À quoi diable Adèle s’attelle-t-elle  ? Censure, contrôle éditorial avec l'argent public ?

Auteur(s)
Xavier Azalbert, France-Soir
Publié le 23 avril 2024 - 09:00
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Adele van Reeth
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Radio France/Christophe Abramowitz, Capture Ecran FranceTV, France-Soir
À quoi diable Adèle s’attelle-t-elle ? Censure, contrôle éditorial avec l'argent public ?
Radio France/Christophe Abramowitz, Capture Ecran FranceTV, France-Soir

M'a-t-on dit hier, en voyant l’extrait de #Cmediatique, émission hebdomadaire de France-Inter (1) : 


L'Adèle en question, c'est Adèle Van Reeth (« rite »). Et selon certains, cette Reeth irrite et mérite qu'elle hérite ici d'un petit recadrage.

D'ordinaire, je ne cède jamais à la pression, excepté à la 1664, où là, je l'avoue, j'ai très vite tendance à lâcher prise, peu habitué que je suis à boire de l'alcool. Cependant, étant donné que vous êtes nombreux à m'avoir demandé de prendre la parole à ce sujet afin d’analyser et recadrer les propos de cette dame, je me dois de m'y coller.

Adèle est un prénom d'origine allemande. « Yawohl ! » Officiellement, il fait allusion à la noblesse de l'âme et symbolise avant tout la générosité et la distinction morale. Ah mince ! Donc visiblement, il y a des exceptions. Non parce que, ça a beau être le 24 décembre au soir qu'on fête les Adèle, celle-ci, paraît-il, ce n'est pas un cadeau. Néanmoins, neutralité journalistique oblige, bornons-nous à analyser les faits avec objectivité.

Imposons-nous de fournir une analyse impartiale, à partir de la réponse « la » question qui s'impose : « Qu'a-t-elle dit exactement, Adèle Van Reeth, à cette occasion ? », « Était-elle dans son état normal ? ». Je vais commencer par la seconde question. Pourquoi ? Parce que répondre à cette seconde question, je dois m'abstenir.  En effet, ne connaissant pas l'intéressée personnellement - et vous m'en voyez absolument ravi ! -, je ne peux apporter de réponse autre que « au pif. »  Or, si je donne une réponse « au pif », on va dire que je l'ai dans le nez.  

Et j'insiste : tel n'est pas le cas. Et puis, comme dirait mon ami Félix : « J'ai d'autres chats à fouetter ! » (2)

À l'inverse, ayant pris soin de regarder la vidéo incriminée, je peux répondre à la première question. Et donc je le fais.

Voici mots pour « maux » ce qu'Adèle Van Reeth a dit dans cette vidéo, à savoir avec ses hésitations, son lapsus révélateur et les « euh » qu'elle a pondus :

« Nous avons. Il y a certaines valeurs, qui sont toutes au service de l'intérêt général, puisque nous sommes une radio publique. Donc, on se doit de servir l'intérêt général.

Dans le cadre de cette mission, euh, nous avons choisi - mais c'est Radio-France ! - heu... en ce qui concerne par exemple le réchauffement climatique et la cause écologique, heu... de ne pas donner la personne. La parole ! pardon.

À des personnes qui contesteraient le fait même du réchauffement climatique.

C'est un engagement. C'est un engagement de Radio-France, heu, au nom d'une-d'une-d'une valeur, qui est, qui est à la hauteur de la mission qu'on doit accomplir.

Il n'y a pas de blacklisting de personnes en particulier.* Ça serait à eux-mêmes de penser que ça serait le cas.

