Présidentielle au Kenya : attente anxieuse de l'officialisation des résultats

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Par AFP
Publié le 10 août 2017 - 10:44
Mis à jour le 11 août 2017 - 09:05
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Malgré un appel à la paix peint en swahili sur la chaussée, les manifestations contre les résultats
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© TONY KARUMBA / AFP
Malgré un appel à la paix peint en swahili sur la chaussée, les manifestations contre les résultats de la présidentielle ont tourné à la violence dans les rues de Kibera, à Nairobi
© TONY KARUMBA / AFP

Le Kenya retenait son souffle vendredi dans l'attente de la proclamation du vainqueur de l'élection présidentielle, les résultats provisoires donnant le sortant Uhuru Kenyatta largement favori face à son rival Raila Odinga, qui revendique la victoire.

Tout avait bien commencé mardi, jour du scrutin: les Kényans s'étaient déplacés aux urnes dans le calme et en masse, attestant d'une ferveur démocratique intacte à la faveur de ces élections générales. Mais le climat s'est rapidement détérioré à mesure que l'opposition a multiplié ses accusations de fraude.

Des violences sporadiques, qui ont fait quatre morts, ont ravivé dans le pays le spectre des scènes meurtrières qui avaient suivi l'élection présidentielle de 2007 (au moins 1.100 morts).

Jeudi, les différentes missions d'observations internationales se sont relayées en direct à la télévision pour apporter un soutien prononcé à la commission électorale (IEBC), appelant les Kényans à la patience et leurs leaders à la retenue, tout comme Londres et Washington.

Mais la coalition d'opposition Nasa a persévéré dans ses accusations de fraude, affirmant détenir la preuve, sur la foi de sources internes à l'IEBC, que Raila Odinga avait gagné et enjoignant la commission de le "déclarer président dûment élu de la République du Kenya".

Dans sa réponse écrite au camp de M. Odinga, la commission a relevé des erreurs grossières de tabulations dans les documents censés accréditer sa victoire et provenant selon elle d'une base de données Microsoft, quand l'IEBC utilise Oracle.

Dans la soirée, M. Odinga, 72 ans, s'est dit "déçu" par les observateurs, dans un entretien à CNN. "Nous ne voulons voir aucune violence au Kenya. Nous savons les conséquences de ce qui s'est passé en 2008 et nous ne voulons pas voir cela se répéter". Mais "je ne contrôle personne. Les gens veulent la justice", a-t-il ajouté.

- Dernière bataille -

La déclaration de victoire par l'opposition a suscité jeudi des scènes de liesse à Kisumu (ouest) et dans plusieurs bidonvilles de Nairobi, des fiefs de l'opposition.

"Nous sommes heureux (...) Nous voulons la paix et nous voulons les résultats corrects", déclarait ainsi Anthony Karaba, 35 ans, à Kisumu. Dans le bidonville de Mathare, à Nairobi, des centaines de personnes chantaient: "Uhuru doit partir".

Mais les résultats provisoires de la commission électorale créditaient jeudi soir M. Kenyatta de 54,27% des voix contre 44,84% à M. Odinga, sur 99% des bureaux de vote dépouillés. Une éventuelle victoire de M. Kenyatta laissait craindre un vif sentiment d'amertume chez les partisans de l'opposition et de possibles troubles.

Mercredi, alors que M. Odinga dénonçait le piratage informatique de la base de donnée de l'IEBC au profit du président, des échauffourées avaient éclaté dans les bastions de l'opposition, la police réprimant sans ménagement les manifestations.

Le comportement des quelque 150.000 membres des forces de sécurité déployés pour le scrutin sera crucial dans les jours à venir en cas de protestations. Amnesty international, et M. Odinga jeudi, les ont appelés à ne pas faire un usage disproportionné de la force.

Les accusations de fraude ont exacerbé les passions déjà lestés d'un demi-siècle de rivalité dynastique entre les familles Kenyatta et Odinga.

Le père de ce dernier, Jaramogi Oginga Odinga, fut brièvement vice-président, avant de perdre la lutte post-indépendance pour le pouvoir au profit du premier chef d'État Jomo Kenyatta, le père d'Uhuru.

En outre, à 72 ans, M. Odinga livre certainement sa dernière grande bataille politique, lui qui s'est présenté quatre fois à la présidentielle.

En 2007, il avait rejeté la réélection de Mwai Kibaki, lors d'un scrutin entaché de nombreuses fraudes selon les observateurs. En 2013, il avait aussi contesté sa défaite et s'était tourné vers la justice, qui lui avait donné tort.

Surnommé "Agwambo", "le mystérieux" par sa propre communauté Luo, dans l'ouest du pays, M. Odinga s'est une nouvelle fois présenté comme le garant d'une répartition plus équitable des richesses de l'économie la plus dynamique d'Afrique de l'Est.

De son côté, le président Kenyatta, issu de l'élite économique Kikuyu, l'ethnie la plus nombreuse au Kenya, a mis en avant avec son co-listier William Ruto le développement économique du pays et la réalisation de grands projets, comme la nouvelle ligne ferroviaire entre Nairobi et Mombasa.

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