La société libérale contre les libertés
TRIBUNE — Pour nous maintenant il n’y a qu’une guerre : celle de la vérité. (Albert Camus, Combat, 1944)
Résumé : Ni la dramatisation de la gestion de la crise sanitaire, ni une information sélective durable, ni un matraquage médiatique apocalyptique, ni l’hypocondrie de populations européennes vieillissantes, ni la servitude volontaire, qui n’est pas le privilège d’un ancien régime théocratique ou autocratique comme l’expérience de Milgram en a fait la preuve, ne suffisent à expliquer la démission des élites intellectuelles et de l’opinion publique des pays démocratiques face à des politiques sanitaires invasives qui traitent les citoyens comme des mineurs, incapables de se diriger par eux-mêmes une fois honnêtement informés. Seule la contradiction nichée au coeur de nos constitutions libérales est en mesure d’expliquer l’ampleur de l’affaissement immunitaire des pays dits « libres » face aux tendances despotiques du législateur. Dans le cas français, l’analyse de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen le révèle, qui autorise les représentants du Peuple à vider de leur sens sous sa barbe « les droits sacrés et inaliénables de l’Homme » - en les transformant en droits à géométrie variable au gré des caprices d’un législateur sans réel contrôle. La validation par le Conseil constitutionnel de la loi instituant le passe sanitaire n’est que l’exemple le plus récent et le plus frappant de l’actualisation du « despotisme légal » que le Constituant révolutionnaire libéral a caché dans le préambule de la Constitution comme une bombe à retardement contre les libertés. Si les sociétés libérales ont permis aux représentants du peuple de confisquer par la loi les droits « naturels et imprescriptibles » des Citoyens du Peuple Souverain à peine institué, en faisant de cette soumission à la représentation nationale une véritable culture politique - celle de l’inoculation permanente à la société civile du bacille de l’abus de pouvoir - c’est donc ailleurs qu’il est urgent d’aller chercher les ressources permettant de résister aux transgressions de ces droits par la loi et de défendre bec et ongles et réveiller les libertés inhérentes au pacte démocratique – fondé, tout comme le suffrage universel, sur des consciences humaines libres. La Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1793, soigneusement enterrée par des pouvoirs despotiques successifs ayant force de loi, et malencontreusement oubliée par quatre « Républiques » sur cinq, joue ici un rôle prophétique en offrant aux contemporains, face à une vague inacceptable d’actes légaux illégitimes et liberticides, l’occasion de parachever une oeuvre révolutionnaire inauguralement viciée.
Comment a-t-on pu en arriver à ce qu’une société libérale congédie du jour au lendemain tant de libertés jugées hier encore fondamentales et consubstantielles à notre démocratie par le biais de politiques sanitaires devenues soudainement aussi invasives que disproportionnées par rapport à la gravité objective de l’épidémie de Covid-19, telle qu’elle est mesurable par sa mortalité et sa létalité - et non certes par son audimat ? [1] Comment se fait-il que soit simplement toléré le mépris dans lequel est tenu le citoyen à qui les autorités sanitaires appliquent depuis deux ans un régime de « curatelle renforcée », au lieu de tabler, comme de rares pays sauvant l’honneur de la démocratie l’ont fait, sur le fait qu’un citoyen bien informé soucieux de sa santé et de celle de ses proches saura faire ce qu’il est bon de faire sans la menace de sanctions dignes de Guignol ? Pour le comprendre il est nécessaire de dépasser l’actualité épidémique et de faire retour sur les vices cachés des régimes démocratiques qui les compromettent au moment même où les droits qui nous semblent les fonder deviennent les plus indispensables.
L’alarmisme médical, gouvernemental et médiatique qui prévaut depuis début 2020, propice à la suspension du jugement personnel des citoyens, combiné avec une information systématiquement sélective qui ne se dément pas, ne suffisent pas à rendre compte de ce grand écart entre la théorie et la pratique démocratiques. Comment serait-il en effet possible qu’une telle situation puisse perdurer aussi facilement sans susciter une levée de boucliers des intellectuels, en particulier des juristes publicistes ou spécialistes du droit médical et de santé publique, de l’opinion publique éclairée, des corps intermédiaires, de la presse écrite ? Sans que les courants et hommes politiques qui se réclament explicitement du libéralisme ne s’étonnent que la politique sanitaire soit décidée dans le cadre d’un « conseil de défense » (qui paraît légitimer l’hypothèse d’un complot ennemi à la source de la propagation), ne protestent autrement que du bout des lèvres contre les restrictions, les contrôles d’identité, les sanctions financières et pénales, quand ils osent même le faire - sans parler de ceux qui appellent à la surenchère des contraintes et à une vaccination obligatoire, parmi lesquels les écologistes (sic) ?
Serait-ce simplement dû à la disparition de ces grandes figures libérales « statues du Commandeur » qu’étaient Raymond Aron, Jean-François Revel ou René Rémond qui savaient calmer des emballements médiatiques à l’aide de prises de parole individuelles ou collectives faisant autorité ? Ou bien devrions-nous rattacher cette étonnante passivité (auxquelles les nombreuses et récurrentes manifestations durant la période des vacances 2021 font exception !) à l’hypocondrie de populations occidentales vieillissantes et égrotantes ? Tous ces facteurs jouent bien entendu un rôle important dans cette léthargie statistique des peuples souverains, en particulier de celui de la patrie revendiquée des libertés, mais ils ne suffisent pas à expliquer cette abdication devant ce coup de force permanent contre les libertés publiques et privées qui a pris droit de cité sans vergogne et qui aboutit même à une surenchère décomplexée des États pour savoir qui ira le plus loin dans l’atteinte aux libertés fondamentales des populations et obtiendra la médaille d’or des « monstres froids ».
