Peur et confiance, les deux forces contraires qui nous gouvernent

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Rorik Dupuis Valder pour France-Soir
Publié le 27 juin 2024 - 11:25
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TRIBUNE - L’épisode du Covid, avec son lot de mesures totalitaires et de croyances absurdes, aura été particulièrement révélateur de l’importance, souvent pour le pire, du mimétisme chez l’être social — une caractéristique primitive plus ou moins honteuse qu’on disait propre à l’animal ou à l’enfant… 

Cette vaste expérience psycho-sociale que fut la crise du coronavirus, nous aura non seulement montré à quel point les libertés individuelles relèvent d’un concept des plus fragiles lorsqu’il est soumis à une autorité prédatrice, volontiers mensongère, mais elle aura aussi grossièrement mis en lumière les deux forces contraires qui gouvernent l’individu comme la collectivité : la peur d’une part, et la confiance de l’autre. 

Car au-delà des réalités statistiques de l’épidémie artificielle de Covid-19, c’est très certainement la peur qui aura été le plus présent et le plus redoutable des virus. Dans cette panique générale de la maladie, alimentée par des médias complices du catastrophisme politique ou trop paresseux pour contredire le récit officiel, on aura vu se manifester toutes sortes de comportements irrationnels ; les uns étant victimes d’une soudaine hystérie hygiéniste, faisant allégeance à la nouvelle religion du risque zéro, les autres dénonçant et ostracisant leurs congénères pour peu qu’ils émettaient un avis critique ou adoptaient une attitude dissidente vis-à-vis de cette malheureuse et impressionnante comédie humaine du XXIe siècle — divertissement morbide qui aura comblé un temps le vide existentiel de millions de gens serviles et désœuvrés. 

Cette grande parade du totalitarisme sanitaire, à laquelle politiques et médias réunis nous obligeaient à participer en chœur, de confinements déprimants en injections expérimentales, au nom du sacro-saint « principe de précaution » — qui ressemblait assez à celui, tout aussi fallacieux, de « guerre préventive » qu’appliquent certains régimes coloniaux bien connus pour leur violation décomplexée du Droit international et de la souveraineté des peuples… —, doit avant tout se comprendre comme une étape supplémentaire, décisive, vers l’État policier généralisé et la société du contrôle permanent. 

Si dans la nature la peur naît d’une situation de stress provoquée par un prédateur ou un évènement anormal (climatique, environnemental, etc.), chez l’homme elle agit comme un poison paralysant qui le fait adhérer à toutes sortes de rituels à fonction rassurante, aussi absurdes ou délétères soient-ils, pourvu qu’ils compensent momentanément son impuissance devant l’inconnu, la menace et le danger : la reproduction du geste, plus ou moins organisée, plus ou moins systématique, importe alors plus que le sens du geste en lui-même, annulant par là tout discernement dans l’émotion. 

Vous souvenez-vous du dogme covidiste de « distanciation sociale » qui interdisait de saluer physiquement ses collègues de travail ou de s’approcher à moins d’un mètre cinquante de tout individu croisé dans la rue ? Des grands-parents qui ne pouvaient étreindre leurs petits-enfants à l’occasion des fêtes de Noël ?… Le plus effrayant étant sans doute que ces injonctions scandaleusement intrusives ont été suivies, aveuglément, par une bonne partie de la population ! 

Comment expliquer qu’un automobiliste, seul dans sa voiture, les vitres fermées, en vienne à s’affubler d’un masque chirurgical pour « se protéger et protéger autrui », selon le slogan consacré, le plus sérieusement du monde ? Les cas de ce type ayant été étonnamment nombreux pendant cette période faste de manipulation des masses où le droit au ridicule était sans doute le plus favorisé d’entre tous les droits… Si la méfiance est saine, la peur est pathologique : là se situe la nuance que refuse d’admettre le sujet fanatisé soumis au conformisme télévisuel. 

