La chirurgie de l'obésité a explosé, pas toujours pour le meilleur

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Par Brigitte CASTELNAU - Paris (AFP)
Publié le 14 février 2018 - 19:44
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Montage de photos le 1er avril 2016 montrant des personnes obèses à Los Angeles, Mexico et Manchester (de g à d)
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© Paul ELLIS / AFP/Archives
Montage de photos le 1er avril 2016 montrant des personnes obèses à Los Angeles, Mexico et Manchester (de g à d)
© Paul ELLIS / AFP/Archives

La chirurgie destinée à traiter les grands obèses a explosé en France en vingt ans, mais pas toujours dans les règles de l'art permettant d'assurer son bien-fondé et sa réussite.

Le nombre d'opérations est passé de 2.800 en 1997 à 59.300 en 2016, indique une étude de la Direction de la recherche des études de l'évaluation et des statistiques (Drees) du ministère de la Santé, publiée mercredi.

Ainsi, "en vingt ans, le nombre d'interventions a été multiplié par 21", notent les auteurs qui relèvent "une nette prédominance féminine" parmi les opérés (plus de 80%).

Le nombre de femmes opérées a bondi de 2.350 en 1997 à 47.600 en 2016, tandis que le nombre d'hommes passait de 450 à 11.700.

Aujourd'hui, la plupart des patients ont entre 25 et 54 ans (41,6 ans d'âge moyen en 2016).

Selon l'étude, les taux de recours à la chirurgie bariatrique, tous âges et pour les deux sexes, sont plus élevés en France que dans plusieurs autres pays, même ceux où l'obésité est plus fréquente.

En 2012, la prévalence de l'obésité dans la population française adulte (18 ans ou plus) était de 15,0%, et celle de l'obésité morbide de 1,2%. Aux États-Unis, ces taux atteignaient respectivement 34,9% et 6,4%. Or, en 2014, le nombre d'opérations de chirurgie bariatrique était de 8,4 pour 10.000 personnes en France, de 6,1 aux États-Unis, de 1,2 en Angleterre, et de 6,8 en Suède, un pays où ce taux diminue depuis 2011.

Le nombre élevé d'interventions en France pourrait s'expliquer par un meilleur accès aux soins, mais "aussi être le signe d'un suivi plus aléatoire des recommandations", écrivent les auteurs, Philippe Oberlin et Christine de Peretti, dans la revue de la Drees.

- Anneaux gastriques raréfiés -

La Haute autorité de Santé (HAS) constatait en décembre dernier "des résultats mitigés et très différents d'un établissement à l'autre, ne permettant pas de garantir à tous les patients la pertinence et la réussite de leur opération".

Pour trois patients sur dix, les examens préalables étaient insuffisants.

Ceux-ci "n'ont pas bénéficié à la fois d'un bilan de leurs comorbidités [leurs autres troubles], d'un bilan endoscopique et d'une évaluation psychologique, éléments minimaux indispensables pour s'assurer que l'opération est pertinente et qu'il n'y a pas de contre-indications métaboliques ou psychologiques", soulignait le régulateur.

Idéalement, l'opération doit faire l'objet d'une concertation entre spécialistes: chirurgien, endocrinologue, nutritionniste ou diététicien, psychiatre ou psychologue, etc. Or chez un patient sur cinq, rien de tel, notait encore la HAS.

La chirurgie bariatrique est une intervention lourde qui peut entraîner des complications et qui nécessite un suivi à vie.

Elle doit être réservée aux obésités "morbides" (indice de masse corporelle supérieur à 40), voire à celles avec un IMC de 35 ou plus en cas de complications graves dues à l'excès de poids, et après échec d'autres moyens, notamment diététiques.

Selon l'étude de la Drees, le secteur privé lucratif réalise 63% des opérations en 2016, contre 80% en 1997. Les 37% restants ont eu lieu dans des hôpitaux publics ou assimilés.

Les "sleeve gastrectomies" ou "gastrectomies en manchon", qui consistent à retirer environ les deux tiers de l'estomac en le réduisant à un tube, sont désormais les interventions les plus fréquentes (58,5% en 2016). Les anneaux gastriques, passés autour de l'estomac pour réduire sa taille, se sont raréfiés (moins de 4% des opérations en 2016, contre 53,6% en 2006).

En 2016, la chirurgie bariatrique était pratiquée dans 524 établissements en France.

Parmi les patients dont l'obésité indiqué n'est pas majeure (IMC inférieur à 40), l'étude relève que les comorbidités susceptibles d'être améliorées par la perte de poids (hypertension, diabète, apnée du sommeil...) n'étaient pas toujours mentionnées dans les dossiers informatiques.

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