Le Conseil de l'Europe dénonce une "banalisation" du racisme en France
Des experts du Conseil de l'Europe se sont inquiétés ce mardi 1er de la "banalisation" des discours racistes en France, y compris de la part de responsables politiques, et de "l'accroissement des violences racistes, antisémites et islamophobes".
Les violences racistes recensées par le ministère français de l'Intérieur ont augmenté de 14% entre 2012 et 2014, et même de 36% pour les seules violences antisémites, s'inquiètent ces experts de la Commission européenne contre le racisme et l'intolérance (ECRI), dans un rapport qui dénonce également l'homophobie et les discriminations anti-Roms. "Le discours de haine, de par sa banalisation dans la sphère publique, demeure un sujet de préoccupation", a commenté le secrétaire général de l'organisation paneuropéenne, Thorbjørn Jagland. Il a appelé les responsables politiques à s'abstenir "de tenir des propos qui stigmatisent des groupes déjà vulnérables et attisent les tensions dans la société française".
L'ECRI rappelle le cas du député-maire de Cholet, Gilles Bourdouleix, qui avait affirmé en 2013, lors d'une altercation sur un terrain agricole occupé illégalement par des gens du voyage, que "Hitler n'en avait peut-être pas tué assez". Les experts européens évoquent aussi une persistance "préoccupante" des discours islamophobes, alimentés par "certains responsables politiques", comme Marine Le Pen (Front national) comparant les prières de rue à l'occupation allemande (décembre 2010), ou Jean-François Copé (droite) évoquant des "voyous" musulmans qui auraient arraché un pain au chocolat à un jeune au motif "qu'on ne mange pas pendant le ramadan" (octobre 2012).
L'ECRI déplore des décisions prises "au nom d'une conception restrictive de la laïcité" et pouvant être "perçues comme sources de discrimination", comme celle en 2015 du maire de Chalon-sur-Saône, Gilles Platret, de supprimer les menus sans porc des cantines scolaires. Les experts européens demandent aussi aux autorités de "clarifier" la réglementation concernant l'accompagnement de sorties scolaires par des mères d'élèves portant le voile. En décembre 2013, le Conseil d'Etat avait jugé son interdiction illégale. Mais la circulaire qui précisait cette interdiction n'a pas été abrogée, si bien que "des incidents de même nature se reproduisent régulièrement", selon l'ECRI.
L'ECRI demande aussi aux autorités de légiférer pour que le racisme ou l'homophobie constitue "une circonstance aggravante de toute infraction pénale ordinaire". Une réforme promise à plusieurs reprises par le président François Hollande, qui devrait être concrétisée début avril par la présentation du projet de loi "Egalité et citoyenneté" en Conseil des ministres. Quant aux Roms, les autorités françaises doivent leur accorder une domiciliation administrative, même s'ils n'ont pas de résidence stable, et ce afin de ne pas entraver leur accès "aux droits de base", notamment la scolarisation de leurs enfants, soulignent les experts.
Ils déplorent aussi une inflation de discours de haine sur les réseaux sociaux, "malgré les efforts des autorités pour endiguer ce phénomène", mais aussi lors des manifestations contre l'instauration du mariage homosexuel, début 2013. A cette occasion le "discours de haine homo/transphobe s'est cristallisé en France", juge l'ECRI.
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