psychologique d'un personnage, la description d'une solitude au sein d'une grande ville, des tranches de vie qui se succèdent et vont évoluer: c'est assez fin, bien vu, avec un mélange doux-amer d'humour et de réalisme.

Lire la critique – Ave César!: l'hommage des frères Coen à l'âge d'or d'Hollywood

Et bien sûr tout le film est porté par la remarquable interprétation de la jeune actrice anglo-américaine Emily Beecham, dont c'est le premier grand rôle après quelques apparitions à l'écran, notamment dans le film Ave César! des frères Coen. Étonnante de naturel et d'aisance dans ce rôle qui lui a valu le Prix de la meilleure actrice aux festivals de Turin et d'Edimbourg, elle est de toutes les scènes et fait corps avec un personnage qu'elle rend crédible, moderne et original, ni douce ni rebelle, finalement attachante.

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