Lockdown Files, partie 2 : le marchandage politique de Matt Hancock avec des députés pour maintenir des restrictions sanitaires ; les enfants premières victimes du confinement

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France-Soir
Publié le 24 mars 2023 - 11:30
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Matt Hancock
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STEVE REIGATE / POOL / AFP
Matt Hancock, secrétaire d'État à la Santé britannique.
STEVE REIGATE / POOL / AFP

LOCKDOWN FILES - De nouvelles révélations des Lockdown Files* ont été publiées par The Daily Telegraph. Elles nous démontrent comment le confinement au Royaume-Uni a été maintes fois imposé, au détriment des conseils de responsables et de scientifiques anglais. Le quotidien nous apprend davantage sur le rôle central de Matt Hancock, alors secrétaire d’État britannique à la Santé, dans le maintien à tout prix des restrictions sanitaires. 

*Les "dossiers du confinement" sont issus des 100 000 messages privés échangés sur la messagerie WhatsApp entre l’ex-secrétaire d’État britannique à la santé Matt Hancock, des dirigeants politiques et des hauts fonctionnaires anglais. Cette révélation a été possible grâce à la journaliste Isabel Oakeshott. 

Les coulisses des principales décisions des autorités britanniques dans le cadre de la lutte contre la pandémie de coronavirus, concernant la vaccination, le port du masque, la fermeture des écoles ou le confinement, ont été révélées au grand public fin février 2023 dans les colonnes du Daily Telegraph. Les premières publications ont démontré comment ces décisions étaient essentiellement politiques, souvent opposées aux avis des scientifiques.  

D’autres messages, publiés au fil des semaines, ont mis la lumière sur le bras de fer qui opposait Matt Hancock à plusieurs maires, dont celui de Londres, Sadiq Khan et du Grand-Manchester, Andy Burham, sur la question des restrictions sanitaires.

L’ancien secrétaire d’État à la Santé, qui était également en désaccord avec l'ex-chancelier de l'Échiquier (équivalent du ministre de l'économie, ndlr) Rishi Sunak, devenu l'actuel Premier ministre, avait recours à la peur et au chantage pour dissuader toute rébellion et imposer de nouveaux confinements ou des restrictions plus sévères. 

Un Boris Johnson versatile 

Boris Johnson, qui a exprimé son scepticisme et son “regret” d’avoir instauré un deuxième confinement en novembre 2020, virait constamment de bord sur la question. Dans ses conversations avec ses ministres et conseillers, l’ex-premier ministre passait de “sceptique” à “fanatique” du confinement selon au gré de ses interlocuteurs et des données qui lui étaient présentées.

“Le conflit interne le plus important de Johnson portait sur les trois confinements imposés en 2020 et 2021”, affirme The Telegraph. 

Le premier à peine levé en juin 2020, Boris Johnson envisageait déjà avec Hancock d’élaborer “des protocoles de confinements locaux et nationaux”. En mai, il s’était même inquiété qu’une baisse des contaminations ne mette la "pression" sur le gouvernement en vue de "dé-confiner".

Mais durant l’été 2020, l’ex-premier ministre semble moins attaché à cette mesure. Il a rapidement changé d’attitude, qualifiant un second confinement “d’option nucléaire”, autrement dit fortement déconseillée.

De façon cohérente, en septembre, il annonce un assouplissement des mesures sanitaires. Puis, il renchérit en octobre 2020, en estimant qu’un deuxième confinement serait le “sommet de l’absurdité”. Fin octobre, le revirement est total : Boris Johnson l’impose aux Britanniques. 

Pendant les nombreuses volte-face de Boris Jonhson, ses ministres et ses conseillers alertaient sur les conséquences du confinement sur l’éducation, l’emploi et la santé mentale des citoyens, notamment celle des enfants.  

The Daily Telegraph explique que le Secrétaire du Cabinet (le grade le plus haut des fonctionnaires anglais, nommé par le premier ministre, ndlr), Simon Case, pointait du doigt à la fin octobre 2020 “les terribles résultats” de la pandémie, y compris son impact sur la cohésion sociale.

“Je pense que nous devons être brutalement honnêtes avec les gens. Les confinements mettent notre société et notre économie en situation de lutter contre le Covid-19 mais sont terribles pour d’autres secteurs”, a-t-il écrit sur WhatsApp.  

