Bombardement chimique en Syrie : Trump hausse le ton mais reste dépendant du veto de Poutine à l'ONU

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MM
Publié le 06 avril 2017 - 14:18
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Donald Trump, à la Maison Blanche, le 5 avril 2017
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© NICHOLAS KAMM / AFP/Archives
Washington, Paris et Londres ont présenté un projet de résolution condamnant l'attaque chimique de mardi 4.
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Le président des États-Unis a menacé la Syrie mercredi après que l'"horrible" attaque chimique de la veille l'a fait changé d'avis sur Bachar al-Assad. Toutefois le veto russe au Conseil de sécurité de l'ONU pourrait empêcher toute forme de coercition contre le régime de Damas.

L'image a été particulièrement forte mercredi 5 au soir lors de la réunion d'urgence du Conseil de sécurité des Nations unies. Face à ses collègues, Nikki Haley, ambassadrice américaine, a brandi les photos des corps des enfants martyrisés de Khan Cheikhoun (nord ouest de la Syrie) où un bombardement à l'arme chimique a eu lieu mardi 4 au matin.

Tout accuse le régime de Damas d'avoir utilisé un puissant gaz neurotoxique contre une population civile désarmée, provoquant la mort d'au moins 87 personnes dont une trentaine d'enfants et intoxiquant plus de 500 autres civils. Les victimes présentaient des symptômes caractéristiques d’une exposition à des agents neurotoxiques tels que le gaz sarin, a précisé Médecins sans frontières qui pointe du doigt la responsabilité de Bachar al-Assad.

Pour la première fois depuis son accession à la présidence américaine, Donald Trump a infléchi son discours par rapport au régime syrien. "Quand vous tuez des enfants innocents, des bébés, avec un gaz toxique mortel, ça franchit de nombreuses lignes, plus que la ligne rouge", a-t-il expliqué, reprenant les termes utilisés par Barack Obama lors de la précédente utilisation massive d'armes chimiques en Syrie en 2013 dans La Ghouta (est de Damas). A l'époque, Washington avait renoncé à une opération militaire contre Bachar al-Assad, à la faveur d'un accord avec la Russie sur la destruction des stocks chimiques et bactériologiques du régime.

Le nouveau locataire de la Maison-Blanche a d'ailleurs critiqué son prédécesseur avait "tracé une ligne dans le sable" mais n'ayant "rien fait" quand al-Assad l’a franchie. Le magnat de l'immobilier a précisé que sa "position sur la Syrie et Assad a beaucoup changé. Il y a eu plusieurs attaques chimiques ces dernières semaines, on est à un tout autre niveau, ce qui s’est passé est inacceptable". Toutefois, quant à savoir si cela serait suivi de mesures coercitives, le président américain s'est fendu d'une réflexion évasive: "une chose que, je pense, vous avez remarqué à propos de moi sur les questions militaires, c'est que je n'aime pas dire où je vais et ce que je fais".

Son secrétaire d'Etat (ministre des Affaires étrangères), Rex Tillerson, a, un peu plus tard, demandé à la Russie de "bien réfléchir à la poursuite de leur soutien au régime Assad". Ce dernier avait d'ailleurs appelé l'Iran, autre soutien de poids de la Syrie, à mettre au pas son allié.

Washington, Paris et Londres ont donc présenté un projet de résolution condamnant cette attaque et appelant à une enquête complète et rapide de l’OIAC, l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques. Une demande repoussée d'un revers de la main par Moscou qui dispose d'un droit de veto au Conseil de sécurité de l'ONU et qui ne compte pas lâcher aussi facilement son allié syrien. L'ambassadeur adjoint pour la Russie, Vladimir Safronkov, a jugé que la résolution occidentale avait été préparée à la hâte et n'était pas utile, mais il a accepté une éventuelle "enquête objective".

La Russie a par ailleurs apporté une proposition alternative de résolution ne demandant pas spécifiquement à Damas de coopérer avec l'enquête, s'arc-boutant sur sa version du bombardement conventionnel de la part du régime qui aurait frappé "un entrepôt terroriste" contenant des "substances illicites". Une explication polémique, unanimement dénoncé, qui montre la délicate position dans laquelle se trouve Vladimir Poutine vis-à-vis de son allié, déterminé à ne pas l'abandonner au risque qu'il subisse le même sort que Mouammar Kadhafi.

Par ailleurs, même si l'agent neurologique utilisé dans le bombardement n'est pas encore identifié avec certitude il semblerait qu'il s'agisse d'un gaz de type "sarin". Et ce alors que les stocks syriens étaient censés avoir été détruits suite à l'accord de compromis signé par Vladimir Poutine et Barack Obama après l'attaque de La Ghoutha, en 2013, qui avait précipité les Occidentaux au bord d'une intervention militaire.

"Les Etats-Unis prendront des mesures unilatérales en Syrie si l’ONU ne parvient pas à répondre à l’attaque chimique", a prévenu l’ambassadrice américaine à l’ONU Nikki Haley. Une menace à peine voilée mais dont on peine à savoir si elle sera suivie d'action sur le terrain.

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