Huit mois après, le mouvement #MeToo omniprésent dans le débat américain

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Par Catherine TRIOMPHE - New York (AFP)
Publié le 08 juin 2018 - 10:25
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Une marche #MeToo, le 12 novembre 2017 à Hollywood, en Californie
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© Mark RALSTON / AFP/Archives
Une marche #MeToo, le 12 novembre 2017 à Hollywood, en Californie
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Un concours "Miss America" sans maillot de bain, des lois plus dures sur le harcèlement sexuel, un nombre record de femmes en lice aux élections: huit mois après les débuts de l'affaire Weinstein, la lame de fond du #MeToo poursuit sur sa lancée, omniprésente dans le débat américain.

Les premiers temps, le mouvement #MeToo s'était surtout traduit par la dénonciation d'une liste impressionnante d'hommes de pouvoir accusés d'abus sexuels, dans tous les secteurs professionnels, souvent poussés vers la sortie du jour au lendemain.

Début janvier, la naissance du mouvement Time's Up marquait une nouvelle étape. Les victimes d'abus sexuels passaient à l'action, s'épaulant pour attaquer en justice leurs agresseurs et élargissant leur combat à toutes les discriminations hommes-femmes, comme les écarts de salaires encore criants dans de nombreux secteurs.

Depuis, pas un jour ne passe sans que l'esprit #MeToo ne plane au-dessus de l'actualité américaine, poussant les hommes de tous milieux à un véritable examen de conscience.

Cette semaine, la puissante ligue de football américain, la NFL, a ainsi été priée de faire cesser l'exploitation des "pom-pom girls", ces acrobates en petite tenue dont il est apparu qu'elles étaient souvent payées une misère et traitées parfois comme de sulfureuses "hôtesses".

- "Misogynie institutionnalisée" -

La journaliste Gretchen Carlson, qui a repris en janvier la présidence du concours "Miss America", a aussi annoncé que les candidates ne seraient désormais plus jugées sur leur apparence physique. Fini les défilés en maillot de bain, images d'Epinal de ces concours de beauté.

Un coup porté à la "misogynie institutionnalisée" et une preuve de plus que "le mouvement #MeToo est en train de s'étendre et d'influencer toute une série de discussions et de pratiques", estime Timothy McCarthy, historien et professeur à la Kennedy School of Government de Harvard.

Bill Clinton en a fait l'expérience cette semaine, voyant la tournée de promotion de son premier roman piratée par le #MeToo. Il a été prié de réexaminer sa relation de 1995-96 avec la jeune stagiaire Monica Lewinsky - présentée alors comme scandaleuse mais pleinement consentie - à l'aune des abus de pouvoir exposés par le #MeToo.

Même la mort de Philip Roth fin mai a déclenché sur les réseaux sociaux une avalanche de commentaires sur la supposée misogynie de ce géant de la littérature américaine.

Au niveau législatif et politique aussi, #MeToo et Time's Up marquent des points.

Une dizaine d'Etats américains ont déjà réexaminé leur arsenal législatif sur le harcèlement sexuel. Certains ont interdit ou envisagent d'interdire aux employeurs d'imposer à leurs recrues ou aux employés sur le départ des clauses de confidentialité, qui empêchent les victimes d'abus sexuels de porter plainte publiquement.

Deux sénatrices, une démocrate et une républicaine, ont également présenté mardi un projet de loi en ce sens au niveau fédéral.

- L'héritage d'Hillary -

Les féministes espèrent aussi que l'élan du #MeToo permettra bientôt l'adoption d'un amendement à la Constitution américaine, qui graverait dans le marbre l'égalité des droits entre hommes et femmes.

Il ne manque désormais plus qu'un Etat pour que l'"Equal Rights Amendment", envisagé depuis les années 20, mais qui n'a jamais réuni la majorité nécessaire de 38 Etats, puisse être ratifié.

"Je crois que nous allons gagner et que nous aurons cet amendement dans les deux-trois ans", a indiqué à l'AFP Toni Van Pelt, présidente de la puissante National Organization of Women (NOW).

Selon elle, le #MeToo n'est "pas près de s'arrêter", surtout avec le nombre record de femmes en lice pour les élections de novembre 2018.

Cet élan féminin vers les urnes est néanmoins surtout l'apanage des démocrates, qui ont par ailleurs été aux racines du #MeToo.

Car près d'un an avant l'affaire Weinstein, la défaite d'Hillary Clinton, première femme candidate d'un grand parti à la présidence américaine, face à Donald Trump, critiqué pour des propos extrêmement vulgaires tenus envers les femmes, avait constitué "le premier catalyseur du mouvement", souligne Timothy McCarthy.

Défaite suivie par la "Marche des femmes", l'une des plus grandes manifestations qu'aient connue les Etats-Unis, au lendemain de l'investiture de M. Trump.

L'impact du #MeToo est-il pour autant garanti à long terme?

Le nombre croissant de femmes à des postes électifs "va faire une différence énorme dans les instances publiques et législatives", assure Toni Van Pelt.

L'historien McCarthy est plus réservé. "C'est une lutte de longue haleine", dit-il. "Elle bénéficie en ce moment d'un électrochoc (...) mais il faudra du temps pour que cette impulsion devienne la norme, la loi, et soit politiquement institutionnalisée".

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