Les enfants, “dommages collatéraux” du confinement 

Les dirigeants étaient conscients des “dommages collatéraux” de ces quarantaines. À partir d’avril 2020, Hancock a été à plusieurs reprises interpellé sur les conséquences de l'annulation de plusieurs opérations et de soins réalisés par le National Health Service (NHS), l’un des établissements britanniques de référence en médecine générale et d'urgence. Des enfants et des adolescents, alors atteints parfois de tumeurs cérébrales, étaient les premières victimes de la suspension de ces opérations liées à la santé, affirme The Daily Telegraph. 

Les craintes liées aux conséquences du confinement sur la santé mentale des enfants ont été confirmées une année plus tard, en octobre 2021. Le NHS a expliqué que les enfants et les adolescents “ont souffert des nombreux mois d’anxiété et d’isolation”.

Plus de 2 000 enfants étaient quotidiennement reçus dans les services de santé mentale du NHS, deux fois plus que la période pré-Covid. “Un record de 190 000 cas âgés de moins de 18 ans a été signalé en trois mois, d’avril à juin 2021”, lit-on

Le confinement a également retardé l’épidémie hivernale du virus respiratoire syncytial (VRS) chez les enfants. The Daily Telegraph publie le message d’un fonctionnaire datant de mai 2021, dans lequel il a attiré l'attention de Matt Hancock sur la propagation de ce virus durant la saison estivale au lieu des habituelles épidémies hivernales, en raison du confinement d’octobre à décembre.  

Des avertissements justifiés et The Lancet - Infectious Diseases explique ainsi dans un article paru le 2 septembre 2022 que les confinements, qui constituent des “interventions non pharmaceutiques”, ont affecté le comportement des pathogènes à l’origine du VRS (virus respiratoire syncytial) et sa transmission.

“L’absence extraordinaire du VRS au cours de l’hiver 2020-2021 a probablement donné lieu à une cohorte de jeunes enfants sans immunité naturelle contre le virus, ce qui a augmenté le risque d’incidence accrue et d’activité hors saison”, découvre-t-on.

À défaut de chantage, le marchandage politique 

Les Lockdown Files ont démontré dans de précédents articles comment Matt Hancock a joué les cartes de la peur et du chantage aux subventions pour mettre fin à la “rébellion” de plusieurs députés (voir notre article précédent sur France-Soir).

Il ne s’agit pas de la seule “technique” de l’ex-Secrétaire d’État à la santé britannique pour convaincre des députés de voter en faveur de nouvelles mesures, ou du moins, pour les dissuader de voter contre.

The Daily Telegraph explique le 6 mars dernier comment Hancock a mené un marchandage avec de nombreux députés du parti conservateur, listés dans un document selon leur opposition et les chances de leur faire changer d’avis. 

Le vote avait obtenu 292 voix favorables contre 78 voix défavorables. 55 députés conservateurs ont voté “non” tandis que 16 se sont abstenus. Les messages WhatsApp ont révélé que Matt Hancock a personnellement téléphoné à certains députés pour les persuader de voter en faveur du troisième palier de mesures anti-Covid.  

Il a également organisé, avec d’autres députés, un échange de lettres devant leur permettre de démontrer, auprès de leurs électeurs locaux, leurs “engagements” à défendre leurs localités vis-à-vis de l’exécutif.  

La journée du vote, c’est-à-dire le 1er décembre 2020, a ainsi été rythmée par les négociations entre Hancock et des députés conservateurs sur le contenu des dites lettres. Parmi les 95 députés conservateurs classés dans la liste comme étant une “menace” à l’adoption des mesures, 37 ont voté avec le gouvernement. Sur les 55 qui ont voté contre, 49 figuraient dans la liste.  

L’ex-Secrétaire d’État à la Santé apparaît, au fil des révélations des Lockdown Files, comme l’un des principaux instigateurs à l’instauration du confinement et son maintien. Lorsque Boris Jonhson a exprimé son souhait de lever le confinement en juin 2020, Matt Hancock et les conseilleurs de l’ex-Premier ministre en communications étaient les premiers à le dissuader.  

La sœur de Boris, Rachel Jonhson, expliquait d’ailleurs les changements d’avis de son frère par les “données électives que Matt Hancock et Dominic Cummings (principal conseiller de Boris, ndlr) lui présentaient de manière à ce qu’il fasse ce qu’ils voulaient”.

Au gré des découvertes liées à ces Lockdown Files outre-Manche, la question se pose quant à l'intervention du politique au sein d'autres pays occidentaux (dont la France), en matière d'influence en faveur des confinements, présentés comme des mesures sanitaires efficaces.

  • La série des Lockdown files reviendra. 

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