Devant ce raz de marée durable de la servitude volontaire des nations démocratiques, qui eût sans doute désarçonné Etienne La Boétie, il faut se rendre à l’évidence : le déficit de défense de la liberté par les libéraux ne peut pas s’analyser comme une défaillance ponctuelle et circonstancielle d’une société libérale prise au dépourvu par un virus particulièrement malveillant, ni comme une éclipse passagère de l’attachement des populations des pays libres à leurs libertés fondamentales. Un formatage préexiste. Nous soutenons ici l’hypothèse paradoxale selon laquelle ce déficit, de retenue du côté du pouvoir et de résistance du côté de la population, loin d’être une transgression flagrante du libéralisme politique, socle consensuel des démocraties parlementaires censées s’opposer aux démocraties populaires (dont le nom seul a vieilli) lui est inhérent : les frères ennemis rappellent tout d’un coup leur fraternité à notre bon souvenir et invitent les peuples des pays qui se disent libres à un examen de conscience. Les différences de régime politique inculquées comme des différences de nature ne sont-elles pas en fait de simples différences de degré – et l’Ouest laissé à lui-même ne doit-il pas s’inspirer des stratégies de dissidence de l’Est européen ? Si nous privilégions naturellement l’étude du vice caché dans la tradition démocratique française, nos conclusions valent mutatis mutandis pour tout pays démocratique susceptible de déviance autoritaire : rappelons-nous que c’est pour défendre les droits constitutionnels des Etats-Uniens qu’Edgar Snowden a dû se réfugier à Moscou et que cette date de juin 2013 compte symboliquement autant dans l’histoire de l’Occident que celle de la Chute du Mur de Berlin ou de l’attentat terroriste contre les Tours Jumelles. Elle signifie le moment où l’Ouest rejoint en droit l’Est dans la persécution d’un défenseur archétypique des droits du citoyen américain et au-delà au nom de la sécurité nationale.
Le penchant autoritaire du libéralisme ne lui est contradictoire qu’en apparence, textuellement et historiquement. Le préambule de la constitution française de 1958, dont l’emblématique Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen du 26 août 1789 (DDHC) est le noyau dur, le cœur libéral de notre constitution, en apporte une preuve difficilement discutable sans qu’il soit besoin de forcer le trait. Elle est en effet explicitement antinomique sur le sujet des libertés fondamentales si l’on y regarde de plus près, son article IV reprenant subtilement d’une main ce que l’autre main paraît avoir accordé dans l’article II. Dans cette optique la décision du Conseil constitutionnel du 5 août 2021, qui en a surpris plus d’un en validant des transgressions légales des libertés publiques et privées que le citoyen ordinaire pouvait avoir la faiblesse de considérer comme intangibles, se situe dans le droit fil de cette antinomie inaugurale et constitutionnelle dont découle le chèque en blanc accordé au pouvoir législatif, c’est-à-dire en réalité au pouvoir tout court, que l’on appelle à tort exécutif, puisque c’est lui qui décide, légifère et ordonne, après avoir investi et fait élire ses « députés ».
La DDHC, fondement libéral de notre Constitution, vide immédiatement de leur sens les droits de l’homme et du citoyen proclamés par les représentants du peuple
Forte de son préambule selon lequel : « Les Représentants du Peuple Français, constitués en Assemblée Nationale, considérant que l'ignorance, l'oubli ou le mépris des droits de l'Homme sont les seules causes des malheurs publics et de la corruption des Gouvernements, ont résolu d'exposer, dans une Déclaration solennelle, les droits naturels, inaliénables et sacrés de l'Homme », la DDHC de 1789, énonce dans son article II que : « Le but de toute association politique est la conservation des droits naturels et imprescriptibles de l’homme. Ces droits sont : la liberté, la propriété, la sûreté et la résistance à l’oppression ». C’est à cette notion de droits de « l’Homme, inaliénables et sacrés » supérieurs et transcendants à toute forme et à toute majorité politiques que le citoyen est attaché, parce qu’ils constituent la spécificité même du régime démocratique, même si la short list de ces droits énoncé à la fin l’article II ne lui vient pas spontanément à l’esprit. On notera en particulier que ni l’égalité ni la justice n’y figurent, même si l’égalité est présente dans la DDHC dès l’article I : « Les hommes naissent libres et égaux en droit » et, quoique de manière sous-jacente, dans l’article IV. La liberté y est première. D’où l’importance de ce que l’on met sous le concept de liberté, de sa définition [2].
C’est l’article IV de la DDHC qui définit la liberté à la façon universaliste de cette déclaration selon la formule que nous avons tous gardée à l’esprit : « La liberté consiste à faire tout ce que ne nuit pas à autrui : ainsi, l’exercice des droits naturels de chaque homme n’a de bornes que celles qui assurent aux autres Membres de la Société la jouissance de ces mêmes droits ». [3] Magnifique formule creuse à l’ombre de laquelle s’accomplit le tour de prestidigitation où le citoyen se fait à son insu confisquer potentiellement tous les droits que la DDHC vient de lui reconnaître. En deux temps comme dans tout bon tour de magie.
