Rapatrier le corps de Kim Jong-nam : le moyen pour Pyongang d'enterrer les preuves

Auteur:
 
Par AFP
Publié le 31 mars 2017 - 13:58
Image
Kim Jong-Nam (G), le 4 mai 2001, et Kim Jong-Un (D), le 10 mai 2016
Crédits
© Toshifumi KITAMURA, Ed JONES / AFP/Archives
Kim Jong-Nam (frère de Kim Jong-un) a été empoisonné au VX, un agent neurotoxique si puissant qu'il est classé comme une arme de destruction massive, le 13 février à l'aéroport de Kuala Lumpur.
© Toshifumi KITAMURA, Ed JONES / AFP/Archives

En récupérant la dépouille du demi-frère assassiné du dirigeant nord-coréen Kim Jong-Un, la Corée du Nord cherche à éliminer toute trace de son implication dans ce meurtre aux relents de guerre froide, jugent les analystes.

Kim Jong-Nam a été empoisonné au VX, un agent neurotoxique si puissant qu'il est classé comme une arme de destruction massive, le 13 février à l'aéroport de Kuala Lumpur.

Avec lui disparaissait un héritier potentiel au trône de Kim Jong-Un, ainsi que le fils aîné du dirigeant nord-coréen défunt Kim Jong-Il. Il vivait en exil depuis des années et représentait une gêne pour Pyongyang.

Cet assassinat, immédiatement imputé par Séoul à Pyongyang, a provoqué une grave crise diplomatique entre la Corée du Nord et la Malaisie. Les deux ambassadeurs ont été expulsés et les deux pays ont empêché les ressortissants de l'autre de partir.

Mais vendredi, Kuala Lumpur et Pyongyang ont annoncé un accord permettant à leurs citoyens respectifs de rentrer chez eux, et le rapatriement en Corée du Nord de la dépouille de la victime.

Les analystes estiment que Pyongyang va immédiatement s'en débarrasser.

"Ils vont incinérer la dépouille", dit Kim Kwang-Jin, un Coréen du Nord ayant fait défection, devenu chercheur à l'Institut pour la stratégie de sécurité nationale de Séoul.

Pyongyang va déclarer que la mort était naturelle et blâmer ses adversaires pour la controverse, poursuit-il.

- Famille? -

"La Corée du Nord va dire qu'un de ses ressortissants appelé Kim Chol est mort de crise cardiaque et affirmer que ses ennemis en Corée du Sud et aux Etats-Unis ont fomenté un drame".

Pyongyang a refusé de confirmer l'identité de la victime, qui était porteur d'un passeport nord-coréen au nom de Kim Chol lorsqu'il a été assassiné.

La Malaisie a cependant confirmé officiellement qu'il s'agissait de Kim Jong-Nam sur la foi de tests ADN. Kuala Lumpur disait attendre qu'un membre de la famille réclame le corps.

Le Premier ministre malaisien Najib Razak a expliqué jeudi avoir reçu "une lettre de (la) famille" de Kim Jong-Nam, sans préciser de qui il s'agissait. Ce pourrait être Kim Jong-Un lui-même ou n'importe lequel de ses proches, plutôt que son épouse ou ses enfants.

Avec ce rapatriement, le Nord empêche qu'un lieu d'inhumation à l'étranger n'attire les opposants au régime, poursuit M. Kim, qui travaillait pour la compagnie d'assurances nord-coréenne avant de fuir le pays.

"Il est naturel qu'ils veuillent le corps car il continuerait à attirer l'attention s'il se trouvait ailleurs", dit-il à l'AFP.

La Corée du Sud a accusé son voisin du Nord d'avoir mis en place un "ordre permanent" pour éliminer le demi-frère de Kim Jong-Un, qui s'était montré critique envers le régime.

- 'Tout le monde sait' -

Certains analystes jugent que la Corée du Nord fera montre d'une grande discrétion envers la dépouille afin que ses propres citoyens ne sachent pas la vérité.

"L'existence de Kim Jong-Nam et son assassinat, c'est comme une boîte de Pandore qui ne peut être connue du peuple", juge Kim Yong-Hyun, professeur d'études nord-coréennes à l'Université Dongguk. "Tout sera fait en secret avec le minimum de procédures".

Malgré tout, Pyongyang n'évitera pas les répercussions de l'assassinat, disent les analystes.

"Cette affaire est close pour l'instant et l'histoire du corps est une petite victoire pour Pyongyang", déclare Chang Yong-Seok, chercheur à l'Institut des études pour la paix de l'Université nationale de Séoul.

Mais la Corée du Nord a subi "des dégâts irréparables" avec ce meurtre qui cimente son image d'inhumanité et l'a brouillé avec l'un de ses rares alliés diplomatiques, ajoute-t-il.

La Corée du Sud a répété à maintes reprises que cette affaire illustrait clairement la brutalité du régime nord-coréen.

"Que la Corée du Nord le reconnaisse ou non", poursuit M. Chang, "tout le monde sait qui est responsable".

Seules deux suspectes, une Indonésienne et une Vietnamienne ont été inculpées pour l'assassinat. Des images de vidéo-surveillance du 13 février montrent la victime approchée par derrière par deux femmes, dont l'une lui projette quelque chose au visage.

L'article vous a plu ? Il a mobilisé notre rédaction qui ne vit que de vos dons.
L'information a un coût, d'autant plus que la concurrence des rédactions subventionnées impose un surcroît de rigueur et de professionnalisme.

Avec votre soutien, France-Soir continuera à proposer ses articles gratuitement  car nous pensons que tout le monde doit avoir accès à une information libre et indépendante pour se forger sa propre opinion.

Vous êtes la condition sine qua non à notre existence, soutenez-nous pour que France-Soir demeure le média français qui fait s’exprimer les plus légitimes.

Si vous le pouvez, soutenez-nous mensuellement, à partir de seulement 1€. Votre impact en faveur d’une presse libre n’en sera que plus fort. Merci.

Je fais un don à France-Soir

Dessin de la semaine

Portrait craché

Image
Kamala Harris
Kamala Harris, ou comment passer de la reine de la justice californienne à valet par défaut
PORTRAIT CRACHE - Samedi 27 juillet, la vice-présidente américaine Kamala Harris a officialisé sa candidature à la présidence des États-Unis, une semaine après le retr...
03 août 2024 - 12:49
Politique
Soutenez l'indépendance de FS

Faites un don

Nous n'avons pas pu confirmer votre inscription.
Votre inscription à la Newsletter hebdomadaire de France-Soir est confirmée.

La newsletter France-Soir

En vous inscrivant, vous autorisez France-Soir à vous contacter par e-mail.