Jean Vantalon, un maton qui en pince pour la petite reine
Trousseau de clés à la main, Jean Vantalon veille à la sécurité des détenus de la prison de Brest. Mais, une fois dehors, celui qui suit le Tour de France pour une télévision irlandaise met à profit sa passion pour la petite reine pour aider des jeunes coureurs.
"Jean a énormément de contacts dans le monde entier et quand il détecte, grâce à son réseau, un jeune qui a des qualités dans un pays où il est difficile de faire de la compétition, il lui cherche un club ici en France", témoigne le président de l'Amicale cycliste bisontine Pascal Orlandi, disant avoir accueilli grâce à lui plusieurs jeunes cyclistes, dont l'Irlandais Eddi Dunbar, l'Australien Benjamin Dyball ou le Finlandais Jakko Hanninen.
D'autres sont venus du Royaume-Uni, de Nouvelle-Zélande, d'Australie, du Maroc ou encore des Etats-Unis.
"C'est un amoureux du vélo qui fait beaucoup pour les jeunes et ça, c'est fantastique", abonde Bernard Hinault, quintuple vainqueur du Tour de France à propos du gardien de prison, avec qui il a partagé des parties de pêche au saumon en Irlande.
Le gardien de prison aide aussi des équipes à participer à des courses en France, dont l'équipe continentale britannique espoirs Trinity Racing ou l'équipe professionnelle d'Azerbaïdjan Bakou Cycling project.
Mais Jean Vantalon, c'est également la marque Armor-Lux sur les maillots de l'équipe irlandaise lors des championnats du monde de cyclisme en 2014 et 2015 ou le Tour du Connemara, une épreuve de cyclotourisme lancée en 2012 et qui réunit chaque année des milliers de participants.
"Ce n'est pas la compétition qui m'intéresse, mais l'aventure", prévient d'emblée le surveillant pénitentiaire, qui collabore depuis 2016 avec la télévision nationale irlandaise TG4 pour raconter le Tour de France.
- "à mon tour de renvoyer l'ascenseur" -
"J'ai découvert en Irlande une culture à part", explique le quinquagénaire, disant être tombé amoureux du Connemara en même temps qu'il s'éprenait d'une Irlandaise. Il avait 24 ans. "Le pub en Irlande c'est l'équivalent de Facebook chez nous", illustre-t-il lors d'un entretien à Brest, dans le magasin de cycles, sur le modèle des Coffee Bike anglais, de l'ancien cycliste Eric Berthou.
En parallèle de son travail de gardien de prison - d'abord à Fresnes, au sud de Paris, où son grand-père a été emprisonné avant d'être envoyé en 1944 au camp de concentration de Bergen-Belsen et d'y mourir, puis en Corse, en Normandie et depuis 2010 à Brest -, il lance en 2016 avec d'autres passionnés de vélo Be Celt, un site d'actualité autour du vélo et de la culture celte au départ, puis plus large lorsqu'il rencontre un vrai succès, avec 20.000 abonnés sur Facebook.
Grâce à la publicité, la plateforme aide également de jeunes cyclistes étrangers à venir en France, "là où il y a les plus belles courses", souligne Jean Vantalon. "J'ai eu la chance dans ma vie de tomber sur des gens qui m'ont tendu la main. À mon tour de renvoyer l'ascenseur", se justifie le Breton, père d'un petit garçon de trois ans et beau-père de deux adolescents.
Né à Brest, un 30 avril 1970, le petit Jean vit plusieurs années à Madagascar puis à Tahiti. Son père est ingénieur à l'arsenal et rêve de découvrir le monde. "Mon père voulait élever ses enfants dans le mélange des cultures", raconte le gardien de prison à la troublante ressemblance avec l'icône pop anglaise Morrissey, dont il a reçu un album dédicacé. "À mon sosie", lui a écrit le chanteur.
Mais à 13 ans, son père le renvoie à Brest, en pension, mécontent de ses résultats scolaires. "C'est là que j'ai commencé les conneries, mais c'est là aussi que le vélo est entré dans ma vie", explique-t-il, évoquant sa rencontre avec un éducateur. "Il m'a mis sur un vélo récupéré dans une déchetterie, mais j'ai adoré et ça ne s'est plus jamais arrêté".
L'article vous a plu ? Il a mobilisé notre rédaction qui ne vit que de vos dons.
L'information a un coût, d'autant plus que la concurrence des rédactions subventionnées impose un surcroît de rigueur et de professionnalisme.
Avec votre soutien, France-Soir continuera à proposer ses articles gratuitement car nous pensons que tout le monde doit avoir accès à une information libre et indépendante pour se forger sa propre opinion.
Vous êtes la condition sine qua non à notre existence, soutenez-nous pour que France-Soir demeure le média français qui fait s’exprimer les plus légitimes.
Si vous le pouvez, soutenez-nous mensuellement, à partir de seulement 1€. Votre impact en faveur d’une presse libre n’en sera que plus fort. Merci.