Par ailleurs, ces polémiques ; pour le coup c'est-c'est-c'est devenu mon quotidien ; sont complètement déconnectées de la manière que nous avons de faire de la radio, et tout le monde est le bienvenu sur France-Inter. »

* et sa collègue qui l'accompagnait, a dit ceci à ce moment précis : « Je pense qu'on a pris les mêmes précautions pendant le covid. Évidemment ! »

 

Les faits, les valeurs dont celle du service public

Bon, déjà, vous l'avez entendu : ce n'est pas elle qui a pris cette décision de ne pas donner la parole aux personnes qui contestent le fait même du réchauffement climatique. Non. Elle n'y est pour rien. C'est Radio-France, à savoir Sibyle Veil la présidente depuis 2018. Radio-France dont les valeurs incluent l’indépendance comme il est écrit sur son site internet où l’on peut lire : 

« Nous garantissons la liberté d’expression et le pluralisme des courants de pensée et d’opinion… En interne, nous veillons à la liberté rédactionnelle de nos équipes, et encourageons leur créativité dans le respect des différences. Chacun est libre d’affirmer sa liberté d’opinion, d’expression et de création. »

Il n’y a donc aucun courant de pensée majoritaire ou minoritaire qui ne soit proscrit. Il ne viendrait donc pas à l’esprit de prendre parti dans le conflit au Moyen-Orient pour une minorité au détriment d’une autre, ou en fonction de la majorité ou du consensus imposé par la masse. Si tel était le cas, on verrait les gens s’affronter sur les courants de pensées minoritaires, représentés par Israël, dont il faut protéger à tout prix l’existence par devoir de mémoire. Cependant, ne deviendrait-il pas inacceptable de censurer le fait que la réplique d’Israël, sur les Gazaouis, est « quelque peu » disproportionnée (pour ne pas dire « totalement »), et mérite ainsi condamnation pour atteinte aux intérêts d’une population ?  N’est-ce pas cela l’équité de traitement de l’information, et l’impartialité qui est un devoir du journalisme ?

Alors oui à la parité, oui à la représentativité de tous les courants de pensée, mais comment peut-on alors en arriver à censurer certaines positions ? Notamment des positions scientifiques. Surtout quand on connaît la jurisprudence Hertel :

« Peu importe que l’opinion dont il s’agit est minoritaire, et qu’elle peut sembler dénuée de fondement : dans un domaine où la certitude est improbable, il serait particulièrement excessif de limiter la liberté d’expression à l’exposé des seules idées généralement admises ». (CEDH, 25 août 1998, Hertel/Suisse, §50).

Il est de plus intéressant de se replonger dans les spécificités du service public en matière radiophonique décrite de manière extensive par Christophe Deleu. Madame Van Reeth, je vous invite à relire ce propos. On n’y lit pas "le concept de censure des idées minoritaires."

Au même titre, je vous invite à relire l’article de Didier Perrot : « radio et propagande : le trafic d’influence psychologique ». Il permet de prendre réellement conscience de l’impact qu'à une prise de position propagandiste sur une audience, et rappelle la définition de Jacques Ellul de 1962 : 

« La propagande est l’ensemble des méthodes utilisées par un groupe organisé en vue de faire participer, activement ou passivement à son action, une masse d’individus psychologiquement unifiés par des manipulations psychologiques et encadrés dans une organisation. »

Et pour finir, je vous invite à prendre connaissance de l’article de notre confrère Mathieu Bock-Coté : « quand la radio publique appelle à la censure ». 

Il y évoque les dérives idéologiques de certains  

« qui cherchent à s’instituer à la manière d’un commissaire politique du régime diversitaire en se posant comme trieuse officielle entre discours légitimes et illégitimes » et écrit « Le pluralisme démocratique repose sur une idée fondamentale : aucune famille de pensée n’a le monopole du vrai, du juste et bien. Aucune famille de pensée n’a non plus le monopole sur la définition de la réalité, qui déborde de toutes les grilles sociologiques dans lesquelles on veut l’enfermer. » 

 

Revenons au vôtre, de propos

Balancer Radio-France et votre patronne, pour justifier votre propos et son positionnement, sans étayer cela par des faits, cela rappelle les heures sombres de Radio-Paris.

