Le Japon rejette dans l'océan Pacifique l'eau contaminée de Fukushima
POLLUTION - Le Japon a commencé jeudi à déverser dans l'océan Pacifique plus d'un million de tonnes d'eau radioactive "purifiée", selon les autorités nippones, provenant des restes de la centrale nucléaire de Fukushima Daiichi.
Depuis que le tsunami a détruit la centrale de Fukushima Daiichi en 2011, 1,3 million de tonnes d'eau, soit l'équivalent de 540 piscines olympiques, a déjà été stocké dans les réservoirs de rétention, qui étaient déjà remplis à 97 %.
Cette eau sera déversée dans la mer en plusieurs fois, en commençant par de petites quantités et avec un niveau de contrôle plus élevé. Le premier déversement, de 7.800 mètres cubes (7,8 millions de litres), soit l'équivalent de trois piscines olympiques, prendra 17 jours. Au total, la Compagnie d'électricité de Tokyo (Tepco) prévoit que l'ensemble du processus prendra environ 30 ans.
Cette décision a suscité des protestations dans le pays et des critiques de la part de la Chine, qui la juge inacceptable, bien que le rejet ait reçu l'accord de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA).
La Chine condamne le déversement
Dans un communiqué du ministère des Affaires étrangères, la Chine a déclaré qu'elle s'opposait fermement à la décision de Tokyo et la condamnait. Elle estime que le déversement d'eau contaminée, qui peut être assimilée à un déchet radioactif, constitue une importante question de sécurité nucléaire dont les implications dépassent les frontières du Japon : il s'agit ainsi d'une affaire internationale.
Le porte-parole de l'administration chinoise chargée de la sûreté nucléaire a qualifié la décision du gouvernement japonais d'"extrêmement égoïste et irresponsable", plaçant "ses propres intérêts au-dessus du bien-être de l'humanité".
Pékin annonce qu'il prendra les mesures nécessaires pour protéger l'environnement marin (la Chine et le Japon partagent, entre autres, un accès direct à la mer de Chine orientale), la sécurité alimentaire et la santé publique et qu'il surveillera de près le niveau de radiation dans les eaux après le premier déversement.
De son côté, l'administration générale des douanes chinoise a ensuite annoncé qu'elle interdit l'importation de produits aquatiques en provenance du Japon "afin d'empêcher l'entrée dans le pays d'aliments contaminés et de protéger les consommateurs chinois".
Le géant asiatique est de loin le premier client du Japon pour les produits de la mer, représentant 42% de l'ensemble des exportations japonaises.
En Corée du Sud, le gouvernement n'a pas critiqué la décision du Japon à propos du rejet des eaux contaminées. Han Duck-soo a simplement demandé que les informations à propos de l'opération soient publiées "de manière transparente et responsable sur les trente prochaines années".
La réaction de l'opinion publique et de l'opposition politique est cependant bien différente.
Des manifestations très suivies ont vu le jour à Séoul. Une dizaine de personnes ont été arrêtées alors qu'elles essayaient d'entrer dans l'ambassade japonaise pour protester contre les rejets. Le Parti démocrate ouvert s'est déclaré vigoureusement contre l'opération menée par Tepco.
La fuite est-elle dangereuse ?
Selon les résultats des tests effectués par l'opérateur japonais et publiés jeudi, l'eau contiendrait environ 63 becquerels de tritium (unité de mesure de l'activité radioactive) par litre, ce qui est inférieur à la limite de 10.000 becquerels par litre fixée par l'Organisation mondiale de la santé (OMS) pour l'eau potable.
Le tritium est un isotope radioactif de l'hydrogène considéré comme inoffensif, selon l'entreprise, car il émet de très faibles niveaux de rayonnement et ne s'accumule pas ou ne se concentre pas dans le corps humain.
D'autre part, l'AIEA a également publié une déclaration indiquant que son analyse indépendante sur place avait confirmé que la concentration de tritium était bien inférieure à la limite. "Il n'y aura pas d'effets sur la santé. Il n'y a pas de base scientifique. Il n'y a aucune raison d'interdire les importations de produits alimentaires japonais", a ajouté Geraldine Thomas, ancienne professeur de pathologie moléculaire à l'Imperial College de Londres.
Les détracteurs des opérations de rejet affirment quant à eux que le manque de données à long terme ne permet pas d'affirmer avec certitude que le tritium ne constitue pas une menace pour la santé humaine ou l'environnement marin.
Des risques non "pleinement" évalués ?
L'Organisation non gouvernementale Greenpeace a déclaré que les risques radiologiques n'avaient pas été pleinement évalués et que les impacts biologiques du tritium, du carbone 14, du strontium 90 et de l'iode 129, qui seront rejetés dans le cadre de la décharge, "ont été ignorés".
Des manifestations ont eu lieu au Japon et en Corée du Sud, bien que le gouvernement de Séoul ait assuré que le déversement d'eau était sans danger. Peu avant le début du déversement, plusieurs dizaines de personnes se sont rassemblées devant le siège de Tepco à Tokyo, brandissant des banderoles avec des slogans tels que "Ne déversez pas d'eau contaminée dans la mer".
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