Par une définition sans consistance de la liberté que donne le début de l’article IV dans un premier temps. La beauté de cette définition laconique de la liberté et de ses limites ne parvient en effet pas à en dissimuler ni le vide substantiel, ni l’importance des restrictions dont elle peut faire l’objet sous réserve qu’elles soient également partagées. Alors même qu’elle paraît ouvrir un champ infini à la liberté première de l’individu, par rapport à l’entrelacs de règlements et d’interdits, mais aussi de protections, dans laquelle la société corporatiste d’ancien régime l’enserrait et qui faisait que chacun n’était libre de faire que ce qui lui était autorisé à la place qui était la sienne, elle ne lui ouvre en fait qu’un champ indéfini. Car une définition purement formaliste et négative de la liberté revient à une sorte de leurre, que nous découvrons dans ces « derniers temps ». Si chacun paraît libre de faire tout ce qui n’est pas explicitement interdit, le champ du possible est en fait miné d’interdits potentiels susceptibles de se révéler a posteriori plus menaçants pour sa liberté concrète que ne l’était le régime ancien de l’autorisation préalable, elle-même en partie implicite et moins étouffante que son énoncé ne le laisse paraître du fait des usages. De nombreuses questions surgissent immédiatement face à cette définition esthétiquement séduisante de la liberté : où commence exactement la nuisance à autrui et où concrètement s’arrête ma liberté ? A quel moment ma liberté commence-t-elle à empiéter sur celle d’autrui ? Qui décide de la nuisance entre lui et moi. Il suffit de prendre l’exemple de la liberté d’expression pour voir à quel point les réponses à ces questions ne vont pas de soi et à quel point le champ de la liberté est miné sans que, de bonne foi, nous le reconnaissions : les caricatures de Mahomet font évidemment partie de la liberté d’expression pour beaucoup comme l’a manifestement indiqué le mouvement occidental « Je suis Charlie » (en écho au fameux « Ich bin ein Berliner » de John F. Kennedy protestant contre l’érection du « mur de la honte » à Berlin en 1961). Après l’attentat parisien contre la rédaction de Charlie Hebdo en janvier 2015, nombre de dessinateurs ont ridiculisé l’idée que les crayons des caricaturistes puissent être considérés comme des armes et blesser des musulmans (comme s’il n’y avait chez les hommes que les blessures corporelles qui comptaient). On pourrait dire de même des discours… Mais à cette aune, pourquoi condamner les caricatures de juifs, qui ont fait les délices de la propagande antisémite d’hier et d’aujourd’hui sous d’autres cieux, ou les caricatures à caractère raciste ? [4]
La définition de la liberté comme s’arrêtant là où commence celle d’autrui est même une bombe à retardement contre les libertés concrètes de chacun comme l’a bien remarqué Jean-Claude Michéa pour qui elle « implique, d’une manière ou d’une autre, l’interdiction progressive de tout ce qui est supposé « nuire à autrui », selon les canons définis par les rapports de force du moment. Et comme n’importe quelle prise de position politique, religieuse ou morale (ou sanitaire, ajouterons-nous), suppose, si elle est cohérente, la critique des positions adverses, elle sera toujours, en droit, suspecte de nourrir une « phobie » (consciente ou inconsciente) à leur endroit. La phobo-phobie libérale (la « phobie » de tous les propos susceptibles de nuire à autrui…) ne peut donc aboutir qu’à la disparition progressive de tout débat politique sérieux, et, à terme, à l’extinction graduelle de la liberté d’expression elle-même, quelle qu’ait été au départ l’intention des pouvoirs libéraux. » [5]
Cette indéfinition de la liberté individuelle débouche donc sur un nœud d’interrogations insolubles quant à son étendue concrète qui l’enserre à la manière d’un nœud coulant et font potentiellement de ces « droits naturels et imprescriptibles de l’homme » qui en imposent à première vue des droits à géométrie variable. Elle est même compatible avec le degré zéro de la liberté individuelle pourvu que le garrot à la liberté d’autrui soit aussi serré que le mien – ici ressurgit la passion égalitaire celtique. Entre la proclamation de la liberté comme un droit naturel et imprescriptible de l’homme et du citoyen et la délégation à un législateur de circonstance du droit de délimiter discrétionnairement son étendue, il existe donc une véritable antinomie, une contradictio in terminis et par conséquent, dans les choses elles-mêmes.
Ce nœud gordien le Constituant de 1789 l’a tranché à sa manière à la fin du même article IV qui règle le problème de l’indéfinissabilité a priori de la liberté individuelle, dans son contenu comme dans son contour, indiscutable d’ailleurs, en s’en débarrassant et en « bottant en touche » vers le législateur : « Ces bornes (à l’exercice des droits naturels de chacun) ne peuvent être déterminées que par la Loi » (in cauda venenum). C’est le deuxième temps, décisif, de la confiscation potentielle des droits de l’homme proclamés « naturels et imprescriptibles » qui découle directement du premier. Après le flou tombe le couperet. La précaution apparente de l’article V de la DDHC selon lequel : « La Loi n’a le droit de défendre que les actions nuisibles à la société », purement redondante et circulaire, ne réduit en rien le risque d’arbitraire légal du précédent article. Le deus ex machina que le Constituant sort du chapeau pour sauver les apparences et surmonter l’aporie de l’indéfinition (a priori) de la liberté ouvre bien la boîte de Pandore des restrictions arbitraires légales. Une telle issue de l’aporie de la liberté ne pouvait que réjouir le physiocrate libéral Mercier de La Rivière, qui en appelait au « despotisme légal », dont le député de l’Indre André Laignel a plus récemment donné une définition sans appel dans sa fameuse apostrophe à l’ancien Garde des Sceaux Jean Foyer après la victoire de la gauche en 1981 : « Vous avez juridiquement tort parce que vous êtes politiquement minoritaire », formulation indépassable du despotisme majoritaire, qui n’est pas loin, conceptuellement, du concept « bolchevik » de « dictature du prolétariat » de Lénine (bolchevik signifiant d’ailleurs majoritaire). C’est bien une telle accusation de « bolchévisme libéral » qui viendra à l’esprit de l’ancien Premier Ministre (libéral d’ailleurs) polonais Bronislaw Geremek face à l’approche réformatrice dogmatique de ses épigones. On remarquera en effet que si les bornes de la liberté de chacun « ne peuvent être déterminées que par la loi » le Constituant libéral s’est bien gardé d’en fixer une quelconque au législateur - autre que purement rhétorique. Et voici comment une déclaration libérale des droits de l’homme siérait parfaitement à la Constitution d’un Etat totalitaire
Ainsi donc les Représentants du Peuple constitués en Assemblée nationale confient à la sagesse de leurs successeurs, qui historiquement formeront l’Assemblée législative de 1791, le soin de définir in concreto et selon les circonstances les limites effectives de la liberté individuelle, sans prévoir à cette époque d’instituer une Cour Constitutionnelle qui serait chargée de censurer les transgressions possibles par la loi des droits imprescriptibles de l’homme. Le ver est dans le fruit, dès le départ. C’est au législateur, comble de l’antinomie, qu’il reviendra par exemple de délimiter par la loi l’étendue de la résistance à l’oppression dont il est loisible au peuple de faire usage en réaction, par hypothèse, à une loi ou à un acte oppressif du législateur ou de ses ministres (en fait ses « patrons »). L’arbitraire monarchique est à peine détruit qu’il est aussitôt remplacé par l’arbitraire républicain disposé au cœur du réacteur constitutionnel libéral. Le malentendu sur l’étendue des droits de l’homme et du citoyen face à la loi est donc originel. L’empire des droits de l’homme ressemble dès le départ au royaume de Danemark. Les droits, naturels et imprescriptibles, de l’homme et du citoyen sont condamnés à être biodégradables par la loi. On touche à l’essence déceptive de la définition libérale de la liberté, qui peut, si l’« on », c’est-à-dire le pouvoir constituant, n’y prend garde, dans des circonstances de crise en particulier, se retourner contre les libertés.