Nous en resterons là, néanmoins, même s’il serait plus judicieux d’en informer directement Raphaël Enthoven.

En outre, si on vous suit, il faudrait également incriminer les neuf membres de l'Arcom,  notamment Roch-Olivier Maistre, son Président, et Guillaume Blanchot, qui vient d'être reconduit directeur général.

Pire ! Le Président de l'Arcom ayant été désigné par le président de la République, et ses huit autres membres l'ayant été par le Président de l'Assemblée nationale (trois), le Président du Sénat (trois), et les deux derniers (un chacun) par le vice-président du Conseil d'état et par la Première Président de la Cour de cassation, vous jetez pareillement le discrédit public sur les plus hauts responsables politiques de l'état.

Et puis surtout, vous dites tout et n'importe quoi. Son contraire tout particulièrement.

Par exemple, d'abord vous dites que France-Inter « ne donnera pas la parole à certaines personnes », et ensuite, vous dites "qu'il n'y a pas de blacklisting de personnes en particulier".

Ah ça ! « Plus antinomique que moi, tu meurs ! » pourrait tout à fait être votre slogan.

Et, pour completer, vous dites que « Tout le monde est le bienvenu sur France-Inter. »

Ah non ! Pardon. Je viens de comprendre.

Quand vous dites que « Tout le monde est le bienvenu sur France-Inter. », vous parlez du public. Ok. Autant pour moi.

Par contre, à propos des polémiques dont vous faites état à la fin, là, désolé, vous faites à nouveau dans l'oxymore.

Alors que ces polémiques consistent à affirmer que la façon que France-Inter a de faire de la radio, vous le dites vous-même, c'est « de pas donner la parole à certaines personnes » ; c'est-à-dire que, pour ce qui est donc des orateurs, ce n'est pas « tout le monde » qui est le bienvenu sur France-Inter ; vous dites ensuite, en guise de finish - je le répète exprès - que « tout le monde » est le bienvenu sur France-Inter.

Je-Je-Je... Ah non ! Mince ! Là aussi, je viens de comprendre.

Ce « tout le monde » dont vous parlez, c'est « Monsieur tout le monde » : le citoyen lambda. L'auditeur type de France-Inter, plus exactement, en tout cas celui que vous semblez considérer comme tel. À savoir les Français et autres, qui avalent la propagande officielle sans réfléchir, quelque soit le fort arrière-goût de menterie hautement toxique qu'elle peut avoir, lorsque les messages de la Haute administration (Kommandantur) sont relayés par certains kapos, sur un ton à ce point belliqueux, que cela fait passer l'Inquisition et ses exécutions publiques, pour blasphème ou hérésie, en ces temps bénis qui naguère étaient ceux de la liberté d'expression.

Et puisque nous en sommes arrivés à parler de foi, voici, Adèle, des titres de la chanteuse « Adèle », une femme très pieuse, qui semblent pouvoir fidèlement illustrer vos propos :

« Sweetest devotion » : dévotion la plus douce. Mais une dévotion à qui ? À Dieu ou son opposé ? Remarquez : on s'en fiche. Le Diable est le Dieu de celui qui lui a voué son âme. Et vice et versa.

« Many shades of black » : beaucoup de nuances de noir. Et diable qu'il y en a dans votre discours !

« Tired » : fatiguée. C'est vrai que vous paraissez l'être. Physiquement, je veux dire. Intellectuellement je me l'interdis. Le manque de sommeil, peut-être ? Est-ce facile de trouver le sommeil quand on sait qu'on n'œuvre pas pour la vérité, mais contre elle ?

« Remedy » : le remède. Celui contre les mensonges de la propagande officielle, c'est la vérité, justement. Celle au service de laquelle le service public devrait être, en théorie, étant donné, madame, que l'intérêt général ne peut être servi que par la vérité, aucunement par le mensonge. L'anti-vérité dont vous faites usage est l'apanage des despotes. Joseph Goebbels en fut l'apogée suprême, croyait-on. C'était avant la crise covid.

