Coopérative, CDI, ou auto-entreprise, quelle est la meilleure solution pour les livreurs de repas ?
Même si le fonds de solidarité permet aux restaurants de survivre à la crise, la vente à emporter est la seule planche de survie à laquelle les restaurants peuvent s’accrocher pour éviter la catastrophe que signifie mettre la clé sous la porte. Cette situation inédite implique des très nombreuses créations d’emploi dans le secteur, pour couvrir l’explosion de la demande de livraison de repas. Cependant, dans un contexte de revendication pour des meilleures conditions des livreurs, le statut auto-entrepreneur, sous lequel travaillent la majorité des livreurs, est remis en question.
Un record de création d’entreprise en France malgré la crise
Selon le dernier rapport de l’Insee , en 2020, le nombre total de créations d’entreprises en France a atteint un nouveau record avec une augmentation de 4 % par rapport à 2019, et ce malgré la crise sanitaire liée à la pandémie de Covid-19. L’Insee explique cela par les immatriculations d’entreprises individuelles sous le régime du micro-entrepreneur. Le secteur le plus sollicité a été sans surprise celui des activités de transports et d’entreposage.
Les créateurs d’entreprises individuelles en 2020 ont en moyenne 36 ans et la plupart sont des hommes. Mais même en plein boom des livraisons, et malgré l’impression que le monde appartient aux livreurs à partir de 18h, cette activité est soumise à de fortes contraintes qui pèsent sur leurs revenus. Les livreurs tentent d’améliorer leur sort et beaucoup quittent les grandes plateformes pour créer des coopératives. Certaines entreprises, conscientes du problème, optent même pour considérer les livreurs dans leurs effectifs en leur proposant des contrats de travail.
Just Eat préfère embaucher ses coursiers en CDI
Le spécialiste de la livraison de repas à domicile vient d’annoncer, dimanche 29 janvier, sa décision d’embaucher 4 500 livreurs dans une trentaine de villes en France d'ici la fin de l'année. Ces livreurs, dont 350 ont déjà été recrutés à Paris, sont payés 10,30 euros de l'heure, indépendamment du nombre de courses réalisées. De cette manière, Just Eat, veut se démarquer de Uber Eats ou Deliveroo qui ont recours aux auto-entrepreneurs.
Des coopératives et un rapport pour encadrer les conditions de travail des livreurs
La situation des livreurs est devenue insoutenable, et dans certaines villes naissent des alternatives, comme les coopératives de livreurs indépendants. À Bordeaux, la coopérative des « coursiers bordelais » a montré la voie d’un système pour le respect du droit de travail des livreurs, qui peuvent bénéficier d’une mutuelle, des huit semaines de congés payés ou des tickets restaurant. À Nantes, l’association Naofood, s’organise aussi autour d’un modèle plus éthique. Et d’autres coopératives peuvent encore s’appuyer sur la fédération CoopCycle (la fédération européenne des coopératives de coursiers à vélo), qui leur fournit une application regroupant des restaurants et commerçants locaux dont ils peuvent livrer les produits aux particuliers.
S'affilier à un tiers est une des propositions du rapport Frouin pour encadrer les conditions de travail des livreurs. Le rattachement des livreurs à des coopératives leur permettrait en effet d'accéder à une couverture sociale minimum. Mais les livreurs sont-ils favorables au statut d’auto-entrepreneur épaulé par une coopérative, ou préfèrent- ils un CDD/CDI?
Un livreur salarié travaillera-t-il dans de meilleures conditions?
Pour Ludovic Rioux, livreur et secrétaire du syndicat CGT Uber Eats-Deliveroo, la décision de Just Eat d’opter pour des livreurs salariés, ne garantit pas que Just Eat respectera les conditions de travail des livreurs. Selon lui “on sait que dans les entreprises aujourd’hui, le patronat ne recule devant rien, même face au code du travail ou à la convention collective.”
Sachant que les plateformes de livraison ont toujours fait jouer les conditions de travail en faveur de leur profit économique, il reste a voir si Just eat ne trouvera pas aussi une raison économique qui s’imposera au bien être des livreurs. “C’est aussi possible qu’il y ait d’autres éléments derrière. Le secteur d’activité de la livraison prend une place de plus en plus importante, ce n’est pas étonnant que des entreprises essaient de tirer leur épingle du jeu” estime le secrétaire du syndicat CGT Uber Eats-Deliveroo.
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