Lyon : à l'heure du selfie, l'autoportrait s'expose au musée des Beaux-Arts
A l'heure du selfie, le musée des Beaux-Arts de Lyon s'interroge sur l'art de l'autoportrait, de Rembrandt aux tweets d'Ai Weiwei, lors d'une exposition qui ouvre ce vendredi 25 pour trois mois.
"C'est un thème d'actualité dans une époque où l'image de soi n'a jamais été aussi présente, avec les selfies qui sont devenus presque envahissants", remarque Stéphane Paccoud, un des conservateurs de ce musée, abrité dans une ancienne abbaye en plein coeur de la ville.
"Donc on a souhaité s'interroger sur cette pratique" avec aussi, évidemment, l'idée d'attirer des jeunes au musée, ajoute-t-il.
L'exposition, baptisée "Autoportraits, de Rembrandt au selfie" a été montée avec la Galerie nationale d'Ecosse d'Edimbourg et la Staatliche Kunsthalle de Karlsruhe en Allemagne, où elle a déjà été présentée.
Découpée en sept thèmes, elle aborde tous les aspects: la représentation de soi, de son âme, de son corps, de l'artiste dans son atelier, avec ses amis, sa famille ou en creux, dans une nature morte.
Les commissaires ont souhaité un cheminement typologique afin d'explorer les différentes modalités et motivations de l'exercice.
Le parcours débute ainsi par un autoportrait de l'artiste lyonnais du XIXe Louis Janmot. Œuvre puissante, de laquelle émane, à travers un regard intense, l'idée du génie créateur.
D'autres très belles pièces ponctuent l'exposition et notamment, celles rarement vues en France d’expressionnistes allemands, présentes ici grâce au partenariat avec la Staatliche Kunsthalle.
Il y a par exemple cette gravure sur bois en couleur d'Erich Heckel. L'artiste s'y représente au lendemain de la Première Guerre mondiale, le regard vide, le visage décharné après son expérience d'infirmier pendant les combats.
Un peu plus loin, Max Beckmann se dessine à la pointe sèche en traits anguleux, fracturés, surmontés d'un étonnant chapeau melon.
A noter, dans un registre plus doux, La séance de peinture d'Henri Matisse, où l'artiste, imprégné de la lumière de Nice, peint son modèle avec en miroir la promenade des Anglais. Et cette toile de Gustave Courbet au titre en forme d'invitation à une douce mélancolie: Les Amants dans la campagne, sentiments du jeune âge.
En fil rouge, on retrouve Rembrandt dans toutes les salles, un des artistes qui s'est le plus livré à cette technique avec plus de 40 autoportraits connus à ce jour.
La dernière séquence amène à se plonger dans le corps de l'artiste avec le Britannique John Coplans, qui photographie un corps vieillissant, recroquevillé mais sensuel en même temps. D'ailleurs, c'est souvent le temps qui passe qui est donné à voir dans ces travaux d'introspection.
L'exposition se termine sur les selfies d'Ai Weiwei qui conçoit le selfie comme une démarche artistique. L'autoportrait posté sur Twitter d'une arrestation à Chengdu en 2009 prend une connotation particulière, celle du témoignage d'un artiste dissident chinois qui informe le monde de sa situation.
Et pour rester dans l'esprit, le musée invite en fin de parcours le visiteur à dessiner son propre portrait ou à tenter l'exercice du photomaton, des clichés ensuite diffusés dans le musée.
L'exposition est visible jusqu'au 26 juin et partira ensuite pour les National Galleries of Scotland.
Preuve que les selfies bousculent et interrogent l'histoire de la représentation de soi, le musée d'art Roger-Quilliot de Clermont-Ferrand accueille également des "Autoportraits" issus du musée d'Orsay jusqu'au 5 juin.
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