Faut-il abandonner le modèle basé sur la croissance démographique ?
Selon une étude de l'université de Washington publiée l'an dernier, d'ici à 2050, 151 des 195 pays et régions du monde connaîtront une dépopulation. Le taux de croissance démographique tombera sous la barre des 1 % en 2023. La population en âge de travailler a déjà commencé à baisser dans environ un quart des pays du monde, entraînant une pénurie de main-d’œuvre et un ralentissement économique. Selon l'étude, la population mondiale atteindra 9,7 milliards d’habitants en 2064, puis commencera à décliner, ce qui inquiète les pays menacés. Hiroshi Kito, démographe historique et ancien président de l'Université de Shizuoka au Japon, explique comment ce phénomène sera à l’origine des crises des fonds de pension, et de l'obsolescence des anciens modèles économiques. Selon lui, il sera impératif d’abandonner le modèle actuel basé sur la croissance démographique.
Le taux de natalité chute plus rapidement que prévu alors que la population vieillit
Dans cette étude, Christopher Murray, directeur de l'Institute for Health Metrics and Evaluation de l'université de Washington montre que le taux de natalité dans les pays en développement chute plus rapidement que prévu. En 2019, 34 pays avaient des taux d'accroissement naturel négatifs, et 17 pays ont connu une migration nette négative. Pour 174 des 204 pays et territoires, la proportion de la population des moins de 15 ans a diminué entre 1950 et 2019. Au Japon, par exemple, la proportion de personnes âgées de 65 ans et plus a augmenté de plus de 480 %, passant de 4,9 % en 1950 à 28,4 % en 2019. Les 20 pays où la proportion de la population de moins de 15 ans ont le plus augmenté entre 1950 et 2019 se trouvent presque tous en Afrique subsaharienne, l'Afghanistan étant la seule exception. De même, les dix pays qui enregistrent la plus forte baisse de la proportion de la population âgée de 65 ans et plus se situent tous en Afrique subsaharienne et dans l’Afrique du Nord et Moyen-Orient.
L’instruction des femmes, une des raisons du déclin de la population
Le nombre croissant de femmes instruites explique une grande partie de la variation de la fécondité. En Thaïlande, 58 % des femmes poursuivent des études secondaires ou universitaires, une proportion beaucoup plus élevée que les hommes (41 %). Le taux de fécondité du pays était de 1,53 en 2020, ce qui représente une énorme baisse au cours des dernières décennies. À mesure que les pays s'enrichissent, les femmes ont moins d’enfants. Alors que la prospérité croissante améliore la nutrition et les soins, permettant aux gens de vivre plus longtemps, la mortalité infantile diminue, les taux de fécondité chutent et la taille moyenne de la famille diminue. Comme les réductions du taux de mortalité précèdent les réductions du taux de natalité, la population augmente entre-temps, explique une récente étude du HSBC. Pour éviter ce phénomène, les efforts devraient viser à étendre les systèmes de protection sociale tels que les garderies et les congés parentaux pour ne pas affecter négativement le taux de natalité. Cependant, dans certains pays, ces mesures n’ont pas freiné la baisse du taux de fécondité. En Finlande, par exemple, où les systèmes de protection sociale pour les mères et les enfants sont les plus complets au monde, le taux de fécondité du pays a fortement baissé. S'élevant à 1,37 en 2020, il est presque aussi bas que le taux japonais de 1,34 pour la même année.
La fin de l'hégémonie chinoise ?
La population chinoise serait, elle aussi, en déclin depuis 2018. Malgré l’assouplissement de sa politique de limitation des naissances ces dernières années, le taux de natalité du pays, selon des données officielles publiées lundi, est le plus bas depuis au moins 1978. Selon les spécialistes, l'avenir appartiendra aux sociétés capables de se restructurer pour faire face au déclin avant qu'il ne soit trop tard.
Repenser les politiques basées sur l’expansion démographique
La nouvelle réalité créera une nouvelle dynamique — déjà visible dans certains cas dans des domaines allant de la politique monétaire aux systèmes de retraite en passant par les prix de l'immobilier et la structure du capitalisme dans son ensemble. De nombreux gouvernements sont de plus en plus sous pression pour repenser leurs politiques, qui jusqu'à présent reposent principalement sur l'expansion démographique pour leur croissance économique et leur pouvoir géopolitique. S'il y a moins de travailleurs, le modèle de croissance du passé ne fonctionnera plus. La Sécurité sociale, comme les pensions et l'assurance publique, sont fondées sur une population croissante, et elles subiront des distorsions.
À LIRE AUSSI
L'article vous a plu ? Il a mobilisé notre rédaction qui ne vit que de vos dons.
L'information a un coût, d'autant plus que la concurrence des rédactions subventionnées impose un surcroît de rigueur et de professionnalisme.
Avec votre soutien, France-Soir continuera à proposer ses articles gratuitement car nous pensons que tout le monde doit avoir accès à une information libre et indépendante pour se forger sa propre opinion.
Vous êtes la condition sine qua non à notre existence, soutenez-nous pour que France-Soir demeure le média français qui fait s’exprimer les plus légitimes.
Si vous le pouvez, soutenez-nous mensuellement, à partir de seulement 1€. Votre impact en faveur d’une presse libre n’en sera que plus fort. Merci.