"Luxleaks" : Antoine Deltour "fier" d'avoir fait avancer le débat fiscal en Europe
Protagoniste emblématique de l'affaire LuxLeaks, Antoine Deltour, accusé d'avoir organisé la fuite de centaines de documents fiscaux, s'est dit "fier" d'avoir fait avancer le débat fiscal en Europe, lors de sa première audition ce mardi 3, une semaine après l'ouverture du procès à Luxembourg. "J'éprouve une certaine fierté d'avoir contribué à ces avancées importantes pour la fiscalité en Europe", a-t-il déclaré à la barre.
Ancien employé du cabinet d'audit PricewaterhouseCoopers (PwC), il est poursuivi pour vol domestique, divulgation de secrets d'affaires, violation de secret professionnel et blanchiment, accusé d'avoir fuité les documents par l'intermédiaire du journaliste Edouard Perrin, 45 ans, également entendu au procès mardi matin. Antoine Deltour encourt jusqu'à 10 ans d'emprisonnement.
La publication de ces rescrits fiscaux (ou "rulings"), des accords passés entre l'administration fiscale et PwC pour le compte de ses clients, dans l'émission Cash Investigation diffusée en mai 2012 sur la chaîne publique France2 et dans le cadre des "LuxLeaks" publiés en novembre 2014, avait provoqué une prise de conscience internationale de l'industrie de l'optimisation fiscale.
Interrogé par le juge sur son état d'esprit à la suite du grand déballage, Antoine Deltour s'est dit "surpris" de l'apparition de l'ensemble des documents, mais aussi "satisfait" que le débat fiscal prenne une telle ampleur. "On pouvait espérer que l'indignation suscitée aboutisse à des actions politiques concrètes", a-t-il souligné. Le déclenchement de l'affaire avait finalement poussé la Commission européenne, présidée par Jean-Claude Juncker, ancien Premier ministre et ministre des Finances du Luxembourg à l'époque des faits, à agir pour une meilleure coopération entre Etats dans le domaine fiscal. Une directive sur l'échange automatique de "rulings" a même fait l'objet d'un accord politique en novembre 2015 durant la présidence luxembourgeoise de l'Union européenne.
Antoine Deltour, calme, presque sans hésitation, a ensuite détaillé sa prise de contact avec le journaliste Edouard Perrin, faite à l'initiative de ce dernier après qu'il eut remarqué un commentaire bien informé du lanceur d'alerte sur un blog. Le journaliste est de son côté poursuivi pour violation du secret professionnel et violation de secrets d'affaires. "Je ne suis ni un commanditaire ni un voleur", a déclaré Edouard Perrin à la presse à la sortie de la salle d'audience où il avait préalablement affirmé que "tout journaliste doit entrer en possession des éléments de preuve".
Parce qu'il estime avoir tout simplement "fait son travail", Edouard Perrin, visiblement heureux d'avoir pu être entendu en cette journée internationale de la liberté de la presse, vise la relaxe. Le procès reprendra mercredi avec le début des plaidoiries. Il pourrait se prolonger le 10 mai alors que les débats devaient initialement s'achever mercredi.
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