La résilience de Barkhane face au Covid-19 au service de l’efficacité opérationnelle

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Pierre D'Herbes pour FranceSoir
Publié le 30 juin 2020 - 19:46
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TRIBUNE : Même s’il est maintenant connu que l’opération Barkhane a résisté de manière rationnelle et efficace à la crise sanitaire, cette dernière n’en a pas moins été le prétexte d’attaques informationnelles. Une raison pour laquelle il faut rappeler que la gestion efficace de la crise a permis la poursuite du rythme des opérations à l’heure où le moindre faux-pas est guetté pour remettre en question une intervention fondamentale pour la sécurité du Sahel, de la France et de l’Europe.

Quand le monde entier se confinait, les Groupes Armés Terroristes (GAT) restaient actifs, prêts à exploiter le moindre faux-pas afin d’affirmer leur présence dans une région fragile et la faire basculer. A ce titre, la pandémie apparaissait au pire moment pour la France et ses partenaires du G5 Sahel. En effet, quelques semaines après le recentrage stratégique et opérationnel décidé par le sommet de Pau [afin de raffermir la légitimité française], cette crise inédite menaçait d’empêcher la bonne application des dispositions prises lors du sommet, le 13 Janvier 2020.

S’adapter à un nouvel adversaire

Dès le départ l’Etat-Major de l’opération Barkhane s’est adapté à la crise sanitaire en appréhendant le virus comme un nouvel adversaire à traiter, une nouvelle « contrainte opérationnelle » pour reprendre les mots du Général Facon alors commandant de la force Barkhane. Le défis de base étant de poursuivre les opérations destinées à imposer une pression maximale aux GAT tout en limitant la propagation du virus au sein de la Force mais aussi dans les pays du G5 Sahel potentiellement peu résilients.

Dans cette optique l’expérience de l’armée française en gestion de crise fût décisive. En utilisant sa capacité d’adaptation et d’acquisition rapide d’automatismes, le fameux « drill », les militaires de Barkhane ont mis en place un processus de riposte en trois temps, nécessairement très différent de la métropole. Les impératifs opérationnels empêchant un confinement il fût décidé la mise en place d’un système basé sur la détection (tests nasaux : polymeras chain reaction -PCR, et éventuellement scanners) ; l’isolation et enfin le traitement des malades. Ces mesures étant accompagnées de tout une gamme de capacités de désinfection (matériels, véhicules), d’impression 3D (supports de visières de protection, embouts de respirateurs médicaux…), et la mise en place d’une Usine Mobile de Production d’Oxygène Liquide (UMPOL) destinés à l’alimentation des respirateurs artificiels. De cette manière le Service de Santé des Armées (SSA) sur place disposait de tout le panel nécessaire pour faire face à une éventuelle augmentation des cas de contamination. Une capacité importante dans un contexte de confinement mondial ayant un impact direct sur la production. Combiné aux mesures de distanciation sociales, aux désinfections récurrentes des matériels et au relatif isolement des unités espacée sur un territoire important, le Covid-19 n’a donc eu qu’un impact limité permettant alors la poursuite des opérations contre les GAT.

Le virus ne fait pas disparaitre la menace

Comme l’a fait remarquer la ministre des armées Florence Parly : Le Covid-19 change parfois nos plans, mais ne nous fait pas dévier de nos missions, et ne met pas à mal nos combats.

Le virus ne fait pas disparaître les menaces contre la France, et la lutte contre le terrorisme reste une priorité, tant à l'intérieur qu'à l'extérieur de notre territoire.

Pourquoi la ministre, ainsi que les officier supérieur, ont-ils insisté sur ce point ? Parce que le contexte immédiat après Pau était marqué par un climat de défiance extrême envers l’opération Barkhane et son efficacité. Or laisser se propager le virus aurait eu pour effet de paralyser l’action et dés lors laisser le champ libre aux GAT : aussi bien dans le champ de la propagande que sur le terrain.

Pour autant les résultats ont-ils été vraiment au rendez-vous ? Car c’est bien là l’enjeu principal. Or, au sortir du confinement en juin, de nombreux éléments démontrent que Barkhane est parvenu à remplir son contrat opérationnel en regagnant le terrain perdu en 2019, en privant les GAT de leur liberté d’action, tout accélérant la montée en puissance des armées du G5 Sahel (formation, autonomisation tactique, etc.). Ainsi Barkhane est parvenus à réaliser la double performance d’obtenir aussi bien des effets militaires sur le terrain tout en contenant la propagation du virus. Dans le cas contraire l’immobilisation des forces n’aurait potentiellement pas permis les résultats obtenus, voire fragilisé encore plus les états déjà très vulnérables du G5 Sahel, notamment le Mali, le Niger et le Burkina-Faso. Une situation qui eut été désastreuse à la veille du Sommet de Nouakchott (30 Juin) qui doit faire un bilan d’étape six mois après Pau. Un bilan qui n’est pas passé inaperçu dans la mesure où le lancement de la Task Force [européenne] Takuba et la coalition pour le Sahel se sont officiellement lancé en avril, en plein cœur de la pandémie. En aurait-il été de même si les résultats sur le terrain n’avaient pas été au rendez-vous ?

 

En définitive la France, largement critiquée il y a six mois, est parvenu à faire la preuve de son leadership international dans la lutte contre le terrorisme dans le Sahel. Dans un contexte de pandémie mondiale inédite depuis des décennies, elle est parvenue à remplir les objectifs qu’elle s’était assignée tout en montant une nouvelle opération [« Résilience »] destinée à lutter contre le virus, dans sa métropole et les outre-mer. Combien de puissances dans le monde peuvent prétendre à maintenir des troupes en opération (Barkhane au Sahel, Chammal au Proche-Orient, Sentinelle et Résilience sur le territoire national) ?

Dés lors l’affirmation de la coalition pour le Sahel, dont la 1ére réunion s’est déroulée le 12 juin (soixante représentants internationaux), et menée par la France, semble pouvoir se dérouler dans un contexte favorable à l’horizon 2021.

 

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