Mark Zuckerberg, baron de la data ou génie maléfique

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France-Soir
Publié le 23 mars 2024 - 09:23
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Mark Zuckerberg, fondateur et PDG de Meta (Facebook)
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PORTRAIT CRACHE - Considéré comme un prodige de la programmation informatique, Mark Zuckerberg ne doit sa fortune qu’à son talent. Il lui aura fallu être “traître” et “voyou” pour lancer Facebook, hacker et exploiter données personnelles et utilisateurs, pour finalement brasser des milliards. Malicieux et manipulateur, contre vents et marées, il façonnera son modèle économique.

Depuis son premier ordinateur Atari sur lequel il apprit à programmer, Mark Zuckerberg crée plusieurs programmes entre ses 10 ans et son entrée au lycée. Il commence par une simple messagerie baptisée ZuckNet, puis attire l’attention de géants comme AOL et Microsoft lorsqu’il développe le logiciel Synpase, qui permet de créer des listes d’écoute sur la base des goûts musicaux des utilisateurs.

Il est déjà réputé être un “génie de l’informatique” lorsqu’il entre à l’Université Harvard. Il a un don pour créer des programmes, comme CourseMatch, grâce auquel les étudiants peuvent déterminer quels cours suivre, ou encore le controversé site Facemash, qui permet de noter les étudiants du campus les plus attirants à partir de leurs photos. Le site est rapidement fermé par l’administration de l’Université.

Le code d’honneur n’est pas l’honneur du code

Peu de temps après, commence l’histoire de ce qui deviendra l’un des géants mondiaux du web. Il est embauché comme codeur par trois étudiants, dont les jumeaux Winklevoss. Ces derniers sollicitent l’aide de Mark Zuckerberg pour travailler sur un site, Harvard Connection. Si la légende raconte que Rome a été fondée dans le sang, l’histoire retiendra que Facebook a été fondé sur la traîtrise de Mark. 

Le jeune prodige abandonne rapidement le projet des jumeaux Winklevoss pour créer son propre site, baptisé Facebook. Le succès est immédiat, auprès des étudiants du campus, dans les autres universités et enfin dans le grand public. Il fait rapidement l’objet d’une plainte de la part de ses anciens “employeurs”. "Il a volé le moment, il a volé l'idée et il a volé l'exécution", dénonce Cameron, l’un des frères jumeaux. Mark Zuckerberg se défend, affirmant que les idées derrière les deux réseaux sociaux étaient “totalement différentes”. Harvard Connection mettait l’accent sur les rencontres tandis que Facebook mettait plutôt l’accent sur le réseautage. 

Après la publication de conversations entre lui et un ami, peu après le lancement de Facebook, le “génie en informatique”, aussi doué pour le code que maladroit dans ses relations, se vantait d’avoir collecté 4 000 emails, photos et adresses d’utilisateurs du réseau social. “Les gens les ont juste soumis. Je ne sais pas pourquoi. Ils me ''font confiance. Quelle bande de cons”, écrit-il. 

L’affaire intentée par les Winklevoss traînera jusqu'en 2008, année à laquelle Facebook, désormais deuxième site le plus visité au monde, les dédommagera de plus de 65 millions de dollars dans un accord à l’amiable. A la fin de sa deuxième année à Harvard, Mark Zuckerberg, la vingtaine, abandonne ses cours pour se consacrer à son réseau social. Il n’hésite pas à se comporter comme un voyou, voire un pirate, pour lancer Facebook, comme pour bâtir son empire, s'excusant à chaque reprise pour son “paquet d’erreurs stupides” qu’il incombe à son jeune âge. 

Mark addict à la dataperso

En 2007, il lance la plateforme publicitaire Beacon. Celle-ci permet alors à Facebook de collecter les données sur les achats effectués par les utilisateurs du réseau social sur des sites externes. Les usagers se retrouvent enrôlés de force dans la plateforme et la plateforme fait l’objet d’une vive controverse. Facebook offrira alors la possibilité de ne pas souscrire au service… mais collecte tout de même les informations personnelles. 

En 2009, après un recours collectif en justice, Mark Zuckerberg annonce la fermeture de Beacon, qui paie 9,5 millions de dollars pour éviter un procès, dont 41 000 dollars pour chacun de la vingtaine de plaignants. 

Mais Facebook tient fort aux données de ses usagers, que ces derniers en soient informés ou non, d’accord ou pas. Le réseau social change alors sa charte d’utilisation, supprimant le passage qui stipulait que les droits qui lui sont cédés expirent si un membre supprime son profil ou sa publication. Mais face au tollé que cette maladroite manœuvre provoquera, Facebook fait marche arrière. 

