Mediator : la justice se prononce sur la responsabilité civile de Servier
La justice se prononce ce jeudi 14 en appel sur la responsabilité civile de Servier envers une malade exposée au Mediator, après la condamnation des laboratoires en première instance pour avoir laissé sur le marché ce médicament "défectueux" dont ils ne pouvaient "ignorer les risques". C'était une première: le 22 octobre, huit ans après la révélation du scandale sanitaire, le tribunal de grande instance de Nanterre, saisi des demandes de deux malades exposés au Mediator, avait condamné pour la première fois le fabricant Servier à indemniser leur préjudice. Aucune victime présumée du Mediator n'avait jusque-là été indemnisée judiciairement, les tribunaux ayant seulement accordé des provisions.
Servier avait interjeté appel dans le dossier de l'une des victimes, une femme de 67 ans: celui-ci avait donc été réexaminé le 3 mars par la cour d'appel de Versailles, qui rend sa décision ce jeudi. L'autre victime, un homme de 73 ans, avait fait appel, jugeant l'indemnisation insuffisante, et son dossier sera plaidé le 19 mai. La sexagénaire, qui a consommé du Mediator de 2006 à 2009, demande à la justice une nouvelle expertise médicale destinée à mieux cerner son préjudice et 50.000 euros de provisions à Servier. Ou, à défaut, plus de 40.000 euros d'indemnisation - elle en avait obtenu 9.750 en octobre.
Consommé par cinq millions de personnes, l'antidiabétique, largement détourné comme coupe-faim pendant plus de 30 ans et retiré du marché français en novembre 2009, est à l'origine de graves lésions des valves cardiaques (valvulopathies) et d'hypertension artérielle pulmonaire, pathologie rare et actuellement incurable. Devant la cour, les débats avaient porté sur les liens entre la valvulopathie de cette malade et le caractère "défectueux" du Mediator, dont les juges de Nanterre avaient estimé qu'en 2006 déjà, "l'état des connaissances scientifiques ne permettait pas d'ignorer les risques d'hypertension artérielle pulmonaire et de valvulopathie induits par le benfluorex", son principe actif.
"La seule suspicion de ces risques", avaient relevé les magistrats, obligeait les laboratoires Servier "à en informer les patients et les professionnels de santé", notamment dans la notice d'utilisation. Pour Servier, au contraire, "les connaissances (sur le défaut) du Mediator étaient très progressives. Le risque n'a été avéré qu'en 2009", avait plaidé l'une de leurs avocats, Me Nathalie Carrère. Version contestée par la défense de la malade: "Au minimum en 1999, ce n'est plus du doute, c'est de la certitude d'une implication du benfluroex dans ces problématiques cardiaques et pulmonaires", avait rétorqué Me Martine Verdier.
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