L’histoire de la Révolution Française le prouve dès le commencement en joignant le geste législatif dictatorial à la parole constituante libérale : la loi des suspects est votée quatre ans après la déclaration solennelle des droits de l’homme et du citoyen, et l’affirmation, timide il est vrai, par cette même déclaration du principe de la liberté religieuse (article 10 de la DDHC) ne fait pas obstacle à la persécution des prêtres « réfractaires » - à tort ou à raison – à prêter serment à la constitution civile du clergé. Le coup d’Etat des 18 et 19 Brumaire de l’an VIII [6] par le Général Napoléon Bonaparte ne fera après tout que consolider une dérive autoritaire qui elle-même, selon Tocqueville, n’a fait qu’amplifier les tendances directives et invasives du pouvoir central sous l’Ancien Régime, un régime napoléonien dont les écrous chevillent encore l’armature de notre organisation administrative centralisatrice.
À l’heure où des restrictions considérables et inédites aux libertés publiques et aux droits fondamentaux de l’homme et du citoyen se multiplient au nom de politiques sanitaires publiques menées à la hussarde dans des pays démocratiques qui se croyaient à tort immunisés contre des abus de pouvoir par trop manifestes, il nous faut admettre qu’on assiste moins à une bascule tyrannique imprévisible des sociétés libérales, qu’à la (ré)actualisation du potentiel tyrannique gisant au cœur de constitutions libérales proclamant à grand bruit les droits de l’homme et du citoyen, mais concédant en même temps au pouvoir les moyens légaux de les remettre en cause.
C’est en digne émule des libéraux révolutionnaires, de Saint-Just et de Robespierre, qu’Emmanuel Macron, président de la République française et parfaite incarnation du législateur moderne, 232 ans après la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789, décide de réactualiser sa liberté discrétionnaire de définir par la loi l’étendue « des droits naturels et imprescriptibles de l’homme et du citoyen » français en 2020 et 2021, c’est-à-dire de limiter à sa guise la liberté de ceux dont on conviendra, dans ce contexte, qu’il est difficile d’appeler ses concitoyens.
(À suivre…)
Le Conseil constitutionnel emboîte logiquement le pas du « législateur » dans sa décision du 5 août 2021 en validant une version contemporaine du « despotisme légal »
Dans le contexte sanitaire de l’été 2021, et après le coup de tonnerre présidentiel du 12 juillet 2021, qui prenait le contrepied d’engagements antérieurs de la même instance politique et malmenait plusieurs grands principes tels que celui de la liberté vaccinale, du respect dû à l’intégrité physique et à la libre conscience de chacun, ainsi que le principe de précaution, le Conseil constitutionnel n’a pas manqué l’occasion de marquer sa fidélité à l’esprit et à la lettre d’une Constitution qui a tranché à l’avance le sens de la résolution des dilemmes auxquels le Juge Constitutionnel pouvait se trouver confronté [7]. Et malgré la belle opportunité de raidir la nuque et d’affirmer son pouvoir de défenseur des droits de l’homme et du citoyen au sommet de l’ordre juridique national de son propre chef, il n’a pas dérogé à sa tradition d’une philosophie constitutionnelle de soumission au législateur, c’est-à-dire au gouvernement. Il a assoupli sa nuque à la mesure des circonstances malgré l’ampleur des atteintes aux libertés publiques et aux droits de l’homme par un pouvoir dont le sans-gêne finirait par déclencher une certaine admiration. Fût-ce au prix de paralogismes juridiques et d’un strabisme de circonstance qu’une Cour médiatique digne du Grand Siècle s’est opportunément retenue de signaler, si tant est qu’elle ait entrepris de les repérer, trop occupée sans doute à savoir « qui sont ces gens qui défilent » (dans les rues tout de même !) en nombre, deux mois durant en plein été dans tant de villes et bourgades de France, plutôt qu’à enquêter en toute impartialité et déontologie journalistique sur le bien-fondé de leurs arguments, sans complaisance à l’égard de quiconque – et même des grands laboratoires de ce monde.