Comment tolérer, en « démocratie », que l’accès à un magasin d’alimentation ou à un cinéma soit conditionné à la prise de la température corporelle du client, ou plus radical encore, à la preuve de sa double « vaccination » contre un virus respiratoire en circulation ? N’est-ce pas là, tout bonnement, pratiquer la ségrégation sanitaire ? Quid du secret médical en vigueur depuis plus de deux siècles et du principe d’immunité collective qui régit depuis toujours le monde du vivant ? L’homme est-il malade d’hyper-interventionnisme ? 

Mais comme nous sommes foncièrement de nature optimiste et qu’il s’agit de montrer notre foi renouvelée en l’humain, nous nous concentrerons ici sur le remède à la peur : discrète, courageuse et tout aussi redoutable, c’est la confiance. Celle que le parent donne naturellement à son enfant, celle que le professeur insuffle à ses élèves, celle du commerçant envers ses clients, du résident envers ses voisins, etc. Cette confiance immédiate, locale et spontanée, ou plus ambitieuse, née d’une bienveillance instinctive que le système politico-médiatique tend toujours plus à corrompre par l’entretien d’un climat de tension et de suspicion permanent, est la clé de la paix sociale. Oui, la confiance est risquée, et le risque est nécessaire : voilà ce qui fait, dans l’acceptation de la mortalité, la saveur de la vie. 

Dans les textes sacrés revient souvent, pour désigner « le règne de Dieu », la parabole de la simple graine qu’on sème, qui germe et devient arbre par la grâce de la nature. En faisant une lecture « anthropologique » de la métaphore de cette petite chose précieuse et anodine qu’on diffuse, qui croît et se multiplie de façon arbitraire sous l’action des éléments, on pourrait comprendre qu’il s’agit bel et bien là de la confiance, liant vertueux, essentiel, dans les relations humaines autant que dans les réussites individuelles et collectives. La confiance en soi et en l’autre, si fragile, et pourtant tellement déterminante pour qui sait en déceler le pouvoir réticulaire bienfaisant. 

Pour continuer de filer la métaphore, on dira que deux projets de civilisation s’opposent fondamentalement aujourd’hui : d’une part la société globaliste post-industrielle, de la mécanisation déraisonnée et de la surexploitation, où le calcul règne en maître et la rentabilité est la règle, livrant des fruits génétiquement modifiés, uniformes et sans grande saveur ; et d’autre part la société des humbles, des paysans engagés localement, respectueux des organismes et des saisons, produisant des fruits à l’image des caractères humains, dont le goût et la forme n’ont été dénaturés par la machine et les lois folles du profit. 

Beaucoup probablement qualifieront ce deuxième projet social de régressif ou de « romantique » (ce que j’assume !), mais posons-nous solidairement la question au vu des malheurs répétés qu’engendre le premier : le progrès systématique, obsessionnel, celui qui asservit et dépasse l’homme en en faisant un consommateur compulsif constamment happé par des écrans et des priorités artificielles, est-il une nécessité ? La grâce de la nature n’est-elle pas suffisante ? 

Quant à faire confiance aux épouvantails et autres communicants professionnels qui nous servent de gouvernants ? Qu’ils soient catalogués de gauche, de droite, du centre ou des extrêmes « normalisés », là n’est pas la question puisque le pouvoir profond, non visible, lui ne connaît pas la démocratie : il gouvernera encore et toujours par la peur pour servir ses seuls intérêts, en donnant partiellement l’illusion aux électeurs, par une politique-spectacle plus ou moins contrôlée, plus ou moins réaliste, qu’ils sont maîtres de leur destin de citoyen. 

Mais comme le covidiste et la groupie aveuglés par l’agitation du pouvoir en scène, le votant déterminé, quelle que soit sa sensibilité politique, a la mémoire courte : sa confiance mille fois trahie par l’autorité, il la remet en jeu une mille-et-unième fois en espérant sagement, fébrilement, que ce soit la bonne… 

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