Dans la Silicon Valley, les inégalités se creusent, neuf milliardaires détiennent 15 fois plus de liquidités que la moitié de la population locale

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France-Soir
Publié le 25 mars 2025 - 11:26
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Les inégalités dans la Silicon Valley s’accentuent. Les neuf milliardaires les plus riches de la ville, parmi lesquels les plus fortunés du monde, possèdent, à eux seuls, 15 fois plus de liquidités que la moitié de la population de la région. Selon le Silicon Valley Index et sa version 2025, qui mesure la situation économique et sociale de la région, 41% de la population totale est née à l'étranger, ce qui représente le pourcentage le plus élevé jamais enregistré. Les inégalités se répercutent aussi bien dans l’emploi que dans l’immobilier, faisant craindre, au président du Joint Venture Silicon Valley, l’institut d’études qui édite ce rapport, “de l’instabilité et de l’incertitude”. 

Les inégalités dans la Silicon Valley ne sont pas un phénomène nouveau. La tendance s'accentue depuis plusieurs années et l’épanouissement des géants de la tech de la région semble enfoncer le clou. Dès 2018, des études universitaires montraient déjà que 90% des travailleurs de la région avaient vu leurs revenus diminuer en 20 ans, malgré une augmentation globale du revenu par tête de 74%. En 2019, on constatait une sous-représentation importante des femmes et des minorités dans les entreprises technologiques, avec seulement 13% de femmes fondatrices de start-ups. 

Entre 2020 et 2024, le rapport de la Silicon Valley Index, publié depuis 1995, a régulièrement souligné l'augmentation du sans-abrisme, qui a atteint un niveau record en 2024 avec plus de 12 520 personnes sans abri. En outre, les disparités en matière de logement se sont accentuées à cette période-là, avec un prix médian des maisons qui rend l'accession à la propriété quasi impossible pour la plupart des résidents. Les inégalités de revenus se sont également creusées, avec des écarts significatifs entre les communautés raciales et ethniques, notamment entre les résidents blancs et ceux issus de minorités. 

Les plus riches s’enrichissent encore, les salariés peinent 

Les mêmes indices affichent des résultats de plus en plus bas, comme le confirme la version 2025 du Silicon Valley Index. La région continue d'attirer une population étrangère importante. Celle-ci a atteint un pourcentage jamais enregistré jusque-là, à savoir 41% de la population totale. Dans le secteur technologique, cette proportion est encore plus marquée : 66% des travailleurs sont nés à l'étranger. Parmi ces travailleurs étrangers du secteur technologique, 70% viennent d'Inde ... ou de Chine. 

D’ailleurs, les Asiatiques représentent désormais 37% de la population (la part la plus élevée), tandis que les résidents blancs ne représentent plus que 30% (contre 60% en 1990). La population vieillit, avec une augmentation de 28% des résidents de 65 ans et plus depuis 2013, tandis que le nombre d'enfants de moins de 18 ans a chuté de 14%. Les inscriptions dans les écoles publiques ont diminué de 9% depuis 2020. 

Les données montrent que le 1% plus riche, soit environ 9 000 foyers, possède 42% de la richesse collective, ce qui équivaut à 421 milliards de dollars. Cette concentration de richesse s'étend aux 10% les plus fortunés, qui détiennent 71% de la richesse collective, une augmentation d'un point de pourcentage par rapport à 2023. 

L'écart entre les plus riches et le reste de la population est particulièrement frappant. Les neuf milliardaires les plus riches de la Silicon Valley possèdent quinze fois plus de liquidités que la moitié inférieure de la population de la région. Concrètement, ces neuf individus détiennent 150 milliards de dollars en actifs liquides, tandis que 447 000 foyers, représentant la moitié inférieure de la population, ne possèdent collectivement que 10 milliards de dollars.  

Il s’agit, entre autres, de Mark Zuckerberg,  Laurene Powell Jobs, veuve de Steve Jobs d’Apple, les cofondateurs de Google, Larry Page et Sergey Brin, le président de Nvidia, Jensen Huang, l’ancien PDG de Google, Eric Schmidt, le cofondateur de WhatsApp, Jan Koum ainsi que le financier George Roberts. 

Dans le même sillage, l'emploi dans la Silicon Valley a connu une légère baisse de 0,1% (1 200 emplois) par rapport à l'année précédente, restant légèrement au-dessus des niveaux de 2019. En comparaison, San Francisco reste 8% en dessous de son niveau de 2019. Les six plus grandes entreprises technologiques (Google, Apple, Meta, Amazon, LinkedIn, et Netflix) représentent 20% de la main-d'œuvre tech et 6% des travailleurs opèrent dans d'autres industries. 

Si le revenu par habitant a atteint un niveau record de 157 000 dollars, soit plus du double de la moyenne nationale, la Silicon Valley ne la doit qu’aux 56 milliardaires et 145 000 millionnaires. Le rapport constate surtout que pour les salariés, les gains d'une année sur l'autre n'ont pas suivi le rythme de l'inflation. 

Une “période d’incertitude” qui annonce la fin d’une ère ? 

Une des conséquences : le marché immobilier reste inaccessible pour beaucoup. En 2024, le prix médian d'une maison a atteint 1,92 million de dollars. Moins de 26% des primo-accédants (personnes qui accèdent à la propriété immobilière pour la première fois, NDLR) peuvent se permettre d'acheter une maison au prix médian. Les disparités en matière de logement sont importantes entre les groupes raciaux et ethniques : 60% des résidents blancs sont propriétaires, contre seulement 34% des résidents noirs ou afro-américains et hispaniques ou latinos. 

Le problème du sans-abrisme s'aggrave. Plus de 12 520 personnes sont sans abri, soit une augmentation de 17% par rapport à l'année précédente. 68% des sans-abri ne sont pas hébergés. Le sans-abrisme chez les jeunes est en hausse, avec plus de 700 mineurs non accompagnés vivant sans abri. 

“La Silicon Valley traverse une période de changement et d’incertitude”, alerte Russell Hancock, président de l’institut à l’origine de cet Index. Il explique les disparités, notamment financière, par le “ralentissement du secteur technologique après douze ans d’expansion agressive pour se concentrer sur l’efficacité et la rentabilité. Cette stratégie fonctionne très bien, mais elle annonce une nouvelle ère de croissance faible, voire inexistante, pour la Silicon Valley”. 

Déplorant des bonnes nouvelles “de plus en plus rares”, il souligne que “la majorité des travailleurs est durement touchée par l’augmentation du coût de la vie et la stagnation des salaires. Le problème le plus urgent, celui du logement, reste irrésolu”. A ses yeux, une “époque prend peut-être fin”.

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