Les Portoricains appelés à voter sur leurs relations complexes avec Washington

Auteur:
 
Par AFP
Publié le 11 juin 2017 - 06:13
Image
Un mur couvert d'affiches électorales à San Juan (Porto Rico), le 9 juin 2017
Crédits
© Ricardo ARDUENGO / AFP
Un mur couvert d'affiches électorales à San Juan (Porto Rico), le 9 juin 2017
© Ricardo ARDUENGO / AFP

Les Portoricains votaient dimanche sur le statut de leur île caribéenne en faillite, dans un référendum consultatif proposant le rattachement complet aux Etats-Unis de ce petit territoire américain. Un scrutin boycotté en bloc par l'opposition qui dénonce un résultat donné d'avance.

"Nous voulons avoir les mêmes droits que les Etats (américains) mais le système colonial nous en empêche", a déclaré après avoir voté à San Juan, la capitale, le gouverneur Ricardo Rossello, partisan de faire de l'île le 51e Etat américain.

Ce statut permettrait de mieux répondre à la crise, a martelé ces dernières semaines le gouverneur de 38 ans, arrivé au pouvoir en janvier.

En plus de cette option, les 2,2 millions d'électeurs peuvent cocher la case de l'indépendance ou du maintien du statut actuel de territoire associé aux Etats-Unis jouissant d'une certaine autonomie. Mais avec le boycott et après une campagne quasi-inexistante, la majorité des électeurs venus voter dès 08H00 (12H00 GMT) voulaient devenir Américains de plein droit.

"Je veux assurer l'avenir de mes enfants et de mes petits-enfants grâce aux financements fédéraux qui nous correspondent", confiait à l'AFP Miriam Cruz, une femme au foyer.

Croulant sous 70 milliards de dettes et un mois seulement après avoir déclenché le plus gros processus de faillite jamais déclaré par une entité locale américaine, l'île risque toutefois d'avoir du mal à convaincre Washington d'ajouter une étoile au drapeau des Etats-Unis.

Ancienne colonie espagnole, Porto Rico est devenu territoire américain à la fin du 19e siècle avant d'acquérir un statut spécial d'"Etat libre associé" dans les années 1950, un terme qui renferme toute la complexité des relations entre ces cousins lointains.

Citoyens américains et souvent fiers de l'être, les Portoricains parlent cependant majoritairement espagnol. Et s'ils ne peuvent pas voter à la présidentielle américaine ni élire de représentants au Congrès, les lois votées à Washington les touchent directement. Beaucoup y voient même l'origine de la crise qui assaille l'île.

- 'Victoire écrasante mais faussée' -

C'est en effet attirés par des exonérations fiscales décrétées à Washington que, pendant des décennies, les grands groupes américains se sont installés en nombre à Porto Rico. Mais le gouvernement fédéral a finalement décidé de supprimer cette exemption à compter de 2006, provoquant le départ en masse de ces sociétés.

Frappée doublement par cette saignée et la grande crise financière, Porto Rico a alors plongé dans la récession. Pourtant, celle qu'on surnomme "la Grèce des Caraïbes" a pu aisément continuer à s'endetter sur le marché américain des obligations municipales, où les investisseurs s'arrachaient ses titres, là aussi exonérés d'impôts américains... jusqu'à l'explosion de la bulle.

Pour redresser les finances, Ricardo Rossello a lancé un régime drastique d'austérité. Mais là encore, c'est Washington, à travers une commission de supervision, qui a le dernier mot. Une main-mise insupportable aux yeux de nombreux habitants, d'autant que le président américain Donald Trump s'est plusieurs fois prononcé contre un sauvetage public du territoire.

Pour autant, l'organisation de ce coûteux référendum purement consultatif - le cinquième depuis les années 1960 - alors que les caisses du gouvernement sont vides, indigne l'opposition qui dénonce un vote biaisé.

L'option proposant de faire de Porto Rico un Etat américain "va décrocher une victoire écrasante" mais seulement parce que les partis défendant le statut actuel ou l'indépendance "boycottent ce vote" dont les résultats seront connus vers 22H00 GMT, a averti dimanche le Parti populaire démocrate (PPD).

Le président de ce parti Hector Ferrer, qui défend le statut actuel, a dénoncé dans un communiqué la partialité de l'intitulé officiel du référendum: "plébiscite pour la décolonisation immédiate de Porto Rico".

"L'opinion publique est divisée", souligne Edwin Melendez, directeur du centre d'études portoricaines de la City University à New York. "La moitié de la population, ou plus, estime qu'il ne va rien se passer car (...) le gouvernement américain n'a aucune obligation de prêter attention au résultat, qui manquera en plus de légitimité" si une part importante de l'électorat le boycotte.

L'article vous a plu ? Il a mobilisé notre rédaction qui ne vit que de vos dons.
L'information a un coût, d'autant plus que la concurrence des rédactions subventionnées impose un surcroît de rigueur et de professionnalisme.

Avec votre soutien, France-Soir continuera à proposer ses articles gratuitement  car nous pensons que tout le monde doit avoir accès à une information libre et indépendante pour se forger sa propre opinion.

Vous êtes la condition sine qua non à notre existence, soutenez-nous pour que France-Soir demeure le média français qui fait s’exprimer les plus légitimes.

Si vous le pouvez, soutenez-nous mensuellement, à partir de seulement 1€. Votre impact en faveur d’une presse libre n’en sera que plus fort. Merci.

Je fais un don à France-Soir

Dessin de la semaine

Portrait craché

Image
Kamala Harris
Kamala Harris, ou comment passer de la reine de la justice californienne à valet par défaut
PORTRAIT CRACHE - Samedi 27 juillet, la vice-présidente américaine Kamala Harris a officialisé sa candidature à la présidence des États-Unis, une semaine après le retr...
03 août 2024 - 12:49
Politique
Soutenez l'indépendance de FS

Faites un don

Nous n'avons pas pu confirmer votre inscription.
Votre inscription à la Newsletter hebdomadaire de France-Soir est confirmée.

La newsletter France-Soir

En vous inscrivant, vous autorisez France-Soir à vous contacter par e-mail.