À supposer que l’on se vaccine pour protéger autrui et non pour se protéger soi ce qui est tout de même une nouveauté, c’était une gageure que d’entériner le raisonnement du législateur selon lequel il serait démontrable qu’une absence d’acte, telle qu’une omission vaccinale, puisse suffire à une imputation de nuisance à autrui en dehors de tout acte nocif concret constatable. Et c’était une gageure comparable d’admettre qu’il serait en revanche inoffensif d’imposer une vaccination dont les effets indésirables, y compris la létalité, sont possibles, voire probables (un risque confirmé par le refus des producteurs de vaccins d’assumer la responsabilité civile des effets indésirables et par le déport cette responsabilité pécuniaire vers les États, c’est-à-dire vers les contribuables - vaccinés ou non vaccinés - et par le refus « inconcevable » de la Commission de communiquer au Parlement européen le contenu en clair de l’ensemble des contrats passés avec les firmes pharmaceutiques notammment les annexes sur les clauses de responsabilité et d’indemnisation). Mais rien ne résiste à la volonté de servir. Le Juge constitutionnel validera donc en même temps les deux sophismes miroirs [8]. Fût-ce au prix de la transgression des principes de base de la légalité – parmi lesquels la non-rétroactivité des lois (de la loi sanitaire par rapport aux contrats de travail des personnels soignants) le Juge constitutionnel remplit logiquement jusqu’au bout sa mission de garant d’une Constitution qui a remis la liberté du petit peuple entre les mains du législateur éclairé.
Revenir un instant sur cette décision permet de mesurer l’inconsistance de l’État de droit dans lequel nous vivons. L’ancien fameux article 1382 du Code Civil (désormais 1240) sur la responsabilité peut nous aider à comprendre par analogie le coup de force intellectuel avalisé par le Conseil constitutionnel, selon lequel ne pas se vacciner serait nuire à autrui et justifierait la restriction des libertés de ces fauteurs de trouble. Il stipule que « tout fait quelconque de l’homme qui cause un dommage à autrui oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer ». Il faut donc un fait, un acte, pour causer un dommage à autrui, ou lui nuire, et la jurisprudence de la responsabilité tourne autour de la preuve à apporter du lien de causalité entre l’auteur du fait, le fait fautif et le dommage causé [9]. S’il est difficile de soutenir qu’un « non fait », un « non acte » de l’homme puisse nuire à autrui de manière générale, il l’est plus encore de démontrer le lien de causalité entre un non-acte et la nuisance créée par cette omission d’une personne déterminée à une autre personne déterminée, sachant de plus que le fait lui-même, la vaccination, à laquelle certains s’opposent au nom de la liberté vaccinale tout court, n’empêche ni la contamination, ni la transmission du virus - c’est-à-dire la potentielle nuisance à soi-même et à autrui. On sait en revanche que seuls les gestes barrière, l’hygiène des mains, plus le port du masque adapté selon les situations, sont les seuls moyens sûrs de ne pas être contaminé ou de ne pas contaminer, comme on peut d’ailleurs le comprendre si l’on admet que le SARS Cov 2 ne se transmet pas par l’opération du Saint Esprit. C’est pour cela que les protocoles sanitaires s’appliquent indifféremment à tous les personnels soignants, vaccinés ou non, et sont seuls garants de l’immunité des patients (c’est leur finalité même et c’est pour cela qu’ils ne sont pas allégés pour le personnel vacciné). Au passage leur maintien prouve objectivement que la vaccination est en réalité superfétatoire. En toute hypothèse, dire que l’on nuit à autrui en ne se vaccinant pas, même dans le cas des personnels soignants soumis à obligation vaccinale est une imputation légale infondée. A fortiori, donc, pour le citoyen lambda.
Valider une telle loi revient à confirmer que l’on peut présumer l’imputation de nuisance à autrui, sans avoir à la démontrer – et au demeurant revient à considérer comme inefficaces les campagnes d’information prophylactique martelées tous azimuts - dont on connaîtra peut-être un jour le coût. Dans la France d’aujourd’hui on peut donc nuire à autrui sans lui faire en pratique aucun mal, et privé de dessert (au restaurant). Jamais le fait du Prince démocratiquement élu n’était allé aussi loin dans la remise en cause des droits du Peuple, qui fonde son légitime droit de retrait en dernier recours face à un tel diktat. En validant ce diktat, le Conseil constitutionnel vient de valider ni plus ni moins que la présomption de culpabilité. De valider le retour à la loi des suspects. Les traditions ont la vie dure. Et elles permettent de comprendre les racines historiques du formatage de l’opinion publique.
Puisque le Conseil admet qu’un citoyen quelconque nuit à autrui sans rien lui faire, de manière potentielle si l’on veut par générosité donner un semblant de sens à la validation de cette restriction de liberté, il s’ensuit a contrario que, si l’on peut démontrer que la commission d’un acte, par hypothèse une injection vaccinale, nuit effectivement à autrui par ses effets secondaires mal connus [10] comme on peut le vérifier sur de nombreux cas en valeur absolue (en dépit du fait que les études cliniques sont réalisées sous le contrôle des laboratoires pharmaceutiques eux-mêmes et à ce titre suspectes) cet acte doit être interdit sans délai. Et la disposition légale qui impose un acte qui peut s’avérer, ou a fortiori s’avère nuisible, et même létal ou invalidant, devrait de toute évidence être immédiatement censurée par un Juge Constitutionnel conséquent. CQFD.
