Avril 1972 : la mort de Pierre Lazareff, fondateur de "France-Soir" (VIDEO)

Auteur(s)
Dominique de Montvalon
Publié le 06 avril 2016 - 04:59
Mis à jour le 17 avril 2016 - 12:29
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Une FranceSoir 22.04.1972 Mort Pierre Lazareff
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La Une du 22 avril 1972.
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Le vendredi 22 avril 1972, dans la France de l’après-Mai 68, alors que Georges Pompidou est aux commandes de l’Etat, "France-Soir" annonce à la Une la mort, à 65 ans, au terme d’une "douloureuse maladie", de son directeur général Pierre Lazareff, l’âme du journal. Co-producteur de "Cinq colonnes à la Une", il aura été aussi un grand homme de télévision.

Lorsque France-Soir, dans ses éditions du 22 avril 1972, annonce à la Une, photo à l’appui, la mort la veille -exactement à 1h59 du matin- de l’homme qui a dirigé et imposé le journal-phare de l’après-guerre, cela va bien au-delà de l’hommage sincère, ému et même parfois bouleversé d’une rédaction à un patron créatif, autoritaire, passionné.

France-Soir, ce jour-là, salue la mémoire d’un véritable génie de l’info. Fils d’immigrés arméniens de Russie (naturalisés français), il a vécu sa jeunesse à Montmartre, y a appris à aimer le monde du spectacle, a publié son premier journal à 9 ans et écrit son premier article à 14 ans dans le quotidien Le Peuple.

Formidable  destin -à l’américaine- d’un homme hors-normes qui, avant de s’engager tout entier dans la folle passion du journalisme, fut le secrétaire de Mistinguett puis travailla au Moulin Rouge et dans tant de théâtres parisiens. Tous ceux qui, au fil des années, ont connu Lazareff  et ont eu le privilège de travailler avec lui en parlent aujourd’hui avec émotion. Et avec quelle fierté! D’autant que, s’il était exigeant avec ses collaborateurs, il était aussi leur protecteur. 

Promu en 1931 directeur de la rédaction de Paris-Soir,  il a définitivement trouvé cette année-là, et pour de bon, son chemin. Lorsqu’éclate la Seconde guerre mondiale, il part à New-York puis, vite, gagne Londres, d’où il dirige les émissions radiophoniques à destination de l’Europe occupée. A la Libération, le voici de retour à Paris: il reprend alors Défense de la France, le grand journal clandestin de la Résistance, et le rebaptise France-Soir.

Et l’aventure commence le 8 novembre 1944. De grandes plumes de l’après-guerre -Joseph Kessel, Lucien Bodard- intègrent un quotidien populaire, mais pas populiste, qui devient très vite, alors que la télévision est balbutiante, le journal le plus lu de France, le plus influent, donc une des boussoles du monde politique: sept éditions et un million d’exemplaires vendus en moyenne  chaque jour et même, un peu plus tard, dans les grands rendez-vous,  deux millions d’exemplaires.

Avec à ses côtés sa femme, Hélène Gordon-Lazareff, qui a lancé et imposé le magazine Elle en 1945, Pierre Lazareff -la pipe à la bouche et des bretelles célébrissimes- devient l’homme-clé de la charnière entre la IVème République et la Vème République. Et aussi, car il a plus d‘une corde à son arc médiatique, le pionnier de l’actualité télévisée.

Dans l’histoire de l’ORTF, l’émission Cinq colonnes à la Une, que produit Lazareff avec un trio resté "historique" (Pierre Desgraupes, Pierre Dumayet, Igor Barrère), fait en effet figure de référence novatrice et pour un peu, dans une France conformiste, révolutionnaire.   

Suractif, réactif, créatif, colérique, imaginatif, Pierre Lazareff, dont la demeure de Louveciennes ("La pelouse", dans les Yvelines) sera chaque dimanche, pendant des années, "le" lieu où il fallait être car la politique s’y faisait (et s’y défaisait), est, à sa mort, couvert d’éloges unanimes.

Rien ne le prédisposait à être ainsi, au bout de son parcours,  admiré, courtisé et craint. C’était un bourreau de travail, un intuitif, un homme qui avait le sens du peuple, bref un grand Monsieur. Avec qui les présidents, quels qu’ils soient, avaient intérêt, au total, à faire bon ménage. 

Pierre Lazareff, né à Paris, est à mort à Neuilly à l'âge de 65 ans. A 17 ans, il avait lancé son premier hebdomadaire. Son nom?  L’illusion.

(Voir ci-dessous le reportage sur la mort de Pierre Lazareff dans le Journal télévisé de 20h du 21 avril 1972):

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