Au-dessous du volcan
TRIBUNE - Sans doute sous le coup de l’émotion déclenchée par le nombre officiel des manifestants anti «pass» dans la journée de samedi 7 août, Monsieur Véran a eu un mot bien malheureux. Le « magma », a-t-il dit, pour décrire la foule qui s’est mobilisée ce jour-là contre les diktats de son gouvernement dans toute la France.
Il a cru, le pauvre, faire un bon mot, car si on cite le Larousse, on trouve en premier lieu cette première définition de magma : « Mélange formant une masse pâteuse, épaisse » En allant plus loin, on peut lire une seconde définition : « Mélange confus, inextricable de choses abstraites».
Si nous nous arrêtions là, bien sûr, nous serions fondés à nous indigner devant ce que M.Véran a essayé de faire, c’est-à-dire:
1. insulter les opposants à sa politique,
2. les dépersonnaliser en les comparant à une masse informe et donc, sans importance et non humaine,
3. mettre les rieurs de son côté.
Lorsque j’ai lu ses propos, j’avoue que je suis tout d’abord tombée dans le panneau, ne gardant du mot « magma » que le sens péjoratif que M.Véran entendait lui donner.
C’est alors que mon époux, géologue amateur et féru de vulcanologie m’a interpellée : « Mais Marilis, tu connais pourtant le sens premier du mot « magma » ! Alors, réfléchis : c’est plutôt un compliment, non ? »
Effectivement. Le magma est la matière qui est à l’origine de la lave. La lave, c’est ce qui jaillit d’un volcan en éruption, à une température pouvant aller jusqu’à 1200°, transformant à jamais tout ce sur quoi elle passe. La lave, c’est ce merveilleux sang de la terre qui, une fois refroidi, nourrit le sol des minéraux qu’elle a puisés dans les entrailles de notre belle planète, permettant l’éclosion d’une flore, puis d’une faune nouvelle. La lave se répand, purifie par le feu ce qu’on croyait impurifiable, puis donne la vie à quelque chose d’autre, quelque chose de neuf.
Monsieur Véran devrait lire attentivement les discours qu’écrivent pour lui les membres de son personnel, avant de les livrer à la presse. Il devrait faire particulièrement attention aux mots qu’il emploie si imprudemment, car en tentant d’insulter ceux qui lui tiennent tête, il vient de leur rendre le plus bel hommage qui soit en leur révélant par ce lapsus qu’il n’est que trop conscient de leur puissance – bien qu’il le nie avec toute l’énergie qui lui reste.
Ayant fait tout ce qu’il fallait pour provoquer l’éruption du volcan, il reste assis juste en-dessous, espérant contre toute probabilité (ce qui n’est vraiment pas scientifique, vous en conviendrez) ne pas être balayé par le flot tranquille et inexorable de la lave en fusion qui provient du magma.
Marilis Valo est écrivain.
Voir aussi : L'été des résistants : des grandes villes aux bourgades, on manifeste pour la liberté
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