À moins que, pour vous, servir l'intérêt général consiste à nuire aux intérêts des 99% de personnes qui composent la population, pour servir les intérêts du 1% qui eux constituent l'autoproclamée « élite » : des individus qui tirent les ficelles en coulisses, dont les intérêts privés sont complètement à l'opposé de l'intérêt public et des intérêts privés du français moyen. Le citoyen de base, les 99% qui constituent le gros du troupeau. Les « mougeons », ces braves gens, « mi-moutons, mi-pigeons », que vous avez décrits comme étant ceux pour qui France-Inter, contribue à faire en sorte qu'ils finissent par être demandeurs pour se faire tondre et plumer. 

N'est-ce pas le devoir du service public de leur hurler de faire attention, de ne pas se laisser conduire aveuglément à l'abattoir ? Dans une version inversée du « Joueur de flûte d'Hamelin »(3), vous leur jouez du pipeau. Et au lieu de contribuer à sauver les braves gens des rats, en conduisant les porteurs de la peste propagandiste des fausses vérités  à la noyade, vous pigeonnez les moutons. Vous aidez à ce qu'ils soient asservies aux vrais mensonges et ainsi qu'ils se rendent d'eux-mêmes à l'abattoir. Revenant ainsi à l’analyse du trafic d’influence psychologique expliqué par Didier Perrot.

Faisant cela, Adèle, vous collez perfidement à cet autre titre d'Adèle « Rolling in the deep » : « Rouler dans les profondeurs. » Celle de l’obscurantisme et du relativisme diabolique, effectivement.

Au fait, puisque vous parliez de climat et de cause écologique, en Sciences, « la charge de la preuve incombe à celui qui affirme ».  Tout prendrait donc bon sens, si la preuve des propos, que vous défendez, était donnée.

Sur le climat, les experts ne sont pas tous d’accord, 1900 d'entre-eux déclarent même "qu'il n'y a pas d'urgence climatique". Alors au risque de rappeler la jurisprudence Hertel sur les opinions minoritaires en science, c’est donc bien aux médias de défendre et garantir que les opinions minoritaires puissent exister.  

Il  suffit de regarder les erreurs répétées dans la gestion de la crise sanitaire. Ces erreurs génèrent une perte de confiance croissante des Français, dans la parole publique, l’autorité gouvernemental et des médias subventionnés. Ils attendent des preuves. De vraies preuves, dont la définition est simple :

« Élément matériel qui démontre, établit, prouve la vérité ou la réalité d'une situation de fait ou de droit. »

Ne voyant pas ces preuves venir, un sentiment contraire au principe du droit se renforce, c'est-à-dire précisément l’inversion de la charge de la preuve.

Apporter des preuves, c'est pourtant bien cela que devraient permettre les médias.

Si vous voulez en débattre, je vous invite bien volontiers au défi de la vérité de France-Soir.

Les questions fondamentales seront celles-ci :

« Quel est le rôle de la radio publique ? » 
et 
« Quel est le régime d’un pays dont la radio publique ne respecte pas la jurisprudence Hertel en ne tolérant qu’un seul courant de pensée ? »

A défaut, il vous faudra démissionner car le rôle du service public est bien de défendre l'intérêt général et de s'assurer de la représentativité non discriminatoire de tous les courants de pensée.   

 

(1) pour ceux qui ont des problèmes de transit d'information, qui souffrent de constipation conspirationnelle « chroniques », l'émission « Cmédiatique », c'est tous les dimanches midi, sur France-Inter. 

(2) il n'est pas journaliste, mon ami Félix qui donc a « d'autres chats à fouetter », mais maître-chien, et lui aussi est accaparé par son travail.

(3) Légende allemande retranscrite dans le conte des frères Grimm

 

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