Référendum : Macron dans les pas de Mitterrand
Cet article fait suite à "Macron : plébiscite avorté", portant sur le sujet du feu référendum "vert" qu'Emmanuel Macron avait proposé pour le climat, et qui n'aura pas lieu.
TRIBUNE - Sur le sujet du référendum, innovation fondamentale de la Vème République, le "en même temps" n'existe pas. Ou bien on est du côté de chez de Gaulle, ou bien on est du côté de chez Mitterrand. Et quand on situe son action du côté de chez de Gaulle, "le référendum n'est pas un jeu".
C'est ce que Michel Debré, ancien Premier ministre du général de Gaulle, soulignait en son temps dans "Le Monde" du 2 août 1984, alors que François Mitterrand, président de la République, avait conçu le projet d'un "référendum sur le référendum" - c'est-à-dire d'une révision constitutionnelle destinée à étendre le champ d'application du recours au peuple - afin de sortir du piège dans lequel il s'était mis lui-même en relançant la vieille querelle de l'école libre. Mais "ni la réforme d'une Constitution ni l'appel au peuple n'ont pour objet de permettre à l'exécutif de se tirer d'un mauvais pas, ou de détourner l'attention de la nation en lui proposant de statuer à côté de la question principale. Institution fondamentale, on ne joue pas avec le référendum populaire", écrivait Michel Debré.
Le référendum "vert" de M. Macron n'est évidemment pas sans analogie avec le "référendum" de 1984... qui n'eut jamais lieu. M. Mitterrand n'entendait recourir au pays que sur un texte référendaire préalablement approuvé par ses opposants au Parlement, avant de le soumettre au peuple français sans courir le risque d'un désaveu. Le subterfuge n'était que trop évident et, en 1984, le Sénat - déjà ! - avait refusé de s'associer à la manœuvre purement politicienne engagée par l'hôte de l'Élysée.
Dans cet article du journal "Le Monde", Michel Debré se référait à l'article 11 de la Constitution pour affirmer que "le recours au référendum est une prérogative de l'exécutif et nommément du président de la République. Il repose sur l'idée que, sur un sujet d'une particulière gravité, le peuple est appelé à trancher au lieu et place du Parlement". Il insistait ensuite sur "le sérieux de la procédure, conçu à un niveau particulièrement élevé par le général de Gaulle : si une réponse positive sert l'autorité du président et la renforce, une réponse négative équivaut à un désaveu tel que le maintien en fonction est hors de question". L'approbation référendaire est ainsi "l'expression d'un assentiment à un homme et à une politique".
Il en découle que le recours au référendum ne peut être envisagé que "pour un sujet grave, donc justifiant un engagement personnel du président de la République, pour que le référendum soit largement compris et provoque un élan, dans un sens ou dans l'autre". La conclusion de Michel Debré, à l'été 1984, qualifie parfaitement la situation de notre pays en ce printemps 2021 : "Le vote négatif du Sénat ne touche pas le principe du référendum ni sa nécessité pour de graves affaires. Il vise une application particulièrement tortueuse et incertaine".
"Tortueuse" : "Qui manque de loyauté, de franchise", explicite le dictionnaire. On ne saurait mieux dire, en effet...
Alain Tranchant est président fondateur de l'Association pour un référendum sur la loi électorale
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