L'élection au Kenya en quatre questions

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Par AFP
Publié le 11 août 2017 - 15:13
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Des partisans du candidat d'opposition Raila Odinga brandissent une affiche de campagne, dans les ru
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© Kevin MIDIGO / AFP
Des partisans du candidat d'opposition Raila Odinga brandissent une affiche de campagne, dans les rues de Kisumu, au Kenya, le 10 août 2017
© Kevin MIDIGO / AFP

Le Kenya, souvent présenté comme le pays où la démocratie est la mieux enracinée en Afrique de l'Est, est plongé depuis le scrutin de mardi dans un climat de fébrilité et d'anxiété dans l'attente de la proclamation du nouveau président.

Les résultats provisoires de la Commission électorale (IEBC), qui devrait désigner le vainqueur vendredi, donnent une large avance au sortant Uhuru Kenyatta. Mais son rival de l'opposition Raila Odinga les a rejetés et affirme avoir gagné l'élection.

Les enjeux sont de taille pour l'économie la plus dynamique de la région qui, élection après élection, se retrouve confrontée aux divisions marquées de son personnel politique, dont le logiciel demeure la constitution d'alliance essentiellement sur des bases ethniques.

- Pourquoi le pays est-il anxieux ?

Essentiellement parce que les événements des derniers jours ont comme un air de déjà vu, ravivant les souvenirs douloureux des précédentes élections.

M. Odinga, qui demeure la principale figure de l'opposition, avait fini troisième en 1997, affirmé que la victoire lui avait été volée en 2007 et contesté la victoire de M. Kenyatta en 2013.

En 2007, les observateurs internationaux du scrutin avaient jugé le scrutin entaché de graves irrégularités. Le pays avait alors plongé pendant deux mois dans des violences meurtrières et une brutale répression policière, faisant au moins 1.100 morts et 600.000 déplacés.

Les incidents les plus meurtriers dans la vallée du Rift avaient opposé Kikuyu, l'ethnie de M. Kenyatta, aux Kalenjin, dont le leader politique est l'actuel vice-président William Ruto. Rivaux en 2007, les deux hommes ont conclu une alliance pour l'élection de 2013, qu'ils ont reconduite en 2017.

En 2013, M. Odinga avait porté ses accusations de fraude devant la Cour suprême, qui lui avait donné tort.

- Quels sont les griefs de l'opposition ?

M. Odinga affirme que les résultats provisoires diffusés depuis mardi sur le site internet de l'IEBC et relayés par les télévisions du pays ont été manipulés.

Sa coalition électorale Nasa martèle que des hackers ont introduit un algorithme dans le serveur de la commission qui modifie les résultats transmis depuis les bureaux de vote en faveur de M. Kenyatta.

Pour ce faire, ajoute Nasa, les pirates ont utilisé les mots de passe de Chris Msando, un haut responsable informatique de l'IEBC retrouvé assassiné fin juillet, visiblement torturé.

La Commission a rejeté ces accusations, affirmant que son système était inviolé et pointant de nombreuses incohérences et erreurs de tabulation dans les documents soumis par l'opposition pour accréditer la victoire alléguée de son champion.

- Comment les Kényans réagissent ?

Pour leur grande majorité, ils attendent et suivent minute par minute les couvertures en direct des médias, à la maison devant leur télévision pour les plus aisés, en petits groupes autour d'un poste de radio dans les milieux modestes.

Le pays tourne au ralenti et Nairobi, capitale habituellement vibrante et embouteillée, offre le spectacle d'une ville morte.

Toutefois, dans les bidonvilles de Nairobi et à Kisumu, fiefs traditionnels de l'opposition, des échauffourées sporadiques ont opposé manifestants et policiers qui ont fait usage de gaz lacrymogènes et de tirs de sommation.

Au moins quatre personnes ont été tuées depuis mardi dans des violences liées au élections, dont deux abattues par la police dans le bidonville de Mathare à Nairobi. La police a également tué deux assaillants en train d'attaquer un bureau de vote à l'arme blanche dans l'est du pays.

- Où va le Kenya ?

Sauf crise politique post-électorale majeure, le président déclaré vendredi sera à la tête d'un pays qui a aligné plus de 5% de croissance économique ces quatre dernières années et a montré sa volonté de devenir un acteur continental incontournable, même s'il a échoué à prendre la tête de l'exécutif de l'Union africaine en janvier.

Mais le nouveau président devra faire face à un ralentissement de la croissance économique prévue pour les 12 mois à venir, selon Nic Cheeseman, professeur de politique africaine à l'université de Birmingham.

Ce dernier prédit que la hausse des prix des denrées alimentaires, qui a été un des enjeux de cette campagne, ne sera pas résorbée facilement.

Et surtout, le président devra gérer l'après-élection, ajoute M. Cheeseman: "De toute évidence, tout ce qui se passe (actuellement) est une mauvaise nouvelle pour le pays".

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