INFO FRANCE SOIR - Jean-Claude Juncker veut durcir sa position contre un rapprochement énergétique entre l'Allemagne et la Russie

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MB
Publié le 12 septembre 2017 - 09:15
Mis à jour le 13 septembre 2017 - 13:19
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Le président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker, lors d'un débat au Parlement de Strasb
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© PATRICK HERTZOG / AFP/Archives
Jean-Claude Juncker s'est toujours présenté comme sceptique face au projet.
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INFO FRANCE SOIR - Jean-Claude Juncker avait déjà fait part lors de réunions internationales de sa méfiance vis-à-vis du projet de gazoduc Nord Stream II entre l'Allemagne et la Russie. Mais un document de travail rédigé en août par l'European Political Strategy Center -le Think tank de la Commission- confirme, éléments chiffrés à l'appui, pourquoi l'exécutif européen va se positionner contre le projet.

EXCLUSIF - C’est un document de 14 pages qui n’était prévu que pour une diffusion interne mais que FranceSoir a pu consulter. L’European Political Strategy Center (EPSC), le think-tank interne à l’Union européenne et directement relié au président de la Commission Jean-Claude Juncker a rédigé, probablement en août, un rapport intitulé The Case of Nord Stream 2 - Divide and Impera again ("le cas du Nord Stream 2 - encore une fois le diviser pour mieux régner"). A l’intérieur, un long argumentaire expliquant que la tentation allemande de céder aux sirènes d’une relation bilatérale avec la Russie pour sa politique énergétique -passant par la construction d’un nouveau pipeline parallèle au Nord Stream actuel- serait une très mauvaise nouvelle pour la construction d’une politique énergétique commune. Et donc, entre les lignes, que les partisans d’une Europe plus intégrée doivent se mobiliser.

L’argumentaire est un plaidoyer intégral contre la stratégie bilatérale que l’Allemagne s’arrête à prendre après les élections législatives. Angela Merkel s’est en effet toujours caractérisée par son intérêt pour une collaboration avec la Russie -alors qu’elle est pourtant une farouche adversaire diplomatique de Vladimir Poutine. Quand à l’opposition de centre gauche du SPD, elle s’est aussi annoncée ouverte à une telle collaboration. Or, l’Union européenne s’est toujours montrée méfiante par rapport à ce chantier qui, s’il avait été à l’origine labellisé comme "un projet d’intérêt pour l’Europe", a vu depuis les intérêts russes prendre peu à peu le dessus avec la mainmise désormais totale de Gazprom sur son capital. 

Le rapport se donne aussi pour mission d’estimer l’impact du Nord Stream 2 sur l’Europe et les pays proches de l’UE, au moins autant au niveau diplomatique qu’économique. En Ukraine par exemple, l’EPSC craint que cette relation bilatérale via le pipeline "impacte la cohérence de la politique étrangère de l’UE et des sanctions économiques contre la Russie". En outre, l’Ukraine perdrait dans l’affaire "deux milliards de dollars de revenus par an" que lui verse la Russie pour faire passer son gaz à destination de l’Europe sur son territoire, ce qu’elle n’aurait plus à faire avec un nouveau gazoduc traversant la mer Baltique. Or, assure le rapport ce serait "l’Union européenne, les Etats-Unis et le Fonds monétaire international, les principaux financiers du gouvernement ukrainien, qui seraient affectés par les pertes pour l’Ukraine".

Surtout, assure le document, une telle relation entre Moscou et la principale économie européenne mettrait un coup sans doute fatal au projet de "troisième paquet énergie" visant à réduire la dépendance énergétique de l’UE vis-à-vis des exportateurs étrangers.

Au printemps dernier, la Commission européenne avait déjà évoqué sa volonté de négocier un projet contre lequel elle s’opposait. Ce nouveau rapport, qui n’a pas vocation a être diffusé mais qui détaille la position de la Commission, envoie cependant un message clair: Jean-Claude Juncker va sans aucun doute être le principal opposant aux futures négociations entre l’exécutif allemand qui sortira des urnes le 24 septembre et le Kremlin (qui possède la majorité du capital de Gazprom). Le président de la Commission, qui avait fait de l’intégration énergétique la deuxième de ses cinq priorités pour sa présidence, sera donc le fer de lance de la construction de l’Europe de l’énergie, là où le principal membre de l’UE regarde vers l’Est.

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