L’expérience médicale devrait d’ailleurs suffire à présumer qu’imposer une médication à une personne contre son consentement revient à lui nuire, car la disposition à recevoir un médicament fait partie des conditions de succès de tout traitement médical. Comme le déclarait Paracelse, et cela n’est pas nié par la médecine la plus contemporaine : « l’action exercée par la volonté est un point important dans la médecine ». Pour cette raison le Code de la santé publique (dans son article R. 4127-36) subordonne l’administration d’un médicament ou d’un acte médical au consentement éclairé de la personne à qui l’on propose de l’administrer. Mais tout préoccupé d’habiller de son mieux la validation d’une mesure liberticide au nom du fait que la liberté vaccinale serait en soi nuisible à autrui, le Conseil constitutionnel n’a même pas envisagé, qu’un abus de droit puisse être nuisible à des personnes bien déterminées et potentiellement à tous ceux qui subiront les effets indésirables dont ils n’ont pas été informés ou qui ne les dispense pas d’être vaccinés en tout état de cause. Comme d’autres docteurs de la loi, le Juge constitutionnel « filtre les moucherons, mais il avale les chameaux. » [11]
« Corruptio optimi pessima [12] » : la décision du Conseil constitutionnel est un parfait exemple d’une justice qui applique deux poids deux mesures, et illustre parfaitement l’adage intemporel du droit romain. L’incohérence de son raisonnement, qui ne semble pas avoir troublé grand monde parmi les juristes (à notre connaissance du moins), dans un monde où l’application du « en même temps » présidentiel semble avoir définitivement voilé le cerveau des meilleurs esprits, est d’autant plus choquante qu’elle fait fi, par-dessus le marché, du principe de précaution qui trouvait dans cette « expérimentation vaccinale » une occasion propice de manifestation. Il ne tenait qu’aux « Sages » censés composer le Conseil constitutionnel de l’invoquer avec autorité, dans une matière où l’imprudence, l’absence de précaution, met indéniablement en danger la vie d’autrui et stigmatise toute une population (notamment les personnes âgées et sédentaires si souvent pointées du doigt après « les obèses ») dont on serait bien en peine de prouver la nocivité de facto. Mais le Conseil a préféré fermer les yeux sur cet éléphant dans le couloir, quitte à perdre le peu de crédibilité qui lui restait. La validation par le Juge constitutionnel n’a d’équivalent en termes d’audace que celle du législateur, mais elle a moins d’excuses.
C’est donc bien en vain que l’on pouvait rêver du Juge constitutionnel qu’il en appelle solennellement à un retour à la raison du gouvernement et à la proportion des actes politiques liberticides par rapport à la gravité réelle de la situation sanitaire examinée de sang-froid, que des décisions intempestives et brutales allant à contresens des besoins d’un système de santé en manque structurel de personnel et d’équipements n’ont fait qu’empirer. En vain que l’on pouvait espérer qu’il invite le pouvoir politique à substituer à une politique sanitaire autoritaire univoque et irresponsable [13] indigne d’une démocratie qui se respecterait, une politique sanitaire de bon sens qui ne se priverait d’aucune piste médicale, à commencer par la stimulation de l’immunité naturelle par la pratique sportive en extérieur (à l’opposé de tout confinement source de contamination privée) une alimentation vitaminée et des médications préventives ou curatives reconnues efficaces, au sein de laquelle une politique vaccinale raisonnable, et moins couteuse au demeurant, trouverait sa juste place sous le contrôle de la médecine libérale et ciblée sur les personnes effectivement (et non « statistiquement ») fragiles, sous la condition de leur consentement après avis médical.
(À suivre…)
Seul un profond réveil démocratique sera en mesure de contrer les tendances liberticides d’un despotisme légal paradoxalement autorisé par les Constitutions libérales
Du mal de cette réactualisation du despotisme légal gisant au fond des Constitutions libérales, liée à des circonstances épidémiques peut sortir un bien si les citoyens des pays démocratiques prennent conscience de cette faille ancienne et décident de saisir cette occasion pour faire prévaloir les droits naturels et imprescriptibles, sacrés et inaliénables de l’homme sur leurs transgressions par des lois de circonstance prenant durablement racine dans le droit positif. Pour faire prévaloir le rééquilibrage des pouvoirs de ses ministres temporaires et de ceux du Peuple lui-même. Pour redonner son sens véritable au concept de démocratie comme gouvernement du peuple par le peuple et pour le peuple (« principe de Souveraineté » de la République selon l’article 2 de la Constitution française) qui présuppose la limitation du pouvoir des représentants du peuple sur le peuple, et délégitime tout pouvoir qui prétendrait s’exercer contre le peuple ou toute fraction du peuple. En accordant une place importante à la démocratie directe et à la démocratie participative à côté de la démocratie représentative. Le respect de ces droits constitue en réalité l’essence même de la démocratie et de l’idée que s’en font les êtres humains respectueux d’eux-mêmes, de leurs droits fondamentaux et de ceux de leurs frères en humanité, co-responsables comme citoyens du sort de la cité et non sujets du Prince républicain. Il est le fondement de la légitimité de la délégation de pouvoir du Peuple Souverain aux pouvoirs constitués, qui n’ont pas le droit de le confisquer à leur guise entre deux élections au suffrage universel. C’est donc au Peuple, en totalité ou en partie - car c’est un fait de l’histoire que les résistances aux abus du pouvoir ont toujours été très minoritaires, voire « une poignée » [14] - qu’il revient de fixer les bornes du pouvoir de la loi, auquel le L majuscule ne convient pas, et de se manifester lorsqu’il les dépasse, non parce qu’il prétendrait définir a priori le contour précis des libertés qu’il considère en conscience [15] comme sacrées et inaliénables, mais a posteriori au vu des abus du droit positif qui les remettraient de facto en cause à ses yeux.