Bien que la plateforme Beacon soit fermée, elle ouvre la voie à la fonction “Connect”. Une fois la barre des 500 millions d’utilisateurs franchis, Facebook leur offre alors la possibilité de s’identifier à divers sites Internet à travers le réseau social. La désactivation de la fonction n’est pas aisée et “Connect” soulève encore de questions liées à la protection des données personnelles et de la vie privée. Mark Zuckerberg promet de mettre fin à ces inquiétudes, qui ne font que commencer.

Ces transgressions sont alors soulevées auprès du gendarme américain du commerce (FTC), qui place Facebook sous surveillance pour une vingtaine d’années à partir de 2011. Mark Zuckerberg, dont l’entreprise réalise un chiffre d’affaires de 4 milliards d’euros et prépare son entrée en bourse, reconnaît encore une fois “des erreurs”, promettant plus de “transparence”.

Crédits : ARA

Mais le plus gros scandale est celui de Cambridge Analytica, une société britannique. Le chercheur américain Aleksandr Kogan crée en 2014 la startup “Global Science Research LTD” puis une application proposant un quizz de personnalité. Celle-ci est téléchargée par au moins 270 000 utilisateurs. Comme Facebook permettait aux développeurs à ce moment-là de collecter les données des utilisateurs et de leurs réseaux, Aleksandr Kogan obtient l’accès aux données de 87 millions de personnes. Il est justement mandaté par Cambridge Analytica, qui lui achète les données afin de les exploiter lors des campagnes électorales de Donald Trump ainsi que celle du Brexit. 

La manœuvre est dévoilée en 2018 par le lanceur d’alerte Christopher Wylie, ancien directeur de recherche de la société britannique. Facebook annonce la suppression des comptes de Cambridge Analytica et du chercheur, Aleksandr Kogan, tout en reconnaissant son incapacité à détecter ce type de détournement. La société britannique est mise en faillite et le réseau social, qui deviendra une filiale du groupe Meta, acceptera de payer 725 millions de dollars pour mettre fin au procès. Son PDG admet une “rupture de confiance” avec les utilisateurs de Facebook. “Nous avons la responsabilité de protéger vos données. Si nous n’en sommes pas capables, nous ne méritons pas de vous avoir comme utilisateurs”, a-t-il affirmé.

Hacker-censeur du fin fond de son bunker

Mark Zuckerberg est incorrigible et ses promesses sont vides, Facebook et la maison mère, Meta, seront maintes fois condamnés, en France, en Europe ou ailleurs pour leur gestion des cookies et des données personnelles. Reconnaissance faciale, publicités politiques, usage de vidéos personnelles pour l’apprentissage de l’IA, nouvelles politiques de confidentialité sur WhatsApp… de nombreuses fonctionnalités et décisions sont pointées du doigt. 

Sommé par la suite de réagir aux “fake news” diffusées sur Facebook, le PDG qualifie l’idée que le réseau ait pu impacter l’élection américaine de 2016 “d’assez folle” mais s’excuse une énième fois, reconnaissant avoir pris la question “de haut”. Une attitude similaire lorsqu’il est question du rôle de la plateforme dans la propagation de la haine ou surtout, dans le trafic d’êtres humains. Il sera d’ailleurs accusé d’avoir “du sang sur les mains” pour l’incapacité, ou plutôt l’inaction, des plateformes de Meta dans la protection des enfants contre contre les trafiquants sexuels, qui misent principalement sur Facebook et Instagram pour cibler leurs victimes.

Le hacker en col blanc devient alors censeur, épaulé par les agences de renseignement américaines. Suppression de groupes, de posts et de comptes opposés aux réponses officielles à la pandémie de COVID, autorisation des appels à la violence contre les Russes dans le contexte de la guerre en Ukraine… Les griefs sont nombreux mais le groupe Meta brasse toujours des milliards de dollars avec la data de ses utilisateurs, même si son fondateur fait son mea-culpa.

De 2010 à 2023, Mark Zuckerberg a vu sa fortune personnelle passer de 6 à 106 milliards de dollars. Comme un certain Bill Gates, il adopte alors un niveau de vie modeste, sans voitures de luxe ou achats extravagants, mais à faire partie des habitués au Forum de Davos et à y suivre les idées, que ce soit en matière de santé ou d’édition génétique, sous couvert de philanthropie, trop souvent associées à l’eugénisme.

Depuis 2014, Mark Zuckerberg construit un complexe “anti-apocalyptique”, sur un terrain qu’il a acheté à Hawaï, pour lequel il est accusé de violer les droits des autochtones à disposer de leurs terres. Depuis 2023, le milliardaire s’est attelé à la construction d’un bunker souterrain autosuffisant. De quoi veut-il se protéger ?

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