Tinder : goûts intimes et fantasmes sexuels, l'application dresse des profils très précis de ses utilisateurs
La question des données personnelles collectées sur les différentes applications dont les consommateurs se servent est déjà sensible. Elle l'est d'autant plus lorsqu'elles sont à connotation intime. Et ce qu'a découvert, et publié mardi 26, une journaliste de The Guardian est pour le moins "angoissant". Inscrite en décembre 2013 sur le site de rencontres Tinder, elle a demandé à Match Group, la société qui exploite l'application permettant de mettre deux personnes géographiquement proches en contact, si les deux apprécient mutuellement leurs photos de profil, de lui communiquer l'ensemble des données personnelles recueillies.
Ces données sont collectées dans le cadre de l'acceptation faite par l'utilisateur des conditions générales de vente, ces nombreuses clauses qui se valident toutes en une fraction de seconde en cochant du doigt une case. Et depuis une directive européenne sur la protection des données, il est légal pour tout citoyen européen de se faire remettre par les éditeurs d'applications ce genre d'informations.
La découverte pour la journaliste est terrifiante tant les données collectées sont précises… et très privées. En un peu moins de quatre ans, l'utilisatrice a envoyé 1.700 messages sur Tinder, a décliné 920 profils et a fait part de son intérêt pour 820 autres. Cela a suffi à l'entreprise pour lui communiquer par moins de 800 pages de données la concernant. Absolument tous ses échanges ont été conservés par Match Group qui a traité ces données pour en tirer un profil. Et, eu égard de la finalité de Tinder (la rencontre amoureuse, avec une dimension éphémère assumée), le bilan était particulièrement "privé".
La journaliste a vu s'étaler au gré des pages ses déplacements, ses goûts culturels tels qu'elle les a évoqués au gré des discussions, mais surtout ses goûts sexuels en fonction de l'ethnie à laquelle appartenait ou non les profils "matchés" (appréciés par l'utilisatrice) et ses fantasmes érotiques en fonction des messages échangés, dont le contenu est traité par des algorithmes.
La démarche de Tinder est parfaitement légale. Elle propose en effet une utilisation gratuite des fonctions principales de son application en échange de la mise à disposition de ses données, avec donc l'accord (parfois rapide…) des consommateurs. Match Group se sert ensuite de ces données pour proposer des publicités ciblées, sa source de revenus.
Tinder, contacté par The Guardian, explique aussi que la collecte des données permet d'améliorer la prise en main pour les utilisateurs de l'application qui se voient ainsi proposer des profils correspondant le mieux à ce que fait ressortir leurs données. Le site Fast Company avait d'ailleurs démontré dans une enquête (ici, en anglais) en 2016 que les utilisateurs de Tinder recevaient une note appelée "Elo score" (en référence au monde des échecs qui utilise le "classement" Elo) jugeant leur attractivité (comprenez sexuelle) selon un algorithme que l'entreprise ne dévoile pas. Le but est d'assurer au maximum que les personnes les plus séduisantes se voient proposer les meilleurs profils selon des critères flous, ne reposant pas uniquement sur le nombre de "likes"… sans que l'on en sache plus.
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