Telle est bien la conception démocratique anti-despotique cohérente qui a été providentiellement défendue dans la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen de 1793 : « Quand le gouvernement viole les droits du peuple, l’insurrection est, pour le peuple et pour chaque portion du peuple, le plus sacré des droits et le plus indispensable des devoirs » (article 35) indispensablement complémenté par l’article 33 : "la résistance à l'oppression est la conséquence des autres droits de l'homme". Les circonstances nous donnent la chance de faire prévaloir cette authentique formule démocratique de garantie des droits fondamentaux de la personne humaine, que les régimes autoritaires successifs se sont empressés de laisser tomber dans les oubliettes de l’histoire pour ne retenir que les formules en trompe l’œil, permissives à l’égard des tentations d’abus de pouvoir de tout pouvoir constitué, de la DDHC de 1789 permettant aux délégués de maintenir en laisse le nouveau Souverain à peine promu [16]. Tentations intemporelles à l’égard desquelles l’archéo-complotiste Athénien Thucydide nous a de longue date mis en garde, constatant que : « tout être tend à exercer tout le pouvoir dont il peut disposer ». L’abus de pouvoir ne cesse que s’il trouve en face de lui un clair « no pasaran ! ».
Bien qu’elle se soit présentée à l’origine comme une doctrine d’opposition à l’arbitraire monarchique, de séparation des pouvoirs et de promotion des contrepouvoirs (ces « checks and balances » sciemment détruits en France par le décret d’Allarde et la loi Le Chapelier de 1791 créant le délit de coalition contre la liberté d’association des ouvriers et interdisant la grève), la société libérale s’est paradoxalement démunie dès l’origine des moyens de s’opposer aux transgressions des libertés fondamentales de l’homme et des règles raisonnables d’une société décente. Puisqu’elle fait seulement mine d’y être attachée et ne les défend que du bout des lèvres, la défense bec et ongles de ces libertés n’est donc pas à chercher du côté de l’impasse libérale qui les a volens nolens trahies par sa méfiance viscérale à l’égard du peuple et son excès de confiance dans des représentants du Peuple et les dirigeants en général, dont les intérêts sont solidaires, voire collusifs. Travaillé depuis le départ par l’idéologie socialement asymétrique du « laissez-faire », le libéralisme est devenu en pratique un ferment déterminant de l’excès de pouvoir tant économique (comme le prouve le soutien sans faille et sans discernement au capitalisme) que politique, l’un nourrissant l’autre et rejaillissant négativement sur la liberté et la situation, la vie, des plus faibles. L’antidote à la tendance viscérale à l’abus de domination de l’homme sur l’homme ne peut se trouver que du côté d’un renouveau démocratique [17] authentique, fondé sur l’engagement personnel et collectif d’adultes raisonnables orientés par le souci du bien commun à chaque niveau de la société, et sur la reviviscence du principe de subsidiarité, dont le citoyen est le premier échelon, comme outil de réorganisation par le bas des organigrammes politiques et administratifs.
Cédric d’Ajaccio
[1] Le taux de mortalité du Covid-19 fin 2021, rapport du nombre total de morts (5,3 millions) à la population mondiale totale (7 milliards), est de 0,07 % soit un taux de survie globale à cette pandémie de 99,93 % le taux de létalité rapport entre le nombre des morts et la totalité des personnes infectées (250 millions) est de 2 %. En France, on dénombre 120 000 décès dus au covid en 2020-2021 incluant les décès dus à des comorbidités, sur un nombre usuel moyen de décès annuels de 600 000, soit 50 000 par mois ou 1200 décès par jour. Le taux de mortalité en France s’élève à 0,18 %, soit un taux de survie de 99,82 % (pour une population de 67 millions de personnes) et un taux de létalité, sur 8 millions de « contaminés » de 1,5 %. 73 % des décès concernent des personnes de 75 ans et plus. À titre de comparaison en France les décès annuels dus au cancer s’élèvent à plus de 150 000, aux maladies cardio-vasculaires à plus de 140 000, au tabac à 70 000 (cf https://www.carenity.com/infos-maladie/maladies-cardiovasculaires/chiffres-cles-et-prevalence-56) rapportés à 64 000 décès du covid en 2020 et moins de 60 000 en 2021. Cf https://fr.statista.com/statistiques/1101324/morts-coronavirus-monde/
[2] On se permettra de citer ici la définition philosophique qu’en donne le vicaire savoyard selon Rousseau : « Sans doute je ne suis pas libre de ne pas vouloir mon propre bien, je ne suis pas libre de vouloir mon mal ; mais ma liberté consiste en cela même que je ne puis vouloir que ce qui m’est convenable, ou que j’estime tel, sans que rien d’étranger à moi me détermine. »
[3] Proche en apparence de la « règle d’or » partagée par les grandes sagesses et nombre de religions, selon laquelle pour reprendre la formulation biblique au Livre de Tobie (que nous adaptons) : « Ne fais pas à autrui ce que tu n’aimerais pas qu’il te fasse », la définition libérale lui reste sensiblement inférieure en pratique. La règle d’or invite à se mettre à la place d’autrui, de sorte qu’il devient plus aisé de comprendre, à partir de ce qui nous fâche, ce qui pourrait dans l’imposition à autrui de nos préférences le fâcher, sans prétendre fixer une délimitation objective à ma liberté. Son bon sens et son empathie par introspection poussent chacun vers une décision raisonnable, que l’autre comprendra, et dont il pourra s’inspirer, avec joie. La règle libérale qui arrête la liberté individuelle à la nuisance à autrui transforme une solution pratique en un problème théorique insoluble : comment savoir a priori quand je commence à porter atteinte à la liberté d’autrui. Les deux ont cependant en commun que leur mise en œuvre présuppose un minimum de bonne foi individuelle sans laquelle il est impossible de parvenir à un consensus social raisonnable, c’est-à-dire en pratique à la retenue partagée qui, selon l’expression démodée d’Orwell, permet de faire vivre « une société décente ». Ce que l’éclatement axiologique contemporain et le bruit démesuré fait par les minorités agissantes qui prétendent imposer des préférences qu’elles ressentent discriminées, compromet justement, jusqu’à rendre complètement décalée l’affirmation cartésienne selon laquelle « le bon sens est la chose du monde la mieux partagée ».
