Macron voulait un choc de confiance, il se retrouve face au roc de la défiance
De la théorie à la pratique. Pas encore élu, Emmanuel Macron théorisait la nécessité d'un "choc de confiance" pour relancer l'économie française, développant un programme qui lui a permis d'accéder à l'Elysée. Désigné, il a analysé le choix des électeurs comme celui "un peu fou de choisir un mouvement politique nouveau, une personnalité politique qui n’existait pas dans leur quotidien depuis longtemps", comme il l'a déclaré jeudi 24 en Roumanie (entre deux déclarations, qui ne sont pourtant que des redites, sur l'impossibilité de reformer la France). Un choix qui accréditait selon lui la thèse que les Français adhéraient à son projet de "transformer" le pays en profondeur plutôt que de le réformer.
C'était peut-être oublier un peu vite le scénario complètement fou de l'élection présidentielle qui l'a vu triompher. Le favori Fillon disqualifié par les affaires, Hollande le mal-aimé poussé à ne pas se représenter, Hamon l'inconnu sorti du chapeau, Le Pen empêtrée dans les affres d'un programme repoussoir, Mélenchon le tribun capable du meilleur comme du pire et enfin Macron, jeune, neuf, presque providentiel. Il ne devait en rester qu'un, et ce fut lui. Mais a-t-il été choisi par les électeurs pour son programme, sa position médiane, son image en rupture?
Un sondage Elabe publié mercredi 23 par BFMTV affirme que 14% seulement des répondants se disent à ce stade "satisfaits" de l'action du président. Mais, surtout, cette étude souligne que 50% estiment qu'il est encore trop tôt pour se prononcer et préfèrent attendre avant de juger. Un total de 60% gardent pourtant la conviction que le nouveau président veut "vraiment changer les choses". Une note d'espoir donc, mais prudente. Preuve supplémentaire, la forte baisse de sa cote de popularité depuis son élection (pire que celle de Hollande au même stade), notamment car la réforme du code du travail inquiète.
Car Emmanuel Macron n'est pas le premier à promettre qu'il va renverser la table et remettre le pays sur les bons rails. Depuis le tournant de la rigueur de Mitterrand en 1983, tous les présidents ont à un moment ou un autre dû renier leur parole pour se plier à une réalité économique mouvante; depuis les grandes manifestations consécutives au plan Juppé de 1995, tous les gouvernements ont dû composer avec les syndicats et la rue pour réformer. Pourquoi en serait-il autrement pour Emmanuel Macron?
Confronté à un été de couacs et de polémiques nourris par un gouvernement inexpérimenté et des députés encore en formation, le président jupitérien doit descendre de son Olympe pour convaincre. Celui qui avait choisi de raréfier sa parole et de ne pas s'adonner au "off" si prisé de François Hollande notamment ("un président préside (...) il n'est pas le copain des journalistes", jugeait-il sévèrement son prédécesseur début avril) est contraint de changer de stratégie. Désormais il s'adressera aux Français via les médias une à deux fois par mois -ce qui est beaucoup. Et a même embarqué des journalistes à bord du Falcon présidentiel le conduisant de Salzbourg à Bucarest, jeudi, pour une de ces séances d'échanges informels autrefois honnis.
Macron a donc décidé de prendre son bâton de pèlerin et de s'attaquer au mont défiance. Son objectif: faire de la pédagogie. Une petite musique qui rappelle le tube du quinquennat Hollande, durant lequel l'ancien chef de l'Etat n'a cessé de demander à ses ministres d'expliquer leur action, de "donner du sens", estimant que c'était là l'une des causes principales du désamour des Français. Pour le résultat que l'on connaît.
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