Violences policières et bavures : l'IGPN va les recenser, mais pas les publier
C'est ce qui s'appelle un premier pas timide. Après la révélation par Le Monde, jeudi 7, de la mise en place par la police nationale d'un outil visant à recenser les violences et bavures policières, l'IGPN, la "police des police", a quelque peu douché les espoirs naissants des associations défendant les droits de l'Homme en précisant des limites drastiques.
"La décision a été prise de créer un outil recensant, par convention, les blessures sérieuses, les blessures graves et les décès de particuliers, survenus à l’occasion ou à la suite de l’exercice des missions de la police nationale", dévoile ainsi le courrier de l'IGPN aux différentes directions policières auquel Le Monde a eu accès. Un seuil de comptabilisation qui correspond, concrètement, à 20 jours d'incapacité totale de travail (ITT). "Un champ très restreint", regrette l'ACAT (Action des chrétiens pour l'abolition de la torture), ONG ayant publié un rapport au vitriol sur les violences policières en mars citée par Le Figaro.
A titre d'exemple, le lycéen frappé par un policier fin mars, vidéo qui a fait scandale, s'était vu prescrire huit jours d'ITT. Ou, selon des cas recensés par l'ordre des médecins de la Mayenne des côtes fracturées représentent 10 à 15 jours d'ITT, une fracture du nez 6 jours, une mâchoire cassée "au moins" 15...
Autre limite, l'IGPN n'entend pas publier chaque année un rapport rendant public les chiffres récoltés. "Il revient à la justice de dire si oui ou non la violence était légitime. Quand bien même, nous aurions cette intention, les décisions judiciaires tombent parfois des années après les faits et nos tableaux seraient biaisés. Notre démarche s’inscrit plutôt dans le retour d’expérience et l’évolution de nos pratiques internes, ce qui est le rôle d’une inspection", se justifie ainsi la directrice de la police des polices Marie-France Monéger-Guyomarc’h auprès de Libération.
Pourquoi ne pas publier des chiffres provisoires, dans ce cas? Ce qui permettrait d'évaluer des tendances et, surtout, d'instiller une transparence qui ne permettra pas d'apaiser les tensions avec la population à elle seule mais pourrait y contribuer. L'outil "ne différenciera aucunement un tabassage indiscutable et l’élimination d’un terroriste en pleine action", répond Marie-France Monéger-Guyomarc’h. Puis de plaider, pourtant, pour la nécessité de "combattre l’idée trop généralement répandue que les blessures sérieuses ou graves, voire les décès, sont synonymes d’illégitimité de l’usage de la force ou des armes".
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