[4] À titre d’exemple, on citera le grand écart entre les réactions d’indignation et les appels à la censure après la publication d’un article en « une » de Minute au titre d’un goût pour le moins douteux : « Christiane Taubira retrouve la banane » et l’absence de réactions aux nombreuses « unes » aussi tendancieuses de Charlie Hebdo à l’égard de personnalités politiques ou religieuses, dont Mahomet (ou Mohamed) ou le Pape.
[5] Voir son magistral « Empire du moindre mal, essai sur la civilisation libérale » Collection Climats, Flammarion, 2007. Citation issue de note B du chapitre 6 L’inconscient des sociétés modernes.
[6] 9 et 10 novembre 1799 selon le calendrier grégorien que rétablira l’Empereur Napoléon 1er le 11 Nivôse de l’an XIV, ou 1er janvier 1806.
[7] La lecture du Titre VII de la Constitution sur le Conseil constitutionnel est fascinante d’édification. Le premier article, 56, commence ainsi : « Le Conseil constitutionnel est composé de neuf membres dont le mandat dure neuf ans et n’est pas renouvelable… » 0n sera bien en peine de trouver dans les 9 articles du Titre VII la moindre amorce de définition de sa mission de fond… et la moindre trace d’une invitation à l’audace en matière de défense des droits du Peuple.
[8] « En même temps », il déboutera le 6 août 2021 comme inconstitutionnel le projet de référendum d’initiative partagée sur l’hôpital déposé au Conseil constitutionnel comportant une proposition de loi visant à garantir « l’accès universel à un service public hospitalier de qualité ».
[9] À l’exception du délit de non-assistance à personne en danger, article 223-6 du Code pénal, avec lequel le parallèle peut difficilement être fait.
[10] Personne n’a aujourd’hui le droit de connaître le contenu du « vaccin » qu’on lui injecte et ne dispose de la notice prévue par la loi qui fait état des effets indésirables, ou des allergies, qui rendent dangereux l’administration de cette médication en phase expérimentale autorisée de manière conditionnelle dans une urgence qui n’a rien pour rassurer. Le refus de la Commission européenne de communiquer aux Parlementaires européens (sic !) le contenu des contrats qu’elle a passés avec les firmes pharmaceutiques et qui les dégagent de toute responsabilité quant aux effets secondaires indésirés de ces nouveaux « vaccins » n’est guère susceptible non plus de rassurer le citoyen de base. D’ailleurs certains préfets décident de substituer du jour au lendemain, en fonction des stocks disponibles, un vaccin à un autre, du « Moderna » interdit aux moins de trente ans en Suède à du « Pfizer », comme si l’administration avait le droit de prescrire un vaccin plutôt qu’un autre en se contentant d’affirmer que cela revenait au même. Il est vrai que les doses étant injectées dans tous les cas à la chaîne dans des « vaccinodromes » sans aucune information du « patient » quant au contenu spécifique de l’injection et ses incompatibilités propres, cela revient à la même aberration médicale.
[11] Matthieu, 23, 24.
[12] « La pire des corruptions est celle du meilleur ».
[13] Si la décision sanitaire de Roselyne Bachelot de commander 60 millions de vaccins face à la grippe H1 N1 avait fait un grand scandale par son excès et le gâchis budgétaire qu’elle représentait (1,6 Mds €), aussi bien médical que budgétaire, que dire de la politique sanitaire actuelle qui commande des centaines de millions de doses vaccinales (pour une population de 67 millions de personnes enfants compris) sans qu’aucune balance bénéfices-coûts ne vienne pondérer la prise de décision politique que la balance bénéfices risques, forcément déficitaire à un niveau global compte tenu du profil de faible létalité et de faible gravité de la maladie, a déjà bien du mal à justifier objectivement ?
[14] L’expérience de Milgram démontre hélas clairement que la grande majorité des personnes se soumettent à l’autorité, quelle que soit la nocivité pour autrui, allant jusqu’à donner la mort, des ordres de cette autorité. Le film d’Henri Verneuil de 1979 avec Yves Montand « I comme Icare » en donne une version cinématographique fidèle. Dans une enquête plus ancienne sur les ouvriers et les employés allemands à la veille du III ème Reich le psychosociologue Erich Fromm avait observé les mêmes prédispositions à se soumettre au caractères autoritaire.
[15] Comment ne pas à nouveau faire référence à la Profession de foi du Vicaire Savoyard en invoquant cette instance supérieure à tout droit positif au fondement de toute société digne de l’homme : « Conscience ! Conscience ! Instinct divin, immortelle et céleste voix, guide assuré d’un être ignorant et borné, mais intelligent et libre, juge infaillible du bien et du mal, qui rend l’homme semblable à Dieu ! C’est toi qui fais l’excellence de sa nature et la moralité de ses actions. »
[16] Il serait sans doute incongru tant l’effondrement immunitaire des corps constitués à l’égard de l’abus de pouvoir est grand de s’appuyer sur l’article 16 DDHC 1789 qui ne parvient pas à en sauver la mise selon lequel : « Toute Société dans laquelle la garantie des Droits n'est pas assurée, ni la séparation des Pouvoirs déterminée, n'a point de Constitution. »
[17] Voir en ce sens la charte d’une initiative politique favorable à une authentique revitalisation démocratique : http://renouveaudemocratique.org/la-charte-fondatrice-du-renouveau-democratique/
[18] Lointain cousin du publiciste du 19ème siècle Frédéric Bastiat, critique en particulier des sophismes de son temps.
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